Ni un consultant ni un manager en intérim, le directeur de transition est un professionnel expérimenté qui prend la tête d’un établissement le temps de répondre à une crise. « Son regard distancié doit permettre d’apaiser une situation ou, en tout cas, de trouver des clés de lecture différentes », précise Nicolas Martin, gérant de Direct Transition, qui place des directeurs en mission.
A l’Afipeaim, association iséroise qui compte 25 établissements pour les enfants et adultes handicapés intellectuels, on a fait appel à Direct Transition à quatre reprises depuis 2015. « Notamment pour un établissement qui a connu pendant plusieurs mois de fortes tensions entre les équipes, qui se sont soldées par le départ du directeur en poste, relate Fabrice Lançon, directeur des établissements et services à financement ARS. Nous avons fait le choix d’avoir recours à un expert pour assurer la gestion quotidienne, faire un diagnostic de la crise et proposer un plan d’action permettant de revenir à la sérénité. Cela a donné du souffle à la direction générale, qui a pu prendre le temps de recruter sereinement un nouveau directeur titulaire. » Selon lui, l’intérêt de la transition est qu’elle permet « d’aller droit au but, là où un manager qui s’installe pour plusieurs années consacre une partie de son énergie à des jeux d’alliance ». Avant d’ajouter : « Intervenant pour une durée déterminée, le directeur de transition se met beaucoup plus vite et plus librement sur les vrais sujets. C’est bien la question du rapport au temps qui fait la richesse de la transition. » Directrice du pôle sanitaire, médico-social et associatif de MCG Manager, autre prestataire du secteur, Martine Pin complète : « Les managers que nous positionnons ne sont pas les salariés du client, mais ceux du cabinet, ce qui leur donne une position d’extériorité qui va favoriser la résolution de problèmes. »
Encore peu pratiqué dans le secteur social et médico-social – « notre secteur a des attitudes conservatrices et apprécie peu l’intervention d’un tiers extérieur », décode Fabrice Lançon –, le management de transition demande à être connu… et anticipé. Pour que la mission réussisse, il est un principe auquel il ne faut pas déroger : la transparence. « Il faut que l’association soit capable de montrer le cadavre caché dans le placard !, souligne Nicolas Martin. Si on ne partage qu’une partie de l’information, c’est qu’on n’a pas compris à quoi sert le manager de transition. » Et Martine Pin d’ajouter : « Connaître le contexte d’intervention exact nous permet de déterminer quelle personne sera la mieux armée pour faire face à la situation. C’est plutôt la découverte en cours de route d’une situation dégradée qui peut nous mettre à mal. » Autre conseil : ne pas tarder. « Quand on s’entête dans une situation de crise, c’est d’autant plus difficile pour le manager de transition d’apporter des réformes », confirment les cabinets de placement. Enfin, il est important de calibrer la durée de la mission dès la signature du contrat. Une période de six à huit mois semble nécessaire et suffisante pour que le professionnel ait un impact sur la situation pour laquelle il a été appelé. Les prestataires insistent aussi sur le fait que les clients peuvent revenir vers eux en cours de mission si le manager de transition n’a pas la bonne attitude. « En tant qu’encadrants, nous pouvons réagir rapidement, pointe Martine Pin, soit en venant en support du manager de transition, soit, cas plus rare, en proposant un candidat de remplacement. »
Des associations hésitent à faire appel à cette pratique du fait de son coût. Mais Fabrice Lançon rappelle : « Ce qui est cher, ce n’est pas la transition, c’est la crise ! »
Jean-Eric Léger entame sa troisième « mission de sauvetage » par le biais de MCG Manager. A 58 ans, il possède un long parcours de direction et de direction générale dans le champ de la protection de l’enfance. Ayant soif d’indépendance, il a décidé voilà deux ans de devenir manager de transition. « Mobile et disponible, je suis souvent intervenu sur des situations complexes et j’aime le challenge. Mon expérience, c’est mon outil de travail, même si je rencontre des situations nouvelles. » Il explique : « Les établissements que l’on me confie ont besoin d’être immédiatement pilotés, voire restructurés de fond en comble. Je dois donc manœuvrer efficacement sur des temps très courts, sachant que, si parfois nous sommes accueillis avec soulagement par les équipes, d’autres fois, au contraire, elles nous considèrent comme des liquidateurs. A moi d’expliquer que je suis là pour trouver des issues de sortie vers le haut… Et d’y parvenir ! »