La loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, adoptée à l’issue de cinq mois de polémiques politiques et de contestation sociale émaillée de violences, a été promulguée le 8 août. Ce texte vise à donner « plus de souplesse et de visibilité pour les entreprises [et] plus de protections pour les actifs et en particulier ceux en situation de précarité », affirme le ministère du Travail. Et ce, afin de « construire un monde du travail en phase avec les parcours professionnels actuels et créateur d’emplois durables », ajoute-t-il. Le point sur quelques-unes des mesures de ce texte, dont la quasi-totalité a été validée par le Conseil constitutionnel dans une décision du 4 août (voir encadré).
A compter de 2017, le compte personnel d’activité (CPA), créé par la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi(1), regroupera le compte personnel de formation (CPF), le compte personnel de prévention de la pénibilité et le compte engagement citoyen que crée également la loi. Ce compte engagement citoyen devra recenser les activités bénévoles ou de volontariat de son titulaire et permettre d’acquérir des heures inscrites sur le CPF à raison de l’exercice de ces activités et des jours de congés destinés à l’exercice de ces activités, indique la loi. L’objectif du CPA est de renforcer, par l’utilisation des droits qui y sont inscrits, l’autonomie et la liberté d’action de son titulaire et de sécuriser son parcours professionnel, en levant les freins à la mobilité. Il contribuera, selon le texte, au droit à la qualification professionnelle et favorisera l’engagement citoyen.
Le CPA sera ouvert à toute personne âgée d’au moins 16 ans occupant un emploi, à la recherche d’un emploi ou accueillie dans un établissement et service d’aide par le travail, ainsi qu’aux retraités.
La loi consacre un parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie conclu entre l’Etat et les jeunes en situation de grande précarité. Afin de favoriser son insertion professionnelle, le jeune qui s’engagera dans ce parcours pourra bénéficier d’une allocation versée par l’Etat et modulable en fonction de la situation de l’intéressé. La garantie jeunes deviendrait une modalité spécifique de ce parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie. Expérimentée depuis 2013, la garantie jeunes offre, pour mémoire, à des jeunes âgés de 18 à 25 ans sans emploi ni formation un accompagnement renforcé vers l’emploi, des périodes de mise en situation en entreprise et une allocation mensuelle(2). La loi ouvre le bénéfice de la garantie jeunes à tous les jeunes remplissant les conditions d’éligibilité et s’engageant à respecter le parcours contractualisé, à compter du 1er janvier 2017.
La loi crée une aide à la recherche du premier emploi, dont les textes d’application viennent de paraître (voir ce numéro, page 52). Cette aide est destinée aux jeunes de moins de 28 ans diplômés depuis moins de quatre mois et à la recherche d’un travail. Les jeunes qui étaient boursiers pendant leurs études pourront demander la prolongation de leur bourse, après avoir décroché leur diplôme et en attendant de trouver un emploi, pendant quatre mois au maximum.
La loi institue un dispositif d’emploi accompagné pour les personnes handicapées nécessitant un accompagnement médico-social pour s’insérer durablement dans le marché du travail, en particulier les travailleurs handicapés accueillis dans un établissement ou service d’aide par le travail et ayant un projet d’insertion en milieu ordinaire de travail. Une avancée saluée par les associations (voir ce numéro, page 15). Cette mesure doit permettre aux travailleurs handicapés d’accéder et de se maintenir dans l’emploi rémunéré. Mis en œuvre par une personne morale gestionnaire qui doit respecter les conditions d’un cahier des charges qui sera fixé par décret, ce dispositif peut être sollicité tout au long du parcours professionnel par le travailleur handicapé et, lorsque celui-ci occupe un emploi, par l’employeur.
Par ailleurs, la loi étend le droit à la prime d’activité aux travailleurs handicapés à partir du 1er octobre 2016 (sauf pour les titulaires de l’allocation aux adultes handicapés qui en bénéficient à titre rétroactif au 1er janvier 2016).
La loi crée une commission chargée de proposer au gouvernement d’ici à deux ans une refondation du code du travail. Le Haut Conseil du dialogue social y sera associé.
Le texte apporte aussi plus de souplesse aux entreprises pour adapter le temps de travail, de repos et de congés aux variations de l’activité de l’entreprise. Dans ces domaines, les accords d’entreprise pourront prévaloir sur les accords de branche.
En outre, la validité d’un accord d’entreprise ou d’établissement devra être subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles, au lieu d’au moins 30 % des suffrages exprimés. En l’absence de majorité, une ou plusieurs organisations syndicales ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés pourront demander l’organisation d’un référendum d’entreprise pour valider l’accord.
Sur les 123 articles que contient la loi « travail », le Conseil constitutionnel a censuré cinq mesures. Deux sur le fond, invalidées partiellement et consacrées au dialogue social dans les entreprises franchisées et aux locaux syndicaux, et trois sur la forme qui portent sur :
• la modification des règles d’utilisation des ressources du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels ;
• la pérennisation au-delà du 31 décembre 2016 de la mise en place du chèque-santé par décision unilatérale de l’employeur ;
• la possibilité pour certaines entreprises de moins de 50 salariés de déduire de leurs résultats imposables une somme correspondant aux indemnités susceptibles d’être ultérieurement dues à leurs salariés pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le Conseil constitutionnel précise en outre ne pas avoir examiné les autres articles de la loi dont il n’avait pas été saisi, et qui pourront donc, le cas échéant, « faire l’objet de questions prioritaires de constitutionnalité ».