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Le HCSP appelle à un pilotage pérenne de la politique de santé mentale

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Entre avril 2015 et janvier 2016, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a procédé, à la demande de la direction générale de la santé (DGS), à l’évaluation du plan « psychiatrie-santé mentale » (PPSM) 2011-2015. Dans son rapport, publié récemment(1), il décrit un plan « consensuel et pertinent »… qui n’a toutefois pas empêché la persistance de difficultés, notamment une hétérogénéité des pratiques de soins et de moyens.

Un plan « consensuel et pertinent »

Lancé en 2012, le PPSM a été construit autour d’objectifs stratégiques, avec un rôle central des agences régionales de santé pour sa mise en œuvre, rappelle en préambule le Haut Conseil. Il se décline autour de quatre axes, visant à prévenir et à réduire les ruptures « au cours de la vie », « selon les publics et les territoires », « entre la psychiatrie et son environnement sociétal » et « entre les savoirs »(2).

Le HCSP dresse un certain nombre de constats plutôt positifs. Il observe en premier lieu que « l’ensemble des acteurs rencontrés » par l’instance s’accordent à souligner « la pertinence » de ces axes au regard des besoins observés. De fait, indique le rapport, ils se sont « largement approprié son contenu et le plan a même parfois permis de conforter des actions mises en place à l’échelle des territoires ». Le manque de financements spécifiques attachés à des objectifs prioritaires a cependant été critiqué.

Des progrès dans la reconnaissance positive du rôle des personnes vivant avec des troubles psychiques et de leur entourage sont par ailleurs à souligner. Le PPSM a fait une place importante à la participation active des représentants de ces personnes – notamment dans les instances d’établissements afin de les intégrer pleinement aux démarches de démocratie sanitaire – et, souligne le Haut Conseil, « cette tendance est positivement perçue par les différents acteurs ». En outre, bien que leur développement ait été quantitativement faible sur la période du plan, les groupes d’entraide mutuelle(3) « contribuent de plus en plus à la déstigmatisation des troubles psychiques ». Cependant, nuance le rapport, « le manque de soutien pérenne voire parfois la diminution drastique des moyens des associations ont été identifiés comme un frein à la représentation qui ne peut se faire qu’avec un soutien fort et fiable en moyens humains et financiers ».

Le HCSP relève encore le rôle accru du secteur médico-social et social dans le champ du handicap psychique. « La coordination entre le sanitaire et le secteur social et médico-social est en train de s’améliorer quelle que soit l’échelle territoriale », indique l’instance. Une mobilisation a par ailleurs semblé émerger sur la question de l’accès aux soins somatiques, note encore le rapport. « Ceci s’est traduit sur le terrain par le recrutement de médecins généralistes par les établissements spécialisés en psychiatrie ou la mise en place de conventions avec des services de santé ainsi que diverses initiatives locales. » Une attention a aussi été apportée à la prise en charge en urgence et à l’accès aux soins des populations défavorisées à travers, par exemple, la mise en place d’équipes mobiles et de centres de crise et d’écoute téléphonique ou bien encore la signature de conventions entre les équipes psychiatriques intervenant aux urgences générales et les services d’aide médicale urgente.

On a assisté également à un début de rééquilibrage de l’offre de soins entre les régions et à l’intérieur des régions… même si les disparités territoriales à la fois en équipement et en personnels demeurent « très importantes », relève le rapport.

D’importantes difficultés persistent

Plus globalement, « d’importantes difficultés persistent », estime le Haut Conseil. En matière d’accès aux soins, par exemple, les délais d’attente pour une première consultation sont « un frein majeur ». « Cette problématique apparaît d’autant plus prégnante en pédopsychiatrie où les délais d’attente importants sont un obstacle au diagnostic précoce et à une prise en charge adaptée. » Qu’il s’agisse des conditions de soins ou d’hospitalisation, le HCSP relève par ailleurs « une trop grande hétérogénéité des pratiques et des moyens ». Il regrette encore l’absence de remboursement des soins de psychothérapie. Et juge également que la formation non systématique des médecins généralistes à la psychiatrie ainsi que les difficultés de communication entre les professionnels (notamment médecins généralistes et psychiatres) restent un obstacle à la prise en charge des nombreuses personnes vivant avec un trouble psychique dont ils sont les référents.

Au final, quelle que soit la forme que pourrait prendre une nouvelle programmation dans ce domaine, le Haut Conseil recommande d’inscrire la politique de santé mentale et de psychiatrie de façon pérenne et pilotée à long terme avec une dimension interministérielle, plutôt que de mettre en place des plans ou programmes successifs.

Le rapport détaille, au-delà, 64 recommandations déclinées autour de cinq thèmes principaux : organisation des actions, prévention, développement des formations et soutien de la recherche, amélioration de l’accès aux soins, et amélioration des conditions de vie des personnes vivant avec un trouble psychique.

La prévention du suicide doit s’inscrire dans la politique de santé mentale, plaide le HCSP

L’analyse détaillée du programme national d’actions contre le suicide 2011-2014(4) « fait apparaître plusieurs faiblesses », estime le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) dans un rapport d’évaluation récemment rendu public(5). L’instance insiste notamment sur le « ciblage inadapté des populations destinataires des actions ». Alors que nombre de ces actions interviennent très en amont du suicide en couvrant la population générale ou certains groupes de population présentant des vulnérabilités spécifiques (personnes handicapées, sourdes et malentendantes, âgées…), les populations à risque élevé – en particulier celles qui ont déjà fait une tentative de suicide – ne sont pas les plus ciblées par le programme, « limitant le potentiel d’impact de ces actions », estime le HCSP. En outre, souligne-t-il, plusieurs actions semblent relever davantage de la politique de santé mentale que d’un programme spécifique au suicide, comme la prise en charge de la dépression. Le HCSP préconise donc d’intégrer la prévention du suicide dans le champ de la politique de santé mentale, qui constitue l’un des cinq volets de la stratégie nationale de santé lancée à la fin 2013(6). Et donc de « ne pas s’engager dans un nouveau plan ou programme consacré spécifiquement à la prévention du suicide »(7).

Le HCSP critique par ailleurs la gouvernance du programme, regrettant l’absence, au niveau national, « d’une réelle dynamique interministérielle », et, au niveau local, une appropriation seulement partielle par les agences régionales de santé, « en attente d’une mise en réseau et d’une coopération plus actives ». Enfin, selon l’instance, le programme peut sembler « inachevé » dans la mesure où il n’est pas allé jusqu’à fixer des objectifs chiffrés en termes de réduction des suicides et des tentatives, « le rendant ainsi moins lisible et concret aux yeux des acteurs qui le mettent en œuvre ». L’absence de moyens financiers dédiés a en outre constitué un frein à son efficacité, relève encore le rapport.

S. V.

Notes

(1) Rapport disponible sur www.hcsp.fr.

(2) Voir ASH n° 2749 du 2-03-12, p. 5.

(3) Voir en dernier lieu ASH n° 2960 du 13-05-16, p. 45.

(4) Voir ASH n° 2724 du 16-09-11, p. 10.

(5) Rapport disponible sur www.hcsp.fr.

(6) Voir ASH n° 2826 du 27-09-13, p. 8.

(7) Rappelons que, en février dernier, la ministre de la Santé a annoncé qu’elle présenterait, dans le courant du premier semestre 2016, une nouvelle « feuille de route opérationnelle » pour la prévention du suicide.

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