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Budget 2017 de la sécurité sociale : les grandes lignes dévoilées

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Faire encore des économies et créer de nouvelles protections. Tels sont les objectifs du gouvernement, qui souhaite améliorer la couverture maladie des travailleurs précaires, mieux accompagner les familles dans leurs difficultés ou encore étendre la retraite progressive aux salariés ayant plusieurs employeurs.

Marisol Touraine n’est pas peu fière : « les efforts d’économies que nous avons assumés depuis 2012 ont payé. Le redressement des comptes est là », a-t-elle affirmé le 23 septembre à l’issue de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale qui a présenté un état des lieux des comptes sociaux(1). En effet, le déficit du régime général de la sécurité sociale seul devrait, en effet, s’établir à 3,4 milliards d’euros en 2016 (contre 6,8 milliards en 2015), grâce à une amélioration des comptes de toutes les branches. Et en 2017, il devrait même être ramené à 0,4 milliard. Mais, pour la ministre des Affaires sociales et de la Santé, « construire une nouvelle donne sociale, ce n’est pas seulement rétablir les comptes. C’est aussi rénover profondément nos politiques publiques, créer de nouvelles protections. » C’est l’ambition qu’elle affiche pour le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) de ce quinquennat dont elle a dévoilé les grandes lignes le même jour, en compagnie du secrétaire d’Etat chargé du budget et des comptes publics, et qui doit être présenté le 5 octobre en conseil des ministres.

Sécuriser la couverture maladie des actifs précaires

C’est la plus belle surprise : l’ardoise de la branche « assurance maladie » s’amenuise, passant de 5,8 milliards d’euros en 2015 à 4,1 milliards en 2016. Une situation qui, selon la commission des comptes, s’explique par un léger ralentissement des prestations servies (+ 2,3 % en 2015 et + 2,1 % en 2016). En 2017, le déficit de la branche devrait même encore se réduire, pour s’élever à 2,6 milliards. Pour y parvenir, le gouvernement va proposer aux parlementaires, dans le cadre du PLFSS pour 2017, de voter un taux de progression de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) fixé à 2,1 % (pour atteindre un total de 190,7 milliards d’euros), contre 1,75 % en 2016. Pour respecter cet objectif, il faudra faire des économies à hauteur de 4,1 milliards, soit 0,6 milliard de plus que l’année dernière, a précisé Marisol Touraine. Dans ce cadre, les ONDAM « soins de ville » et « hospitalier » devraient respectivement progresser de 2,1 % et de 2,0 % (au lieu de 1,7 % et de 1,75 % en 2016). Les dépenses devraient être contenues notamment grâce au « virage ambulatoire », et à la pertinence et au bon usage des soins.

Le PLFSS pour 2017 comprend également des mesures visant à améliorer la couverture maladie des actifs précaires. Par exemple, une disposition de ce texte entend permettre aux travailleurs « qui enchaînent des contrats de travail de courte durée relevant du régime général et du régime des salariés agricoles de bénéficier d’une couverture maladie continue ». Ainsi, « afin d’éviter des “allers-retours” répétés » entre les deux régimes, il est prévu que ces salariés puissent « rester attachés à leur caisse d’origine, au sein du régime général ou du régime des salariés agricoles ». Autre mesure envisagée : améliorer l’articulation entre maladies chroniques et activité professionnelle « afin de tenir compte des évolutions permettant aux personnes affectées par [ces maladies] de reprendre et [de] poursuivre leur activité ».

Par ailleurs, à l’heure actuelle, en cas de reprise d’activité après une période d’invalidité, la pension d’invalidité est suspendue. Et, en cas de récidive de la maladie à l’origine de la première période d’invalidité, l’assuré se voit attribuer le même montant de pension, sans tenir compte des évolutions de salaire qu’il a pu connaître depuis. Une injustice que le PLFSS pour 2017 entend réparer en permettant de prendre en compte les nouveaux éléments de carrière dans le calcul de la pension d’invalidité.

