Rien ne résiste à Romica, et surtout pas Valérie Rodrigue. Journaliste, ancienne « sous-chef dans un magalogue, un magazine catalogue sans contenus à part des produits et des cadeaux sous blister », Valérie Rodrigue n’a « pas toujours mis de l’argent dans les gobelets ». « Je suis souvent passée sans les voir », reconnaît-elle. Jusqu’à sa rencontre avec Romica, ses « cheveux de colère », son regard fermé et sa fille de 18 mois, Sara-Maria, assises dans le froid devant le bureau de La Poste. Depuis quelque temps, écœurée par la stigmatisation dont souffrent les Roms, la Française bien installée intervient dans un camp comme bénévole. Spontanément, elle propose son aide à la jeune femme. Le début d’une grande amitié, et surtout d’un accompagnement rapproché qui va durer plusieurs années. Habituée à une « vie dorée », Valérie Rodrigue découvre la misère du bidonville, les exigences de la survie et le rejet millénaire des Roms, où qu’ils aillent, quoi qu’ils fassent. Elle qui déteste la paperasse se retrouve à constituer des dossiers, à faire la queue à la préfecture, à parlementer avec des fonctionnaires plus ou moins bien disposés. « Elle avait des droits, Romica, écrit-elle, pas nombreux, mais je ne voyais pas pourquoi elle ne les ferait pas valoir. » D’abord méfiante, la jeune femme se laisse peu à peu apprivoiser. Et retrouve, une procédure après l’autre, l’espoir d’une vie nouvelle – acheter une voiture, payer avec des cartes de crédit, devenir palefrenière ou femme de ménage, parce que « mendiante, c’est pas un métier ». Grâce au talent de conteuse de Valérie Rodrigue, le lecteur assiste à la métamorphose de la jeune femme, pleine de doutes mais obstinée, partagée entre sa communauté et son envie de se fondre dans le décor. Une histoire de solidarité évidente, motivée par cette seule considération : « Il faut pouvoir se regarder dans la glace sans avoir honte de soi. »
Rien ne résiste à Romica
Valérie Rodrigue – Ed. Plein Jour – 17 €