Dans une décision du 27 octobre dernier, le Conseil d’Etat a considéré que les litiges relatifs aux arrêtés préfectoraux autorisant une dérogation au pourcentage maximal d’évolution du tarif d’hébergement des EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) partiellement ou non habilités à l’aide sociale, fixé chaque année par le gouvernement, relevaient de la compétence du juge administratif.
Dans les faits, la fille d’une résidente d’EHPAD partiellement habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale s’était fiée aux voies de recours indiquées par l’administration préfectorale et avait demandé au tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale (TITSS) d’annuler l’arrêté par lequel le préfet de département avait autorisé la structure à revaloriser ses tarifs d’hébergement. Le code de l’action sociale et des familles permet à ce type d’établissements de fixer librement le prix de la prestation « hébergement » lors de la première année d’exécution du contrat. L’évolution du tarif est ensuite encadrée chaque année par arrêté ministériel(1), qui fixe un pourcentage maximal de hausse, compte tenu de l’évolution des coûts de la construction, des produits alimentaires et des services. L’EHPAD peut néanmoins demander au préfet de département l’autorisation de déroger à cette règle(2). Celui-ci peut alors fixer un pourcentage supérieur en cas d’augmentation importante des coûts d’exploitation résultant de l’amélioration de prestations existantes ou de la modification des conditions de gestion ou d’exploitation. Dans la présente affaire, le TITSS avait annulé la décision préfectorale. Sur appel du préfet, la Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale (CNTSS) avait cependant annulé le jugement rendu en première instance, au motif que le juge tarifaire n’était pas compétent pour connaître du litige. La requérante s’était alors pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat, demandant à la fois l’annulation de l’arrêt de la CNTSS et le jugement au fond de l’affaire.
La Haute Juridiction administrative a rejeté son pourvoi, confirmant la position adoptée par le juge tarifaire. S’appuyant notamment sur l’article L. 351-1 du code de l’action sociale et des familles, elle souligne que l’arrêté du représentant de l’Etat qui fixe un pourcentage maximal d’augmentation des prix des prestations « hébergement » supérieur à celui déterminé par arrêté ministériel ne peut être regardé comme un tarif relevant du champ de compétence du juge tarifaire. Le fait que l’arrêté préfectoral indiquait une voie de recours erronée n’avait aucune incidence sur l’étendue de la compétence du juge spécialisé. Il en résulte que le recours contre un arrêté du préfet de département (ou, désormais, du président du conseil départemental) fixant un pourcentage d’évolution du tarif d’hébergement d’un EHPAD partiellement (ou non) habilité, dérogatoire au pourcentage maximal de hausse assigné par arrêté ministériel, relève de la compétence du juge administratif et non du juge de la tarification sanitaire et sociale.
(1) Depuis la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement (ASV), le pourcentage maximal de hausse est fixé conjointement par les ministres chargés des personnes âgées et de l’économie et non plus seulement par ce dernier.
(2) Depuis la loi « ASV », il revient au président du conseil départemental d’autoriser les dérogations à ce pourcentage.