L’instauration de la dégressivité des aides personnelles au logement (APL), prévue par la loi de finances pour 2016 et effective depuis la publication, le 7 juillet, du décret d’application de la mesure (voir ce numéro, page 46), équivaut à « une double peine » pour les ménages, dénonce la Fondation Abbé-Pierre. Le gouvernement « fait payer aux locataires l’incapacité des pouvoirs publics à maîtriser et faire baisser les loyers du parc privé depuis la hausse des années 2000 », estime-t-elle. Ce en dépit des avertissements du secteur associatif et de « l’opposition unanime du Conseil national de l’habitat le 6 juin dernier ».
Selon les textes, le montant de la prestation est progressivement diminué lorsque le loyer dépasse un premier plafond, jusqu’à devenir nulle à partir d’un deuxième plafond. Alors que la Confédération nationale du logement estime que cette mesure fera « perdre des aides au logement à plus de 80 000 familles », la Fondation Abbé-Pierre évalue, pour la seule ville de Paris, à plus de 4 500 le nombre de ménages perdants. Parmi eux, « 2 800 verraient leur allocation diminuée et 1 800 perdraient entièrement leurs aides au logement ». Et « plus de 400 de ces victimes sont aujourd’hui allocataires du RSA [revenu de solidarité active] ». Dans le Rhône, « les ménages touchés seraient près de 3 000 ».
Autre preuve que la mesure n’épargne pas les personnes fragilisées, « parmi les ménages accompagnés au quotidien par l’Espace solidarité habitat de la Fondation Abbé-Pierre, implanté à Paris, une quarantaine seraient touchés, soit un ménage sur 20, quasi exclusivement des personnes seules. Plus de la moitié sont aux minima sociaux, 15 % sont retraités et 24 % salariés. La surface de leur logement est de 44 m2 », témoigne la fondation. Elle interpelle en conséquence le gouvernement sur « les difficultés sociales que ce décret va engendrer ».