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Le défenseur des droits dénonce les entraves à l’accès des étrangers aux droits fondamentaux

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Pour le défenseur des droits, « le respect des droits des étrangers est un marqueur essentiel du degré de protection et d’effectivité des droits et libertés dans un pays ». Or « les différentes lois relatives aux conditions d’entrée et de séjour en France des étrangers ayant succédé à l’ordonnance du 2 novembre 1945 ont, à de rares exceptions près, conduit à une régression de la situation des étrangers », rappelle l’institution dans un rapport, rendu public le 9 mai(1), qui compile ses actions en la matière – avis, rapports, décisions… – depuis sa création en mars 2011.

En effet, « les textes les plus favorables ne revenant jamais complètement sur la situation prévue par la législation antérieure », indique le défenseur en introduction à ce document, ces réformes successives « ont renforcé la banalisation, dans les esprits et dans le droit, du traitement différencié des individus à raison de leur nationalité ». Et ce, « à tel point qu’aujourd’hui, l’idée de traiter différemment les personnes n’ayant pas la nationalité française, de leur accorder moins de droits que les nationaux – et toujours sous une forme conditionnée, plus précaire – est si usuelle et convenue qu’elle laisserait croire que la question de la légitimité d’une telle distinction est dépourvue de toute utilité et de tout intérêt ». Un constat à l’appui duquel ce rapport relève « l’ensemble des obstacles qui se dressent à l’accès des étrangers aux droits fondamentaux en France », pour mieux « mesurer l’écart entre les droits proclamés et les droits effectivement exercés », au-delà « des pratiques dépourvues de base légale ».

Des critères apparemment neutres

En matière d’entrée, de séjour et d’éloignement des étrangers, en particulier, « le droit positif autorise les différences de traitement fondées sur la catégorie juridique “étranger” » et « le pouvoir discrétionnaire de l’Etat est important ». Mais il n’est « pas sans limite et ne saurait en aucun cas être discriminatoire », plaide toutefois l’institution. Dans la plupart des autres domaines (protection sociale, protection de l’enfance, santé, logement, hébergement), le droit « ne légitime plus cette différence de traitement et, à de rares exceptions près [certes notables en matière d’emploi], l’interdit ». Et pourtant – et là encore « au-delà des pratiques illégales qui contreviennent à cette interdiction, comme les refus de scolarisation ou d’accès aux soins par exemple » –, la loi elle-même « est susceptible d’instaurer des critères autres que la nationalité, apparemment neutres, mais qui deviennent pourtant de nouvelles entraves à l’accès aux droits fondamentaux des seuls étrangers », en reposant « parfois sur des considérations subjectives, fluctuantes, empreintes de protectionnisme, voire de xénophobie », pointe le défenseur, qui rejette l’idée que « la forte présence d’étrangers en France, y compris en situation régulière et durablement installés, serait de nature à remettre en cause “l’identité nationale” ».

Car « l’immigration est un fait social consubstantiel à la construction de la France et d’une partie de l’Europe », souligne-t-il, et « aucune période de l’histoire de l’immigration, aussi intense soit-elle, n’a modifié le socle des valeurs républicaines communes » : « Ni le million de rapatriés et harkis au début des années 1960, pas plus que tous les Portugais, Espagnols, Italiens, Algériens, Marocains, Tunisiens, venus – pour travailler – dans les années 1960 et 1970. Ni les immigrés sub-sahariens que l’indépendance des Etats africains a conduits en Europe. Ni enfin les près de 200 000 “boat people” au début des années 1970 et ce, alors que la situation économique de la France commençait à se dégrader, que le gouvernement avait suspendu l’immigration de travailleurs et que la “maîtrise des flux migratoires” était déjà devenue la préoccupation majeure des pouvoirs publics. »

Le poids des mots

Parmi les idées reçues que le défenseur s’attache à battre en brèche, la plus répandue peut-être est « celle selon laquelle une politique à l’égard des étrangers pleinement respectueuse des droits fondamentaux provoquerait un “appel d’air” favorisant une immigration massive ou serait particulièrement coûteuse ». En réalité, explique-t-il, « outre les situations de renoncement aux soins dont ils sont coutumiers, les étrangers sont particulièrement exposés au non-recours aux prestations sociales » du fait de leur précarité et de leur manque de repères « dans les méandres de l’administration ».

Enfin, « véhicules des idées et des stéréotypes, les mots utilisés ne sont pas neutres et sans conséquence », estime l’institution, en soulignant que « migrants, réfugiés, clandestins, sans papiers, immigrés, exilés sont autant de mots rarement utilisés de manière indifférente ». D’ailleurs, le mot « migrant » lui inspire une réflexion inquiète sur le fait que « ce terme a longtemps été vu comme le plus neutre, au regard notamment de celui de “clandestin”, particulièrement utilisé par des mouvements anti-immigration », mais qu’il a, depuis quelque temps, « tendance à être utilisé, en particulier dans l’expression inappropriée de “crise des migrants”, pour disqualifier les personnes, leur dénier un droit à la protection en les assimilant à des “migrants économiques” dont l’objectif migratoire serait utilitariste et, partant, moins légitime que celui lié à la fuite de la guerre ou des persécutions, opéré par le réfugié ». Une distinction qui « conduit à jeter le discrédit et la suspicion sur les exilés dont on cherche à déterminer si leur choix d’atteindre l’Europe est noble, « moral » et pas simplement utilitaire », s’insurge le défenseur des droits, en pointant « le risque de priver de protection les personnes en droit d’en bénéficier » et qui, avant d’être considérées comme des étrangers, doivent l’être comme des enfants, des malades, des travailleurs ou des usagers d’un service public…

Notes

(1) Ce rapport est disponible sur www.defenseurdesdroits.fr.

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