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La cité bouillabaisse

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« Un monstre qui fabrique des mains noires, des têtes détraquées, des caïds jetables, des djellabas-baskets […] Un monstre dont les Frankenstein dépècent la démocratie pour lui substituer une autre, amorphe et manipulable ».… Le moins que l’on puisse dire, c’est que Philippe Pujol n’est pas tendre avec sa ville. Prix Albert Londres 2014 pour sa série de reportages « Quartiers Shit » publiée dans La Marseillaise, le journaliste a plongé dans les entrailles de la cité phocéenne et de ses quartiers nord pour comprendre les maux dont souffre aujourd’hui la deuxième ville de France. Et ils sont nombreux… Philippe Pujol nous fait pénétrer au cœur de ces quartiers délaissés où l’on deale du shit mélangé à de l’huile de vidange ou à d’autres produits tout aussi toxiques, où des minots apprennent la loi de la rue et l’argent facile en faisant les guetteurs, avant de devenir à leur tour des petits caïds et de tomber sous les balles de concurrents. Il revient pas à pas sur le parcours de ces jeunes pour qui « le trafic de drogue et les gangs […] libèrent de la honte d’être pauvre, sans emploi et incapable d’entretenir une famille ». Il nous entraîne dans un monde de zones grises où les frontières entre le droit et l’illégalité sont devenues floues, où des élus côtoient des voyous, un monde où le clientélisme est roi et où la corruption « gangrène la gestion publique et ruine la confiance que les citoyens ont dans leurs élus ».

Si le tableau est sombre, il n’est jamais caricatural, et le journaliste ne manque pas de rappeler que les jeunes délinquants restent « une infime minorité des quartiers populaires » et que les élus sont tous « sincères dans leur combat politique », avant que la perspective des élections ne les entraîne dans une dangereuse logique de compromis, puis de compromissions. Surtout, il montre le travail de ces femmes et de ces hommes éducateurs spécialisés, responsables d’associations de quartier, qui se battent au quotidien contre l’exclusion, pour « percer des portes et des fenêtres dans les murs du ghetto ». Une enquête fouillée, passionnante et qui se veut surtout un cri d’alarme, afin d’éviter que le monstre finisse par échapper au pouvoir de ceux qui l’ont fabriqué et qu’il ouvre un boulevard aux extrémismes.

La fabrique du monstre

Philippe Pujol – Ed. Les Arènes – 20 €

Culture

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