Le projet de loi comprend aussi une disposition en faveur des assurés atteints d’une affection de longue durée (ALD). En règle générale, pour les arrêts de travail, la durée des indemnités journalières est limitée à 360 jours sur une période de trois ans. Dans le cadre d’une ALD, l’assuré ouvre droit à une période d’arrêt de travail de trois ans au maximum, définie de date à date, au terme de laquelle il devra retravailler au moins un an pour bénéficier d’une nouvelle période de trois ans. « La règle retenue pour les ALD, conçue pour être plus protectrice, peut être toutefois défavorable pour les personnes qui continuent de travailler, explique le gouvernement : elles peuvent en effet, au terme d’une période de trois ans, avoir été en arrêt de travail moins de 360 jours, sans pour autant pouvoir travailler aussi pour ouvrir le droit à une nouvelle période de trois ans ». Aussi entend-il proposer aux parlementaires de revoir cette règle pour permettre aux assurés en ALD de s’arrêter, au-delà de la période de trois ans, dans la limite des 360 jours.

En marge du PLFSS pour 2017, Marisol Touraine a également annoncé qu’elle lancerait un plan pluriannuel pour l’accessibilité des soins dentaires reposant sur la revalorisation de certains actes (soins conservateurs dans une logique de prévention) et l’encadrement des dépassements d’honoraires pour les actes à entente directe(2). Des mesures qui s’inscriront dans le cadre des négociations actuellement en cours entre l’assurance maladie et les syndicats de chirurgiens-dentistes sur le futur avenant à leur convention nationale relatif à l’accès aux soins(3). D’ores et déjà, la ministre a indiqué, le 25 septembre sur France 3, qu’elle « mettrait 200 millions d’euros pour permettre un meilleur remboursement des soins chez le dentiste ».

Mieux accompagner les familles

La branche « famille » de la sécurité sociale s’en sort bien elle aussi. En 2016, elle devrait afficher un déficit de 1 milliard d’euros (contre 1,5 milliard en 2015), en raison non seulement du transfert au budget de l’Etat du financement intégral de l’aide personnalisée au logement, de l’allocation de logement familiale et de la protection juridique des personnes majeures, mais aussi d’une moindre progression des dépenses de prestation (0,6 %). En 2017, ses comptes devraient être à l’équilibre grâce à une probable stagnation de ces dépenses.

L’année prochaine, le gouvernement entend poursuivre son soutien aux familles touchées par une séparation. Après avoir instauré une garantie contre les impayés de pensions alimentaires(4), il entend créer, via le PLFSS pour 2017, une agence de recouvrement des pensions alimentaires. Ses missions, selon un communiqué du 23 septembre du ministère des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes :

→ recouvrir les impayés de pensions alimentaires, dès le premier mois d’impayé ;

→ sur décision du juge, encaisser directement les pensions alimentaires auprès d’un ancien conjoint violent ou menaçant et les reverser au parent ayant la charge de l’enfant ;

→ à partir de 2018, donner force exécutoire aux accords amiables fixant une pension alimentaire. « A partir d’un barème national, l’agence pourra ainsi en sécuriser le montant et en assurer le recouvrement en cas d’impayé », explique le ministère.

Par ailleurs, le PLFSS pour 2017 prévoit de modifier le circuit de paiement des aides accordées aux parents dans le cadre du complément de libre choix du mode de garde (CMG) « emploi direct » de la prestation d’accueil du jeune enfant(5). Objectif, explique l’exposé des motifs de l’avant-projet de loi, permettre une « lecture immédiate pour le particulier employeur du coût réel qu’il devra supporter in fine pour l’emploi du salarié ». Ainsi, à compter de 2018, après prise en compte des exonérations de cotisations et contributions sociales, le montant du CMG sera affecté en priorité au paiement des cotisations et contributions sociales restant à la charge de l’employeur. Le montant des aides restant dues au titre du CMG sera, lui, versé aux parents par les caisses d’allocations familiales. « Cette mesure simplifiera, pour les familles […], la compréhension de leurs aides en limitant les flux financiers et les avances de trésorerie », souligne l’exposé des motifs de l’avant-projet de loi.

