Elle est née de deux constats. Le premier est que les SIAE [structures d’insertion par l’activité économique] ont du mal à renforcer leurs liens avec les entreprises publiques et privées pour favoriser un accès plus rapide des salariés en insertion à l’emploi durable. Le second est que les petites et moyennes entreprises, qui ont du mal à recruter certains profils de poste, ont souvent besoin d’un accompagnement en ressources humaines. Nous avons donc voulu réinterroger la manière dont les SIAE travaillent et inverser la logique : au lieu d’être en position de demandeuses auprès des entreprises, comment peuvent-elles être repérées par elles comme des partenaires crédibles, en capacité de leur offrir des services ?
Nous avons d’abord recherché des financements auprès de la direction générale de la cohésion sociale, de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle et du Fonds social européen, qui ont décidé de soutenir la démarche, comme la Fondation de France. Nous avons, après un appel à projets, retenu trois régions – Centre-Val-de-Loire, Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées et Provence-Alpes-Côte d’azur. Un deuxième appel à candidatures dans ces régions a permis de retenir dix SIAE sur l’ensemble du territoire. Nous en sommes au démarrage : la première réunion du comité national s’est tenue le 24 mai, et des temps de formation vont avoir lieu au niveau régional et dans chaque structure. Cette démarche impliquant une stratégie d’association, un changement de pratiques et de métiers, l’ensemble des équipes doit être formé aux pratiques de recrutement, d’intégration au sein des entreprises et aux questions de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, afin que les SIAE puissent développer une offre de services en fonction de leur bassin d’emploi, de leur support d’activité et des profils de leurs salariés en insertion. La démarche n’étant pas descendante, cette formation surmesure va dépendre d’un état des lieux réalisé en amont par le groupe de formateurs sélectionné pour l’expérimentation.
Un chargé d’insertion professionnelle pourra travailler sur le volet social de l’accompagnement tout en ayant des outils dédiés pour faire du lien avec les entreprises, par exemple en proposant un service d’analyse gratuit des postes de travail. Les encadrants techniques, qui ont des relations commerciales avec les employeurs, pourront proposer de nouvelles formes de partenariat – des chantiers en commun ou de la sous-traitance. Une évaluation externe est prévue tout au long de l’expérimentation, l’objectif étant que les SIAE participant au projet deviennent autonomes au bout de 18 mois. Une autre phase de l’évaluation aura lieu un an après la fin des formations pour voir quels effets la démarche aura eus sur les structures, les salariés en insertion, les entreprises… A quelles conditions les SIAE peuvent-elles développer une stratégie de médiation pour rapprocher au maximum les compétences de leurs salariés en parcours d’insertion et les besoins des employeurs ? Les résultats pourraient déboucher sur une évolution des projets des SIAE, en lien avec les services de l’Etat. L’expérimentation vise à essaimer sur l’ensemble du territoire à l’horizon 2018.
Concrètement, les SIAE pourront proposer plus rapidement des expériences professionnelles – immersion, intérim, contrats – pour permettre aux personnes d’affiner leur projet professionnel, de faire attester leurs compétences par les employeurs et de réduire leur temps de passage dans la structure, mais aussi pour travailler plus facilement sur les échecs. L’enjeu est à la fois de changer le regard sur la situation des personnes éloignées de l’emploi et de transformer le projet politique des associations.