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Plus d’un sans-domicile sur dix est diplômé de l’enseignement supérieur

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Environ 140 000 personnes étaient sans domicile en France métropolitaine en 2012, soit une augmentation de plus de 50 % en 11 ans, indique l’étude sur les sans-domicile parue dans le dernier numéro d’Economie et statistique(1) de l’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques). Outre la confirmation de cette hausse, ces travaux conduits avec l’INED (Institut national d’études démographiques) apportent un éclairage nouveau : 14 % des sans-domicile francophones (66 300 adultes, dont 30 000 nés à l’étranger) ont fait des études supérieures et 10 % en sont sortis diplômés. A titre de comparaison, en 2012, 26,4 % de la population de France métropolitaine était diplômée du supérieur. « Signe de l’extension des phénomènes de déclassement, le diplôme ne protège pas systématiquement de la précarité », pointe l’étude. Les auteurs soulignent le caractère inattendu de ces résultats : « Les diplômés du supérieur sans domicile appartiennent à deux catégories très différentes, deux mondes sociaux, le supérieur et la pauvreté, qui ne semblaient pas destinés à se rencontrer, ni socialement, ni statistiquement, ni sociologiquement. »

Les diplômés du supérieur sans domicile sont, par rapport aux non-diplômés, plus souvent âgés de 30 à 49 ans, issus de catégories plus favorisées et vivent davantage en région parisienne. Ils sont aussi plus souvent nés à l’étranger (66 %, contre 43 % pour les non-diplômés), particulièrement en Afrique. L’étude dégage néanmoins deux profils plus affinés, « produits par deux processus de précarisation différents » : les diplômés de l’enseignement supérieur français – plus souvent des hommes, plus âgés, seuls, un peu plus fréquemment issus de classes sociales défavorisées – et ceux diplômés de l’enseignement supérieur étranger – plus souvent des femmes, plus jeunes, en couple et avec des enfants, un peu plus souvent issus de classes moyennes. Globalement, « les diplômés du supérieur sans domicile sont souvent dans des situations comparables aux sans-domicile non diplômés », selon l’étude. Bien qu’ils s’en distinguent « par un rapport à l’emploi un peu plus dynamique, un état de santé jugé (par eux) plus souvent comme “très bon”, une expérience plus tardive de la sans-domiciliation, et notamment de la “rue”, et un soutien actif de leur réseau de sociabilité (amis, proches, voisins, famille) ». Tandis qu’un quart des sans-domicile, diplômés ou non, ont un emploi au moment de l’enquête – proportion qui rappelle que le travail n’est pas non plus un rempart contre la précarité –, 41 % des diplômés sans domicile disent avoir « toujours travaillé régulièrement » avant de se retrouver au chômage ou de cesser de travailler.

Selon l’étude, les principaux facteurs de la sans-domiciliation des diplômés du supérieur sont dans l’ensemble proches de ceux des non-diplômés. Mais pour ceux ayant décroché leur diplôme en France, la perte d’un emploi (12 %) et la séparation du conjoint (20 %) apparaissent comme les raisons les plus fréquentes, alors que, pour ceux ayant étudié à l’étranger, le changement de pays lié à une situation d’insécurité (20 %) est le plus souvent cité. Dans ce cas, la précarisation résulte des difficultés d’insertion – dans l’emploi, le logement – et de valorisation du diplôme. Même s’ils ont connu une expérience de la « rue » moins précoce et moins fréquente que les autres, les diplômés sont – signe de la précarisation de la vie étudiante – 14 % à avoir connu une première situation de sans-domiciliation au cours de leurs études.

Le document souligne par ailleurs que l’âge moyen de l’ensemble des sans-domicile progresse : les personnes de 60 ans et plus sont trois fois plus nombreuses qu’en 2001 et constituent 10 % de cette population en 2012. Les sans-domicile francophones nés à l’étranger sont davantage en famille. Ils vivent seuls et sans enfants dans 58 % des cas (l’étude a comptabilisé plus de 30 000 enfants sans domicile dans les agglomérations de plus de 20 000 habitants). Autre chiffre, rappelant le poids des parcours en protection de l’enfance : en 2012, parmi les adultes nés en France et hébergés par un service d’aide ou fréquentant un lieu de distribution de repas, 23 % avaient été placés pendant leur enfance. Ces derniers sont plus jeunes (34 % ont entre 18 et 29 ans, contre 23 % pour ceux qui n’ont pas connu le placement) et plus souvent des femmes (48 %, contre 30 % parmi ceux qui n’ont pas connu le placement).

Notes

(1) Disponible sur www.insee.fr.

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