« Il faut sécuriser les ressources du premier service public national de l’insertion des jeunes. » Tel est le titre d’un manifeste rendu public le 9 mai par l’Union nationale des missions locales (UNML), signé par son président, le député Jean-Patrick Gille (PS, Indre-et-Loire), et les présidents d’associations régionales des missions locales, dont Jean-Paul Dupré, également président du Conseil national des missions locales.
« Malgré la réussite et la performance de leurs actions, les missions locales voient leurs ressources diminuer en 2016 », alors même que les jeunes expriment des inquiétudes sur leur avenir et les politiques qui les concernent, arguent les signataires. Une situation sur laquelle Jean-Patrick Gille a interpellé la ministre du Travail, Myriam El Khomri, le 27 avril à l’Assemblée nationale, lors d’une séance publique consacrée aux questions d’emploi. Au moment où le gouvernement « réaffirme sa priorité pour la jeunesse avec de nouvelles dispositions prévues dans la future loi “égalité et citoyenneté”, mais aussi avec la généralisation de la garantie jeunes », a-t-il précisé, « les missions locales, qui accompagnent près de 1 500 000 jeunes au quotidien et assurent une prescription formation sur trois, voient leur situation financière fragilisée par des baisses des dotations, qui représentent pour l’ensemble du réseau plus de 60 millions sur deux ans ». Leurs moyens diminuent sous les effets conjugués de « la fin du dispositif de l’ANI jeunes [accord national interprofessionnel sur l’accompagnement des jeunes sortis du système scolaire sans qualification] porté par les partenaires sociaux », des « baisses de subventions de l’Etat pour l’accompagnement des emplois d’avenir » et des réductions de financement « des collectivités locales, notamment de certaines régions comme l’Ile-de-France et des départements », a alerté le président de l’UNML. Rappelant que le budget 2016 des missions locales a crû de 2 millions d’euros pour atteindre 191 millions d’euros (contre 189 initialement prévus) et que les crédits d’accompagnement des jeunes en emploi d’avenir s’établissent à 25 millions d’euros (contre 30 millions en 2015), la ministre a surtout renvoyé sa réponse aux conclusions d’une mission confiée à l’inspection générale des affaires sociales sur le modèle économique des missions locales, attendues d’ici à septembre prochain. Elles devraient, a indiqué Myriam El Khomri, permettre d’avoir « un débat éclairé » pour la préparation du budget 2017.
Mais dans leur manifeste, les présidents d’associations régionales des missions locales estiment que plusieurs mesures doivent être prises pour préserver la qualité de l’intervention des structures. Ils jugent « urgent de sécuriser leurs moyens financiers et organisationnels de manière pluriannuelle ». En premier lieu, leur texte demande que les missions locales soient « expressément mentionnées » dans la loi « travail » comme les opérateurs « de la mise en œuvre du droit au parcours d’accompagnement contractualisé prévu par son article 23 ». Celui-ci généralise la garantie jeunes, définie comme « la modalité la plus intense » du parcours vers l’emploi et l’autonomie instauré pour tous les jeunes en difficulté et confrontés à un risque d’exclusion professionnelle. Les signataires du manifeste souhaitent aussi la définition d’un « cadre national de référence s’appuyant sur la spécificité et la performance de l’action des missions locales », pour garantir « l’équité d’accès des jeunes au droit à l’accompagnement » ainsi que « la neutralité et la pérennité des structures ». Une préconisation qui vise à éviter les risques d’inégalités territoriales pouvant découler de la délégation par l’Etat aux régions de la coordination de certains acteurs du service public de l’emploi, dont les missions locales. Celle-ci a été rendue possible par la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.
Afin que les missions locales puissent développer leurs projets de territoire dans la durée et « assurer leur responsabilité d’employeurs », leurs crédits de fonctionnement doivent être portés à 220 millions d’euros, revendiquent les présidents d’associations régionales des missions locales. Les régions doivent, de leur côté, maintenir « leur niveau d’engagement financier au moment où elles se voient confier de nouvelles responsabilités dans la coordination et la conduite des politiques d’emploi, de formation et de jeunesse ». Par ailleurs, une disposition législative devrait rendre obligatoire la participation des collectivités locales au fonctionnement des structures, demande encore le manifeste. Tandis que la ministre a, le 27 avril, annoncé qu’un travail était un cours pour répondre aux problèmes posés par la « complexité des financements européens », les signataires du manifeste souhaitent « un dispositif financier porté par l’Etat permettant d’avancer aux missions locales les fonds européens dans l’attente de leur versement ».
Le document plaide également pour la sécurisation du modèle économique et financier de la garantie jeunes et pour la simplification administrative du dispositif. Les missions locales devraient être impliquées dans « la réussite du programme des 500 000 formations » de demandeurs d’emploi, préconise-t-il par ailleurs. Enfin, il invite à un aboutissement rapide des travaux engagés sur le décloisonnement des dispositifs d’accompagnement. Si l’accompagnement global a été reconnu dans la convention pluriannuelle d’objectifs entre l’Etat et les missions locales pour la période 2015-2018, le réseau attend que ce principe se traduise concrètement « dans les financements, par la fongibilité des moyens et une enveloppe unique », précise Serge Kroichvili, délégué général de l’UNML.