A l’issue de près de deux années de travaux menés par un groupe de travail réunissant ses adhérents gestionnaires de centres éducatifs renforcés (CER), la CNAPE (Convention nationale des associations de protection de l’enfant) rend publique sa contribution pour « créer les conditions d’une véritable réinsertion » après la sortie de ce dispositif(1). A partir de ses constats, elle interpelle les pouvoirs publics pour repenser les conditions de sortie des jeunes à l’issue d’un placement en CER et formule 34 recommandations articulées autour de trois axes.
La CNAPE rappelle que les adolescents – des mineurs récidivistes ou primo-délinquants connaissant des difficultés multiples et ayant « un vécu institutionnel important » – sont accueillis dans ce dispositif au titre de l’enfance délinquante, sur décision judiciaire. La spécificité des CER réside notamment « dans la prise en charge intensive, contenante et renforcée des mineurs accueillis et la présence éducative permanente ». Du fait d’un effectif réduit (groupe de six à huit jeunes), « le CER offre une modalité différente d’affiliation au groupe » et la sortie est souvent vécue comme une séparation, une « nouvelle rupture » qui peut constituer une période de fragilité. Or, aujourd’hui, « les deux principales orientations qui figurent dans les projets de sortie des CER sont le retour en famille ou la prise en charge dans un autre lieu d’accueil, notamment en hébergement (foyers éducatifs, par exemple) ». La première solution est souvent choisie « par défaut en raison de l’impossibilité à trouver une réponse appropriée », tandis que les dispositifs traditionnels d’accueil collectif ne sont pas, « la plupart du temps, adaptés aux mineurs sortant des CER ». En outre, « le seul suivi assuré par le service éducatif de milieu ouvert de la protection judiciaire de la jeunesse [PJJ] n’est guère suffisant » pour assurer la réinsertion durable des jeunes concernés. Alors que les prises en charge sont de courte durée et que l’élaboration d’un projet de sortie nécessite du temps, les complémentarités d’intervention, en amont et en aval du dispositif, se révèlent aussi défaillantes.
Le premier axe de propositions de la CNAPE porte dans ce contexte sur la préparation de la sortie du CER dès l’arrivée du mineur, avec l’ensemble des acteurs concernés, visant une ouverture progressive vers l’extérieur. A cet égard, « il serait intéressant de réfléchir à la mise en place plus systématique d’une phase d’expérimentation permettant de tester sur plusieurs jours le projet de sortie » du jeune, suggère la fédération. Selon elle, « il importe de concevoir un projet individualisé unique s’inspirant du projet pour l’enfant ». Des audiences de début et de fin de placement devraient obligatoirement être mises en œuvre, ajoute-t-elle. En parallèle, le travail en réseau devrait être renforcé par des partenariats institutionnels.
Un autre volet concerne la mise en place d’un accompagnement spécifique à la sortie du CER, au cours d’une période de transition permettant une adaptation progressive à l’autonomie. Pour éviter les régressions liées aux ruptures, la CNAPE préconise « un suivi éducatif intensif et renforcé se poursuivant à la sortie » du dispositif et « se desserrant au fur et à mesure de l’évolution de la situation du jeune et de ses besoins ». Elle propose d’expérimenter « la fonction de coordination et de service de suite » en finançant un équivalent temps plein supplémentaire au sein de l’établissement, de même qu’une « équipe mobile de référents-coordonnateurs » sur un territoire donné. Ce dispositif, qui pourrait être porté par une plate-forme associative, pourrait également accompagner les jeunes sortant de centres éducatifs fermés.
Le troisième axe concerne la mise en place d’un accompagnement dédié pour les jeunes adultes de 18 à 25 ans ne possédant pas ou peu de soutien familial, sortant de dispositifs de la protection de l’enfance ou de la PJJ. Encadré par un « référent insertion », ce dispositif permettrait l’élaboration et la poursuite du projet personnalisé du jeune après sa majorité et éviterait les ruptures de prise en charge. Plus globalement, la CNAPE prévoit, 20 ans après leur création, de consacrer de prochains travaux à l’évolution des CER, « au regard du contexte actuel et du nouvel environnement dans lequel ils s’inscrivent ».
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