Répondant aux interrogations du tribunal administratif de Melun, le Conseil d’Etat a, dans un avis publié au Journal officiel, apporté des précisions sur les modalités et les conséquences du refus d’une offre de logement par un demandeur reconnu prioritaire au titre du droit au logement opposable (DALO).
Point de départ de l’affaire sur laquelle le tribunal réclamait les lumières des sages : le refus, de la part d’une personne dont la demande de logement social avait été reconnue prioritaire et urgente par la commission de médiation du Val-de-Marne, d’accepter le logement proposé par la préfecture, sans raison valable aux yeux de l’administration. Le préfet du département avait donc envoyé à l’intéressé un courrier lui indiquant que, en conséquence, il perdait le bénéfice de la décision de la commission. C’est cette lettre – visée par un recours du demandeur – qui est l’objet des questions du tribunal administratif.
Première question : la lettre du préfet prononçant la perte du bénéfice de la décision de la commission de médiation est-elle une décision faisant grief à son destinataire, et si oui est-elle susceptible d’ouvrir droit à un recours pour excès de pouvoir ? Le Conseil d’Etat répond par la négative. Le demandeur reconnu comme prioritaire par une décision de la commission de médiation peut perdre le bénéfice de cette décision s’il refuse, sans motif impérieux, une offre de logement ou d’hébergement correspondant à ses besoins et à ses capacités, rappelle-t-il. Or lorsque le préfet fait savoir au demandeur que le refus d’une offre de logement ou d’hébergement lui a fait perdre le bénéfice de la décision de la commission, « il doit être regardé comme informant l’intéresséqu’il estime avoir exécuté cette décision » et considéré comme désormais « délié de l’obligation d’assurer son logement ou son hébergement ». Ainsi, le demandeur qui reçoit une telle information ne peut saisir le tribunal administratif d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision du préfet.
Le « recours spécial » prévu à l’article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l’habitation – qui permet au demandeur reconnu prioritaire de demander en justice son logement ou son relogement – est « la seule voie de droit ouverte devant la juridiction administrative afin d’obtenir l’exécution d’une décision de la commission de médiation ». Saisi dans ce cadre, le juge administratif a toute latitude pour examiner si le refus par le demandeur d’une offre de logement qui lui a été faite lui fait perdre le bénéfice de la décision de la commission de médiation.
Autre question : l’information du demandeur de logement social selon laquelle le refus d’acceptation d’une offre de logement adaptée pourrait lui faire perdre le bénéfice de la décision de la commission de médiation le reconnaissant prioritaire peut-elle être donnée par le préfet lorsque celui-ci lui notifie une proposition de logement ou doit-elle l’être uniquement par le bailleur social (comme prévu par plusieurs articles du code de la construction et de l’habitation) ? Réponse de la Haute Juridiction administrative : elle peut être donnée par les deux. Ce qui est important, c’est que le demandeur ait reçu de manière complète l’information lors de la présentation d’une offre de logement. A partir du moment où le demandeur a reçu de manière complète cette information, « un refus de sa part est susceptible de lui faire perdre le bénéfice de la décision de la commission, même si l’information a été dispensée par le préfet », indique le Conseil d’Etat.