Parce qu’elles sont « un sas de privation de liberté entre l’extérieur et l’intérieur du territoire national, les zones d’attente sont révélatrices de la priorité donnée par les autorités au contrôle des frontières sur le respect des libertés individuelles ». Dans son rapport d’observations de 2015 sur les zones d’attente(1), l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE) dénonce de nouveau « l’opacité des pratiques administratives et policières » constatée, à partir de ses permanences(2), visites et observations d’audiences, dans ces lieux d’enfermement où sont maintenues les personnes auxquelles est refusé l’accès au territoire (8 962 ont été maintenues en 2015).
L’association rapporte notamment « qu’un grand nombre de refus d’admission est motivé par un problème de justificatifs concernant l’hébergement, l’assurance ou encore les ressources ». La situation des personnes n’ayant pas les documents exigés est soumise à l’appréciation de la police aux frontières (PAF) quant au « risque migratoire » présenté, indique l’ANAFE. Or existent des « pratiques arbitraires », selon elle, comme l’« exigence d’un paiement à l’avance de la réservation d’hôtel pour la totalité du séjour ». Qu’il s’agisse d’une « méconnaissance des textes juridiques » ou d’une « interprétation à la discrétion de la PAF », la conséquence est la même, déplore l’association : « Bien qu’en mesure de justifier des conditions d’entrée sur le territoire français, des personnes se trouvent placées en zone d’attente. » Et si certaines sont libérées après avoir pu réunir les documents demandés, d’autres, « pourtant dans une situation analogue », ne le sont pas sans motif apparent.
De manière générale, l’association continue de constater que « les personnes maintenues ne sont pas suffisamment informées sur la procédure de maintien en zone d’attente et sur leurs droits ». En outre, malgré ses revendications, « aucune permanence d’avocats n’existe à ce jour en zone d’attente ». Or une information partielle ou tardive empêche les migrants d’exercer leurs droits dès la notification du refus d’entrée, « ce qui peut avoir de graves conséquences au vu du risque constant de refoulement et de la brièveté des délais de recours en zone d’attente ». Et malgré quelques avancées contenues dans la réforme du droit d’asile de juillet 2015, la demande de protection à la frontière « reste une procédure éminemment compliquée, qui semble avant tout servir à filtrer, davantage qu’à protéger ». L’application de la procédure « Dublin » à la frontière, de même que la possibilité pour l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) de classer une demande d’asile comme irrecevable, ont de surcroît complexifié « le parcours du combattant » du demandeur d’asile aux portes du territoire.
L’association ajoute qu’en 2015, selon le ministère de l’Intérieur, 18 mineurs isolés sur 211 ont été refoulés. « Lorsqu’ils ont lieu, les renvois, décidés par la PAF et non par un juge, sont réalisés sans qu’aucune information ne garantisse la prise en charge du mineur à son retour ». L’ANAFE a également « suivi 58 personnes souffrant d’une pathologie ou ayant des difficultés d’accès aux soins », dont 12 ont été réacheminées.
(1) « Voyage au centre des zones d’attente. Rapport d’observations dans les zones d’attente – Rapports d’activité et financier 2015 » – Novembre 2016 – Disponible sur
(2) L’association dispose d’un droit d’accès permanent à la zone d’attente de Roissy-Charles-de-Gaulle et d’un réseau de visiteurs habilités à intervenir dans toutes les autres.