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L’Observatoire national de la protection de l’enfance analyse le déploiement du projet pour l’enfant

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« Le projet pour l’enfant (PPE) met en lumière une problématique générale de la protection de l’enfance : celle de l’articulation de différents dispositifs, de la mobilisation d’acteurs de champs différents et des responsabilités respectives en termes de garantie de parcours », écrit l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE) – anciennement Observatoire national de l’enfance en danger – dans un récent rapport intitulé « Le PPE : état des lieux, enjeux organisationnels et pratiques »(1). Ce document se penche sur le déploiement national du PPE depuis l’adoption de la loi du 5 mars 2007 et avance une dizaine de préconisations qui permettraient de faciliter son développement.

Les auteurs indiquent que leur étude s’est enrichie des débats parlementaires, rapports et conclusions des groupes préparatoires à la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant qui renforce le PPE, permet de préciser son périmètre et prévoit que son contenu sera fixé par un référentiel approuvé par décret(2). La loi énonce ainsi qu’« un PPE est établi pour chaque mineur bénéficiant d’une prestation (hors aides financières) ou d’une mesure de protection judiciaire et qu’il est “unique” tout au long du parcours de l’enfant », rappelle l’ONPE. Pour autant, le dispositif en ressort plus complexe, selon l’observatoire, qui s’interroge sur la multiplication d’outils qui se superposent et le manque de lisibilité qui en découle, d’autant que si le contenu du PPE doit être précisé par décret, sa forme n’a pas vraiment été arrêtée.

Mise en place plus ou moins partielle

La mise en place du PPE a permis de questionner « les organisations et les pratiques en protection de l’enfance », constatent les auteurs du rapport. Le PPE est généralement perçu comme un outil qui devrait permettre « d’accéder au travail collectif grâce à une évolution des pratiques des agents de terrain les plus proches des enfants et de leurs parents ». Mais il a connu des fortunes diverses, comme l’avait déjà souligné le défenseur des droits en 2015(3). Ainsi, sur les 89 départements ayant répondu au questionnaire de l’ONPE, 83 l’ont mis en place, de façons différentes et plus ou moins partielles : le document est en cours de rédaction dans 10 départements, en cours de déploiement dans 32 autres et mis en place de façon effective dans 41. Dans les départements où il a été déployé, il l’a été en moyenne cinq ans après la loi de 2007 « à des niveaux variables selon les modes de prise en charge et d’accompagnement ».

Dynamiques locales

L’ONPE décrit la façon dont les acteurs de terrain se sont emparés de cet outil. Sa « formalisation a […] été pour une large part le produit de sa dynamique d’adaptation aux organisations spécifiques et variées des services départementaux de la protection de l’enfance », note-t-il. La majorité des départements qui ont participé à l’étude ont eu recours à la constitution de groupes de travail, au périmètre plus ou moins large. Si cette méthode « permet de faire cohabiter autour d’un même objectif différents groupes d’acteurs », elle ne garantit toutefois « pas mécaniquement une conception et surtout un déploiement aisé de l’outil PPE », relèvent les auteurs. Pour rendre la tâche plus « efficace et la moins conflictuelle possible », ils suggèrent donc plutôt de mettre en œuvre une « démarche projet complète » avec, d’une part, un « groupe projet composé des personnels de direction, de cadres et de professionnels de terrain de l’ASE, des usagers et des partenaires » et, d’autre part, « la déclinaison par phases des différents objectifs du projet » (concertation, rédaction, déploiement test, suivi). Les conditions dans lesquelles a lieu l’expérimentation du PPE doivent en outre pouvoir s’appuyer sur un « portage fort », notamment par les élus chargés de la protection de l’enfance dans le département « afin d’adapter au mieux cette démarche aux particularités et aux enjeux locaux ».

L’élaboration du PPE a aussi permis d’interroger l’organisation et les missions de certaines directions « enfance-famille » des conseils départementaux. Cette dynamique s’est ainsi heurtée à un certain nombre de problématiques locales. La plupart des services ont dû, par exemple, trancher la question de savoir qui, du cadre technique de l’ASE ou du référent socio-éducatif des parents et/ou de l’enfant, devait être le garant ou l’animateur de cette démarche. La question du « continuum » d’intervention globale, qui doit éviter toute rupture dans l’accompagnement, a également émergé. Et les services qui ont déployé le PPE se sont aussi posé la question de la formalisation de l’écrit. Il semble qu’une grande latitude existe encore. « Un nouvel effort de réflexion collective » est nécessaire, insiste le rapport, « notamment sur la manière dont l’enfant et les parents peuvent être impliqués et sur les conditions de transmission à l’ensemble des professionnels qui s’impliquent autour de l’enfant ». L’ONPE constate que la voix des parents est encore difficilement audible quand la participation de l’enfant à la construction et à la rédaction de son PPE semble tout aussi problématique. Pourtant, « accepter [sa participation], permettre et favoriser son expression, c’est lui reconnaître un rôle d’acteur de son devenir ».

Enjeux du PPE

Les auteurs de l’étude soulignent par ailleurs l’un des enjeux primordiaux du PPE : « réussir à faire évoluer l’environnement de la protection de l’enfance pour recentrer les interventions partenariales autour des besoins de l’enfant ». Selon eux, le projet pour l’enfant doit permettre de répondre à ses besoins fondamentaux, mais aussi guider et apporter un éclairage quand il s’agit de prendre des décisions dans un contexte difficile avec de nombreux intervenants, sans jamais oublier les « difficultés éprouvées par l’enfant ». Ils dénoncent le fait que « le travail partenarial avec les institutions concourant à la protection de l’enfance [soit] dépendant des relations interpersonnelles entretenues par des représentants de ces différentes institutions et souffre d’un déficit d’institutionnalisation ».

L’ONPE préconise enfin de respecter les droits des familles en favorisant leur accompagnement dans les relations avec l’ASE. Le rapport rappelle l’insuffisante clarification du cadre et de la nature juridique du PPE qui « renforce l’insécurité dans laquelle se trouvent tant les familles que les professionnels ». Et propose d’instaurer des démarches et des outils d’application pratique dans le cadre des procédures administratives en protection de l’enfance. Il conviendrait, par exemple, « d’inscrire un délai de réalisation du PPE après la décision de mesure ou prestation »,un délai de trois mois semblant être la pratique la plus courante. L’observatoire souhaite également engager une réflexion spécifique « sur la difficulté de bien identifier les règles de transmission des documents et des informations ». Enfin, sur le plan des pratiques d’intervention, les auteurs proposent de « réaffirmer et mettre en pratique les règles éthiques » pour l’élaboration du PPE et de « définir précisément l’organisation départementale nécessaire à [son] implantation ».

Notes

(1) Disponible sur www.onpe.gouv.fr.

(2) Voir ASH n° 2970-2971 du 22-07-16, p. 49.

(3) Voir ASH n° 2908 du 1-05-15, p. 9 et n° 2914 du 12-06-15, p. 15.

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