Au démarrage, quatre directeurs d’ESAT [établissements et services d’aide par le travail] se sont interrogés sur le parcours professionnel des travailleurs en ESAT et la valorisation de leurs compétences individuelles. C’était l’époque où l’on commençait à parler de la VAE [validation des acquis de l’expérience] et a germé l’idée d’un dispositif accessible à tous les travailleurs, quel que soit leur potentiel. En s’appuyant sur l’expertise des moniteurs d’ateliers, ces directeurs ont cherché, auprès des ministères de l’Education nationale et de l’Agriculture, des référentiels dans le droit commun de niveau CAP correspondant aux métiers exercés dans les ESAT. Ils ont ensuite travaillé sur ces référentiels pour les rendre accessibles aux travailleurs handicapés.
Des travailleurs d’établissements membres de l’un des 15 collectifs régionaux adhérents de Différent et Compétent Réseau(1). La personne est moteur de sa démarche : accompagnée par son encadrant, elle s’engage dans un parcours de reconnaissance de ses compétences. Elle pourra se positionner sur le référentiel du métier qu’elle exerce. Il y a ensuite trois modalités de reconnaissance différentes, adaptées aux capacités d’expression des candidats. La première modalité se déroule dans l’établissement : la personne, en situation de travail, montre ce qu’elle sait faire à des professionnels du monde de l’entreprise. La seconde est externe : le candidat va chez le valideur (lycée, Greta…), où il est reçu en entretien de valorisation de ses compétences. Il explique comment il exerce son activité professionnelle, aidé par l’encadrant au besoin. Dans le cadre de la troisième modalité, le travailleur réalise un stage en entreprise, qui viendra étayer sa capacité à transférer ses compétences lors de l’entretien de valorisation. Dans les deux derniers cas, les candidats ont travaillé sur un dossier de preuves assez proche du dossier VAE. La différence, ici, c’est qu’ils ne peuvent pas échouer car ils ne présentent que ce qu’ils savent réussir et que les valideurs sont là pour les mettre en confiance, reconnaître leur savoir-faire et valoriser leurs compétences, dont l’encadrant se porte garant. En revanche, les personnes ne se positionnent pas sur tout un diplôme. Du coup, chaque RAE [reconnaissance des acquis de l’expérience] est unique, l’attestation est liée à la liste exacte des compétences qui sont reconnues.
La personne n’est pas regardée à la lumière de son handicap, mais de son professionnalisme. C’est comme passer de simple exécutant à ouvrier de production. Le dispositif est un révélateur de potentiels, il répond à un besoin de reconnaître, de rendre visibles les compétences des personnes handicapées, de changer le regard, notamment des familles, qui sont conviées lors des cérémonies régionales organisées une fois par an. Par ailleurs, la reconnaissance du ministère de l’Agriculture ou de l’Education nationale est un gage de sérieux. Pour des jeunes d’IME par exemple, cela leur permet de présenter un portefeuille de compétences. La reconnaissance a également un effet levier et peut susciter des envies personnelles : passer son permis de conduire, déménager, aller voir un orthophoniste pour améliorer son élocution… Le jury peut aussi aider la personne à envisager l’étape d’après : une VAE ou une formation pour, par exemple, consolider les acquis. Cela oblige l’établissement à se mettre en mouvement pour satisfaire et accompagner le lauréat dans ses évolutions. Cette démarche développe l’empowerment du travailleur et du jeune en formation !
(1) Soit 560 établissements au total, principalement des ESAT, mais également des entreprises adaptées, des instituts médico-éducatifs et des entreprises d’insertion.