Annoncé au mois de mai par la maire de Paris, Anne Hidalgo, et présenté en septembre dernier en présence de la ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, et de nombreux acteurs de l’urgence sociale, le premier centre d’accueil des migrants à Paris a ouvert ses portes le 10 novembre, près de la porte de la Chapelle (XVIIIe arrondissement), avec un peu de retard sur la date prévue(1). Un second centre d’hébergement d’environ 400 places doit encore ouvrir, « dans les prochains mois » selon la mairie de Paris, à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) à destination des publics vulnérables (familles, femmes enceintes, isolées).
Géré par Emmaüs Solidarité, le site de Paris-Nord, facilement repérable à la présence d’une grosse bulle colorée boulevard Ney, doit assurer l’accueil et l’orientation de 50 à 80 personnes chaque jour, de 8 heures à 20 heures, de manière inconditionnelle. Il dispose en outre, dans un bâtiment à part, d’une capacité de mise à l’abri temporaire de 400 places (qui doit être portée à 600 d’ici à la fin de l’année, selon la Ville). Cet hébergement est réservé aux hommes seuls adultes « primo-arrivants », pour une durée de cinq à dix jours. « C’est l’espace de transition qui manquait entre l’arrivée de la personne et l’orientation vers une place en centre d’accueil et d’orientation », explique-t-on à l’association. Côté financement, « l’investissement sur le centre de la Chapelle est de 6,5 millions d’euros, financé à 80 % par la Ville et 20 % par l’Etat », rappelle la municipalité, pour un budget de fonctionnement prévu « de 8,6 millions d’euros annuels, dont 7,24 millions à la charge de l’Etat ».
Ouvert quelques jours après l’inauguration d’un nouveau centre d’hébergement d’urgence pour personnes sans abri dans le XVIe arrondissement et après une énième évacuation, très médiatisée, d’un campement sauvage près de la place Stalingrad, le centre de Paris-Nord doit « faire face à un triple enjeu », rappelle Emmaüs Solidarité : « accueillir les personnes migrantes au fur et à mesure de leur arrivée, garantir à chacun d’entre eux une prise en charge digne et de qualité permettant la satisfaction de leurs besoins vitaux, et assurer la fluidité des orientations vers les dispositifs de prise en charge de plus longue durée, le temps que leur demande d’asile soit instruite ». Le site est ainsi organisé autour de plusieurs pôles d’activité, dont le « pôle accueil » situé dans « la Bulle », où sera effectuée « une pré-évaluation par les travailleurs sociaux d’Emmaüs Solidarité et de l’OFII [Office français de l’immigration et de l’intégration] », souligne la municipalité parisienne, avant d’orienter les personnes vers les deux centres d’hébergement (Paris-Nord et Ivry).
A la veille de son ouverture, le Groupe d’information et de soutien des immigrés a pour sa part soulevé un certain nombre d’inquiétudes sur le centre, « qu’il s’agisse de ses conditions de fonctionnement, de l’accueil “inconditionnel” qu’il est censé mettre en œuvre ou des modalités de sortie du dispositif ». Une incertitude demeure sur le « sort des demandeurs d’asile déboutés et des demandeurs d’asile placés sous convocation “Dublin” qui demanderont à être admis », a notamment estimé l’association dans un communiqué du 9 novembre. Dans leur document de présentation, les partenaires du dispositif indiquent que les migrants souhaitant s’inscrire dans une démarche de demande d’asile « se rendront dans l’espace d’hébergement temporaire » installé dans la halle. Il ajoute qu’« après évaluation de leur situation administrative, les personnes se voient proposer une orientation vers le dispositif le mieux adapté, sur l’ensemble du territoire national : CHU migrants (centres d’hébergement d’urgence), CAO (centres d’accueil et d’orientation), CADA (centres d’accueil pour demandeurs d’asile) ou encore la plateforme nationale des réfugiés ». Interrogée par les ASH, la préfecture de région n’a pas donné davantage de précisions. Depuis l’ouverture du camp, un total de 290 migrants y ont été accueillis, indiquait le 15 novembre l’AFP, citant le préfet de région Jean-François Carenco. Les premiers départs devaient avoir lieu le 17 novembre : « Au total, au moins 80 partiront en CAO », a déclaré le préfet, ajoutant qu’il « faut absolument que des migrants commencent à partir pour éviter la reconstitution de campements à Paris ».