La directrice de l’EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) public Résidence des Loriettes, à Martigné-Ferchaud (Ille-et-Vilaine), garde toujours la porte de son bureau ouverte. « C’est important pour moi d’être accessible, d’inviter l’équipe à venir me parler », affirme Morgan Duigou, 39 ans, en poste depuis six ans. La structure qu’elle dirige compte 64 résidents pour 39,6 salariés en équivalents temps plein. « J’ai toujours aimé la gestion de groupe : impulser, donner des idées et en constater la répercussion jusqu’aux résidents. Ici, je souhaite que les professionnels aient la satisfaction d’offrir une dernière belle étape de vie aux personnes âgées. »
Un état d’esprit non sans lien avec son parcours : diplômée éducatrice spécialisée à 24 ans, elle commence à travailler auprès de l’enfance en danger. « C’était passionnant, mais dur, du fait du manque de reconnaissance comparé à l’énergie investie », explique-t-elle. Ce ressenti d’alors influence son management actuel. « J’ai du respect pour mes équipes : je sais que si elles n’obtiennent pas de reconnaissance de la société, il leur en faut de leur chef », fait-elle valoir. Elle a ainsi l’habitude de leur dire merci et d’écouter leur avis, avant de décider. D’un long séjour sur l’île de La Réunion, Morgan Duigou garde l’idée que le métissage est une force : « On a tous une identité différente. Pour que cela fonctionne dans une équipe, il faut prendre en compte qui est l’autre, et pas seulement qui l’on est soi-même. » Elle valorise aussi ses collaborateurs à l’extérieur. « Hors de question de m’en plaindre ! Aux élus et aux familles, je tiens le même discours : les professionnels de l’EHPAD ont des connaissances, des compétences et de l’expérience », insiste-t-elle.
Son besoin de connaître chaque résident vient peut-être aussi de son passé de travailleuse sociale. « Je peux plus facilement émettre une décision sur un accompagnement ou prendre le relais de l’équipe en cas de situation difficile si je suis familière avec la personne », explique celle qui s’est tournée vers le secteur des personnes âgées au lendemain de la canicule de 2003. « Avec des moyens accrus, tout était à développer en termes de projet d’établissement. »
Morgan Duigou achève alors une licence en sciences de l’éducation : « C’est dans ma culture : une vie professionnelle est une constante évolution. Il faut toujours étudier pour acquérir de nouvelles compétences, s’enrichir. » Elle se forme ensuite pour obtenir le titre de ReOS (responsable d’établissements et organismes sociaux) auprès de l’organisme de formation Askoria. Et aujourd’hui, elle développe également une politique de formation dans son propre établissement : « Tout le monde a été formé au projet personnalisé et à l’accompagnement humaniste », pointe-t-elle. La directrice est fière, par ailleurs, que trois assistantes de soins en gérontologie aient récemment obtenu leur diplôme d’aide médico-psychologique.
Morgan Duigou communique beaucoup avec son équipe, par des notes de service affichées et par l’intranet. Et, de manière informelle, lors du déjeuner, qu’elle partage avec les professionnels. Le management par abus d’autorité lui est insupportable. « Même si je sais que ma franchise, à l’oral, me rend un peu “brut de pomme”… » C’est pourquoi elle associe beaucoup à ses réflexions Véronique Blondeau, la psychologue, à mi-temps dans la structure : « Son regard me permet d’avoir une vision plus globale des situations et de trouver des portes d’accès pour mieux communiquer avec les membres du personnel. Je me sens aussi moins isolée. »
Véronique Blondeau juge le management de Morgan Duigou « humain et en proximité » : « Elle réussit à faire accepter beaucoup de changements à l’équipe, parce qu’elle les explique et qu’elle est empathique. » Côté dynamisme, en revanche, « elle est parfois difficile à suivre… », sourit la psychologue. Après le renouvellement de la convention tripartite, la rédaction du projet d’établissement, l’évaluation interne et externe, la directrice gère maintenant des travaux d’envergure (agrandissement et réhabilitation des locaux) qui s’étaleront sur trente mois. Avec une validation des acquis de l’expérience sur le feu pour obtenir un diplôme de niveau I ainsi que deux enfants en bas âge, Morgan Duigou fait partie de ces managers que l’ennui ne guette guère.