Etendre la retraite progressive aux salariés ayant plusieurs employeurs

En 2016, la branche « vieillesse » devrait afficher un solde positif de 1,1 milliard d’euros et ce, « pour la première fois depuis 2002 », se félicite le gouvernement. L’année prochaine, elle devrait confirmer ses résultats avec un excédent de 1,6 milliard, « sous l’effet des réformes des retraites et notamment de la progression des recettes de cotisations », souligne la commission des comptes.

S’appuyant sur ces bons résultats, le gouvernement va proposer aux parlementaires d’étendre la retraite progressive – dont les règles ont été réformées en 2014(6) – aux salariés ayant plusieurs employeurs (employés à domicile, par exemple). Pour mémoire, ce dispositif permet aux salariés, dès l’âge de 60 ans, de continuer à travailler à temps partiel tout en percevant une fraction de leur pension de vieillesse et en continuant à cotiser pour leur retraite. D’après l’exposé des motifs de l’avant-projet de loi, un décret précisera les conditions de mise en œuvre de cette disposition, notamment la durée de travail nécessaire pour ouvrir droit au dispositif, qui devrait être « comprise entre 40 % et 80 % », ainsi que les règles permettant le décompte total de l’activité à temps partiel.

Hausse de 2,9 % des ressources pour le secteur médico-social

En 2017, 21,5 milliards d’euros seront dédiés aux établissements et services médico-sociaux accueillant des personnes âgées dépendantes ou des personnes handicapées (soit une progression de 3,2 %, contre + 2,1 % cette année). Cette somme résulte de l’addition de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie « médico-social », qui devrait progresser de 2,9 % (contre 1,9 % cette année), d’une fraction du produit de la contribution de solidarité pour l’autonomie (1,1 milliard), de 106 millions de recettes fiscales et d’un prélèvement de 230 millions d’euros sur les réserves de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Ces crédits devraient permettre :

• de revaloriser de 0,92 % les moyens dévolus au titre des places et des services existants ;

• de soutenir les plans de création de places pour les établissements et services pour personnes handicapées à hauteur de 209 millions, de poursuivre le déploiement du plan « autisme » 2013-2017 pour 60 millions et de mettre en œuvre, comme l’a demandé le président de la République lors de la dernière conférence nationale du handicap(1), la stratégie quinquennale d’évolution de l’offre médico-sociale grâce à un budget de 30 millions ;

• de soutenir les créations de places d’établissements et services pour personnes âgées à hauteur de 85 millions, dont 17 millions au titre du plan « maladies neuro-dégénératives » ;

• de mettre en œuvre la réforme du financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes(2) en renforçant leurs moyens à hauteur de 185 millions, dont 32 millions seront consacrés à l’amélioration de la qualité des accompagnements.

Notes

(1) Résultats 2015, prévisions 2016 et 2017 – Septembre 2016 – Disponible sur www.securite-sociale.fr.

(2) Depuis longtemps critiquée, la part des soins dentaires prise en charge par la sécurité sociale est inférieure à celle des mutuelles (37 %, contre 40,3 %), occasionnant un reste à charge élevé pour les ménages (22,7 %).

(3) Ces négociations devraient aboutir d’ici à la fin de l’année.

(4) Voir en dernier lieu ASH n° 2967 du 1-07-16, p. 37.

(5) Le CMG est un dispositif qui allie exonération de cotisations sociales et prise en charge partielle de la rémunération d’un salarié, impliquant « des règles distinctes et des temporalités différentes, ce qui nuit à leur visibilité et à leur efficacité », explique l’exposé des motifs de l’avant-projet de loi.

(6) La loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraite a en effet simplifié les conditions d’accès à ce dispositif et ainsi permis son développement (plus de 8 500 salariés en bénéficient aujourd’hui et le nombre de départs à ce titre a doublé entre 2014 et 2015) – Voir ASH n° 2889 du 26-12-14, p. 39 et n° 2896 du 6-02-15, p. 44.

(1) Voir ASH n° 2962 du 27-05-16, p. 5.

(2) C’est la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement qui a réformé les modalités de financement de ces établissements – Voir ASH n° 2954 du 1-04-16, p. 45.

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