Il aura fallu plus de deux ans pour que la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle voie le jour. Elle avait en effet été préparée dès 2014 par Christiane Taubira, puis reprise par Jean-Jacques Urvoas, pour enfin être définitivement adoptée par les parlementaires le 12 octobre après un parcours législatif houleux(1). C’est un « texte fondateur de réformes structurelles qui s’imposeront pour renforcer le rôle de service public de la justice », s’est félicité le garde des Sceaux, qui devra toutefois attendre la décision du Conseil constitutionnel devant lequel la loi vient d’être déférée.
La loi de modernisation de la justice comprend diverses dispositions visant, entre autres, à :
→ rendre la justice « plus accessible ». Dans ce cadre notamment, un service d’accueil unique du justiciable sera créé dans 342 juridictions afin de lui permettre d’« obtenir une information générale ou sur une procédure en cours partout en France », explique la chancellerie. Autre innovation du texte : la possibilité de faire des actions de groupe en matière de discriminations, de questions environnementales ou de protection des données personnelles ;
→ favoriser le règlement amiable des litiges. Entre autres mesures, illustre le ministère de la Justice, « une conciliation gratuite préalable sera systématiquement tentée pour les litiges de moins de 4 000 € » et des expérimentations de médiation préalable obligatoire seront lancées en matière familiale (par exemple, pour la fixation d’une pension alimentaire pour les couples non mariés séparés) ou devant le juge administratif (contentieux intéressant la fonction publique, notamment) ;
→ simplifier l’organisation judiciaire. Le texte prévoit, en particulier, le transfert du contentieux des affaires de sécurité sociale et de l’incapacité, ainsi que celui relatif à l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé et à la couverture maladie universelle complémentaire, au pôle social du tribunal de grande instance (TGI)(2), ainsi que le transfert des demandes de réparation d’un dommage corporel au TGI afin de décharger le tribunal d’instance ;
→ aménager la justice des mineurs. Parmi les mesures inscrites dans la loi figure la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs « pour alléger le fonctionnement des juridictions et garantir la spécialisation de la justice des mineurs, [ce qui est] l’assurance de l’efficacité dans la sanction », affirme le garde des Sceaux. Le texte instaure aussi l’obligation d’assistance d’un mineur lors d’une garde à vue ;
→ simplifier les procédures en matière civile. La loi prévoit notamment la possibilité – sans avoir à passer devant le juge – de divorcer par consentement mutuel par acte sous seing privé signé par les avocats des époux et enregistré devant le notaire, l’allongement de trois à cinq jours du délai de déclaration de la naissance d’un enfant auprès des services de l’état civil(3), l’enregistrement du changement de prénom et du pacte civil de solidarité en mairie et non plus au tribunal ou encore la mise en œuvre du plan de surendettement élaboré par la commission départementale de surendettement sans que les particuliers aient à se présenter devant le magistrat.
(1) Après le rejet du texte en première lecture par les sénateurs, une commission mixte paritaire s’est réunie à l’Assemblée nationale et au Sénat. Comme elle n’est pas parvenue à un compromis, le texte a de nouveau été examiné par les deux chambres. Le Sénat l’ayant encore rejeté, le dernier mot est finalement revenu aux députés.
(2) Les tribunaux des affaires de sécurité sociale et les tribunaux de l’incapacité disparaissent ainsi pour être fusionnés dans ce pôle social qui sera constitué au sein des TGI.
(3) Ce délai est porté à huit jours lorsque l’éloignement entre le lieu de naissance et les services d’état civil le justifie, précise la loi.