La direction générale de la cohésion sociale (DGCS) vient d’adresser aux préfets la traditionnelle circulaire dans laquelle elle définit les modalités de la campagne budgétaire du secteur « accueil, hébergement et insertion » pour 2016. Avec, comme fils conducteurs, non seulement la poursuite du « développement de solutions pérennes et de qualité réorganisant la fluidité vers le logement », mais aussi l’organisation de la réponse, en termes d’hébergement d’urgence, aux engagements de la France d’accueillir des demandeurs d’asile en besoin manifeste de protection.
Comme de coutume, l’administration centrale présente les enjeux auxquels il faut répondre en priorité en 2016 :
→ la fin de la gestion saisonnière du dispositif d’hébergement d’urgence – qui est un des objectifs du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale –, qui passe par la pérennisation de places ;
→ l’inflexion de la courbe de progression des nuitées hôtelières ;
→ l’orientation vers le logement des publics sans domicile fixe (ce qui implique le développement d’une offre de logement ordinaire, social ou adapté) ;
→ la poursuite du déploiement de solutions d’hébergement dédiées aux femmes victimes de violences ;
→ le développement de mesures d’accompagnement social, « afin de sécuriser le parcours des personnes qui nécessitent un suivi personnalisé pour leur relogement ».
La DGCS insiste aussi sur la nécessité de créer des places d’hébergement et de logement pour les demandeurs d’asile, conformément aux engagements pris par la France dans le cadre du plan européen de relocalisation. « Le nombre de demandeurs relocalisés s’est avéré à ce jour inférieur aux prévisions mais une montée en charge est attendue », prévient l’administration, exhortant les préfets à poursuivre la captation de logements via la procédure prévue par la plateforme nationale pour le logement des réfugiés et bénéficiaires d’une protection internationale mise en place dans le cadre du « plan migrants »(1) et à attribuer ceux qui sont aujourd’hui mobilisés à des réfugiés actuellement hébergés en centres d’accueil pour demandeurs d’asile ou en hébergement d’urgence. L’instruction évoque encore les ouvertures de centres d’accueil et d’orientation (CAO), destinées à désengorger les camps de migrants. « Au 31 janvier 2016, indique la DGCS, 87 CAO étaient ouverts, accueillant environ 1 275 personnes ». Mais « de nouvelles recherches s’avèrent nécessaires pour poursuivre le desserrement de Calais ainsi que le camp de Grande-Synthe ». « Des enquêtes budgétaires seront à cet égard transmises régulièrement pour connaître les besoins de financement précis et assurer des affectations complémentaires lorsque les marges de gestion sur les BOP [budgets opérationnels de programme] seront insuffisantes. »
Enfin, la DGCS prévient les préfets que « l’utilisation des crédits dédiés au financement des places d’hébergement et de logement accompagné au bénéfice des demandeurs d’asile et réfugiés relocalisés en France au titre du dispositif européen sera élargie aux problématiques et prises en charge connexes résultant plus largement de l’accentuation des flux de migrants sur le territoire ». Des dotations complémentaires interviendront « prochainement » à cet effet.
Au total, un peu plus de 1,328 milliard d’euros dédiés à la politique d’hébergement et d’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées et regroupés dans le programme 177 du budget de l’Etat ont été notifiés aux préfets au titre de 2016. Une enveloppe en hausse de plus de 10 % (+ 147 millions d’euros) par rapport à celle de 2015, souligne l’administration centrale, « soit une hausse globale de plus de 25 % depuis 2012 ».
Ces crédits comprennent :
→ une enveloppe de base répartie selon une stratégie d’harmonisation des dotations régionales initiée depuis 2010 à partir de l’application de critères de convergence inchangés tenant, pour moitié, à l’offre d’accueil, d’hébergement et d’insertion et, pour l’autre moitié, à la demande de recours au dispositif d’hébergement et d’accès au logement appréciée par trois critères (bénéficiaires du revenu de solidarité active, demandeurs d’asile et personnes reconnues prioritaires par une commission « DALO ») ;
→ les crédits relatifs à l’expérimentation « Un chez-soi d’abord » alloués aux quatre régions expérimentatrices ;
→ l’intégration des 2 000 places hivernales pérennisées à la sortie de l’hiver 2014-2015 à la suite de l’annonce faite par la ministre du Logement le 24 mars dernier(2) ;
→ la pérennisation des moyens mis en œuvre dans le cadre du plan « pauvreté ».
Dans le détail, les crédits en matière de veille sociale sont en hausse de 2,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. « Cette progression doit permettre de faire face à l’augmentation des flux et à la prise en charge et l’orientation de publics spécifiques (femmes avec enfants et personnes à droits administratifs incomplets) », explique la DGCS, ajoutant que ces crédits ont aussi vocation à « poursuivre la consolidation des SIAO [services intégrés d’accueil et d’orientation], outils fondamentaux de coordination et d’observation sur les territoires, ainsi que la convergence vers une organisation commune à l’ensemble des départements, sous forme d’un SIAO unique intégrant le 115 ».
Les crédits relatifs aux dispositifs d’hébergement d’urgence augmentent, pour leur part, de 26 %. « Le dispositif d’hébergement généraliste, dans un contexte économique dégradé, doit en effet faire face à des flux migratoires difficilement maîtrisables et très sensibles à la conjoncture, à des besoins de prise en charge de familles avec des enfants en bas âge, qui exigent une adaptation du dispositif, ainsi qu’à l’augmentation de publics à situations administratives complexes (demande de titre de séjour en cours, déboutés de la demande d’asile ou de titre de séjour) », résume l’administration centrale, en précisant toutefois à l’adresse des préfets que, « pour autant, l’infléchissement de la progression des nuitées hôtelières conjuguée au développement d’alternatives d’hébergement et la recherche de réduction des écarts de coûts entre les structures d’hébergement d’urgence au sein d’une même région seront à rechercher ».
Les crédits dédiés aux centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) – qui représentent désormais 43 % du programme 177 –, sont quant à eux en hausse de 1,3 % « pour permettre la poursuite d’un mouvement de transformation de places d’hébergement d’urgence et de stabilisation antérieurement financées par voie de subventions ».
Enfin, en ce qui concerne le logement adapté, les crédits consacrés aux différentes formes de logement accompagné (maisons relais/pensions de famille, intermédiation locative, résidences sociales) sont en hausse sensible de 18 % en 2016 (+ 35,2 millions d’euros). « Ils permettront de garantir le financement des effets induits par le plan de résorption des nuitées hôtelières et prendront en compte l’impact du dispositif européen de relocalisation des demandeurs d’asile en besoin manifeste de protection », explique la direction générale de la cohésion sociale.
A noter : pour soutenir l’ensemble de ces dépenses, la DGCS appelle les préfets à poursuivre la modernisation des outils de pilotage et d’amélioration de la qualité des services offerts par les dispositifs d’hébergement et de logement autonome, évoquant à cet égard les diagnostics partagés à 360°, la mise en place du SIAO unique ou bien encore le déploiement de la démarche de l’étude nationale des coûts et des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens. Des éléments relatifs à la mise en œuvre de ces outils sont joints en annexe de l’instruction ainsi qu’un point d’étape sur leur niveau d’avancement respectif.