Lancer une « dynamique d’innovation en matière de perte d’autonomie pour les années à venir ». Tel est l’objectif affiché par la caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) à l’issue de son conseil d’administration du 7 septembre, via notamment la publication d’un rapport intitulé De la silver économie à la silver autonomie(1). Avec cet ouvrage, elle entend « inciter les acteurs de la “silver économie” à développer des innovations numériques et technologiques en faveur du “bien vieillir” de tous les retraités et du maintien de l’autonomie des plus fragilisés ». Une démarche qui s’inscrit dans le cadre de la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement(2). Toutefois, précise la caisse, « il ne s’agit pas de remplacer les mécanismes d’intervention traditionnels en faveur de l’autonomie par un recours déshumanisé à des outils et/ou nouvelles technologies mais bien de mobiliser ces innovations pour renforcer la prévention de la perte d’autonomie et proposer des réponses plus complètes face aux besoins immenses des retraités fragilisés par leur avancée en âge et/ou par les événements qu’ils peuvent être conduits à subir (hospitalisation, veuvage, précarité, isolement, etc.) ».
Et l’enjeu est important, souligne la CNAV : les aides techniques concernent à 82 % les personnes les plus dépendantes, c’est-à-dire celles en groupe iso-ressources (GIR) 1 et 2, à 73 % celles en GIR 3 et 4 (autonomes mais ayant besoin d’une aide ponctuelle), et à 16 % celles en GIR 5 et 6 (les plus autonomes). En outre, poursuit-elle, la France est « cantonnée à un développement des aides techniques qualitativement dans le champ de la dépendance ». « La marge d’évolution vers un déploiement plus fort des aides techniques dédiées à la prévention de la perte d’autonomie est donc forte. » D’ailleurs, selon elle, « le principal besoin identifié est la sécurisation des interventions à domicile comprenant la coordination et l’approche pluridisciplinaire des acteurs, le repérage des risques et des fragilités (avec son corollaire, l’alerte), la traçabilité des actions de prévention, la mutualisation des données sociales et médicales par la consolidation au sein d’un guichet unique du groupement d’associations et enfin l’information des aidants ». Aussi la CNAV estime-t-elle, en particulier, que les acteurs de l’aide à domicile et les évaluateurs de besoin à domicile ont tout intérêt à « se saisir de ces nouvelles possibilités » car elles permettraient notamment d’organiser entre eux le dialogue, qui doit être constant.
Pour sa part, la CNAV a financé, en 2015 et 2016, 63 projets d’innovation technique à hauteur de 6,5 millions d’euros(3). Et c’est sur cette base qu’elle va « définir une doctrine d’action ». Quelles actions entend-elle mettre en œuvre ? Par exemple, lancer une étude auprès des personnes âgées pour connaître leurs modes de vie et leurs attentes en matière d’aides techniques, évaluer les projets d’innovation qu’elle soutient, accompagner les professionnels du secteur dans l’utilisation et la préconisation des aides techniques… La CNAV va aussi « réformer le kit prévention [4] dans son financement et dans son usage pour intégrer des aides techniques nouvelles » car, « malgré son succès, il présente l’inconvénient de ne viser que quelques types d’aides et de ne pas réussir à solvabiliser suffisamment le retraité pour l’acquisition de dispositifs innovants qui pourraient être plus coûteux. De plus, le montant alloué, s’il permet l’installation, ne permet pas d’accompagner le retraité dans l’usage de l’aide technique. »
Se pose enfin la question du coût des aides techniques innovantes car elles pourraient être « plus chères que les traditionnelles », admet la caisse, qui entend mener une « action spécifique » afin d’en diminuer le coût. Une prise en charge individuelle pourrait être envisagée mais « des modes innovants de solvabilisation doivent [aussi] être trouvés, comme le micro-crédit à taux zéro, la pratique de l’économie circulaire, les achats groupés ou encore la location », insiste-t-elle, soulignant qu’il conviendra aussi d’envisager un « meilleur accompagnement financier des porteurs de projets permettant une meilleure maîtrise des coûts ».
(1) Rapport disponible sur
(2) Les conférences départementales des financeurs doivent en effet diffuser les aides techniques plus largement auprès des personnes âgées – Voir ASH n° 2952 du 18-03-16, p. 49.
(3) Ces projets concernent à 30 % la prévention à domicile, à 24 % l’aide aux aidants, à 19 % l’isolement des personnes âgées, à 10 % l’adaptation du logement et la mobilité des intéressés et à 6 % les lieux de vie collectifs.
(4) Le kit prévention de la CNAV permet de financer, pour un montant de 100, 200 ou 300 €, l’acquisition et l’équipement d’une ou de plusieurs aides techniques.