« Ecoute, toi, écoute-moi bien. Tu es déjà dans mon sang, mais il ne faut pas me nuire. Tu restes à ta place, je reste à la mienne. » Atteinte du VIH, Madame Z. B. raconte, dans Derrière les maux, la vie, comment elle a appris à « traiter » avec sa maladie, à lui donner corps pour mieux l’apprivoiser, pour mieux la maintenir à distance. Comme elle, huit autres résidents d’appartements de coordination thérapeutique de l’association Cordia ont accepté de se confier à la journaliste Bérénice Geoffray, de lui parler de leur vie qui a basculé avec l’annonce de la maladie. Une de ces maladies chroniques et invalidantes, auxquelles s’ajoutent les violences d’une vie précaire faite de chambres d’hôtel ou de nuits dans des centres d’hébergement et de réinsertion sociale. Une de ces maladies qui vous « dépossèdent » de ce que vous avez été jusqu’ici et qui obligent à renoncer à certains projets, à affronter les regards des autres sur un corps que l’on ne reconnaît plus soi-même. Madame Z. B., Maxence, Yaye, Luc, Djucu et les autres racontent aussi cette vie qui recommence, autrement, avec le soutien de l’équipe pluridisciplinaire de l’association, dans cet appartement qui permet de se poser et d’entamer une lente reconstruction. Au-delà de l’apparente banalité du quotidien, il émerge peu à peu de ces récits de vie une force et une profondeur qui font mouche. On y entend la révolte de Jolie contre sa leucémie et les effets dévastateurs de la chimiothérapie, la peur et le déni face à un ennemi que l’on connaît mal ou encore l’extrême découragement qui fait envisager le pire. Mais aussi le désir qui revient et la vie qui reprend le dessus, avec l’aide du médecin, de l’infirmière, du psychologue ou du travailleur social. « Les participants de cette aventure, souligne Jean-Luc Cousineau, le directeur de Cordia, redeviennent sujets de leur vie passée, présente et future. Il s’agit de laisser une trace de leurs parcours pour que d’autres résidents trouvent plus facilement des réponses. » Des traces utiles à tous…
Derrière les maux, la vie
Bérénice Geoffray – Préface d’Emmanuel Hirsch – Fauves Editions – 17 €