« On peut trouver des jeux pour enfants chez Nathan, Toys’R’Us, Oxybul ou même Decathlon, pointe Sophie Choisnel, psychomotricienne à l’institut médico-éducatif Château d’O, à Montpellier. Mais les fournisseurs de jouets éducatifs et ludiques spécialisés ont notre préférence, car ils proposent ou créent eux-mêmes des articles adaptés aux besoins des enfants en situation de handicap. Je pense au sable à modeler ou aux balles sensorielles. Ma dernière commande ? Auprès de Wesco, des briques de construction en carton. »
Les prestataires spécialisés ne proposent que la vente par correspondance, avec du conseil par téléphone. Parmi les leaders français, Wesco commercialise beaucoup de jouets traditionnels, quand Hop’Toys – marque fondée par un éducateur spécialisé – mise sur l’innovation, avec un catalogue de 300 pages de produits repérés dans le monde entier. « Les articles destinés aux enfants “exceptionnels” ont pour objectif de développer des compétences par le jeu. Par exemple, si l’enfant a une déficience visuelle, l’objet pourra l’aider à améliorer sa sensibilité tactile ou auditive, explique Nicolas Statucki, responsable grands comptes chez Hop’Toys. Nous faisons également attention au choix des matériaux, qui doivent être le plus solides possible – même s’ils ne peuvent pas être incassables ! » Parmi ses meilleures ventes auprès des établissements sociaux et médico-sociaux, l’entreprise cite des jouets d’éveil « Montessori » en bois, des jeux surdimensionnés ou à stabilité renforcée, ou des poupées « empathie » – qui donnent l’impression de tenir un vrai bébé dans les bras. Wesco vend bien les cubes à empiler ARCHIBloc ainsi que les piscines (en mousse) à balles ou les petites poupées en tissu Emoteam et Sweety, qui reproduisent des expressions faciales et aident les enfants à communiquer.
Les 59 enfants accueillis à l’EEAP (établissement pour enfants et adolescents en situation de polyhandicap) Coste-Rousse, à Prades-le-Lez (Hérault), apprécient tous ces jeux, « surtout ceux issus des méthodes Montessori, qui peuvent être manipulés et favorisent l’apprentissage avec de grosses lettres ou de gros chiffres », précise Pascal Ségault, chef de service. Lequel veille à ce que les jouets ne soient pas munis de pièces qui puissent être ingérées, et qu’ils soient résistants à l’humidité. « Les jeunes de l’établissement souffrant de troubles du spectre autistique ont un attrait pour le musical et le sensoriel. Ils aiment donc particulièrement les jeux sonores avec des lumières et un rapport de cause à effet », ajoute-t-il. Trains électriques et voitures téléguidées classiques sont trop compliqués à manipuler pour les résidents en fauteuil, mais il existe sur le marché des contacteurs avec de gros boutons marche/arrêt ou même à reconnaissance vocale. Et puis, vivant avec leur temps, les jeunes s’intéressent de plus en plus aux jeux vidéo et aux applications sur tablette. « Nous avons même développé un “serious game” à visée thérapeutique avec la société Natural Pad », s’enorgueillit Pascal Segault.
« Les jeunes handicapés ne doivent pas seulement être dans l’apprentissage, mais aussi dans la détente, insiste Laurent Thomas, directeur de la fédération Loisirs Pluriel, qui regroupe 22 lieux d’accueil pour des enfants handicapés et valides de 3 à 13 ans. Ce qui doit compter avant tout, ce sont les centres d’intérêt des petits. Nous nous appuyons sur leurs capacités : ceux qui ne savent pas lire peuvent peut-être reconnaître des animaux – on leur propose des dominos avec des images ou le jeu de cartes Bata-waf, qui ressemble à la bataille, avec un code couleur à la place des chiffres. On peut aussi adapter les jeux classiques : transformer un jeu des 7 familles avec des photos des enfants accueillis et des travailleurs sociaux. Attention ! On plastifie toujours les cartes, car ils risquent de mettre à la bouche… Autres adaptations : on aimante les pièces d’un Kapla pour qu’elles ne tombent pas ; on pose du Velcro sur les pièces des petits chevaux, etc. Les enfants accueillis jouent aussi au Puissance 4, mais en bois et grandeur nature. Je tiens aussi à souligner l’intérêt des jeux qui ont plusieurs fonctions, comme les peluches interactives (du type Furby) : l’enfant avec un handicap s’en servira pour certaines fonctions, l’enfant valide pour d’autres. »