La secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées, Ségolène Neuville, en avait annoncé la création à plusieurs reprises ces derniers mois et, en dernier lieu, lors du comité national autisme du 21 avril dernier(1) : les pôles de compétences et de prestations externalisées (PCPE) vont pouvoir se mettre en place avec la diffusion, via une instruction de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), de leur cahier des charges, sur la base duquel les agences régionales de santé (ARS) vont lancer un appel à candidatures.
Le développement de ces pôles « s’inscrit dans le cadre de la démarche “Une réponse accompagnée pour tous”, pilotée par Marie-Sophie Desaulle à la suite du rapport “Zéro sans solution” établi par Denis Piveteau »(2), rappelle la DGCS. Leurs objectifs : assurer la continuité des parcours des personnes handicapées et éviter notamment que leur situation ne devienne critique du fait de l’absence d’une réponse adaptée, en particulier en finançant l’intervention à domicile de certains professionnels indépendants (psychologues, éducateurs…) dont le coût reste actuellement à la charge des familles. Selon le cahier des charges, un PCPE est ainsi « un dispositif venant compléter une organisation fonctionnelle et territoriale, dont la finalité est de concevoir et d’organiser une réponse transitoire ou pérenne, pour des personnes n’ayant pas de réponse partielle ou totale adaptée à leurs besoins ».
Rattaché à un établissement ou un service médico-social (ESMS) ou à un groupement d’ESMS, un pôle de compétences et de prestations externalisées n’a pas de personnalité juridique en tant que telle. Ce n’est pas un établissement ou un service médico-social supplémentaire puisqu’il bénéficie de l’autorisation de l’établissement auquel il est rattaché et est soumis à ce titre aux règles du code de l’action sociale et des familles. Il doit disposer d’un projet de service spécifique, distinct de celui de l’établissement porteur. Il n’a pas vocation à apporter des prestations aux personnes accueillies dans ce dernier.
Le PCPE est structuré autour d’une équipe pluridisciplinaire (mobilisant le cas échéant des compétences médicales, psychologiques, paramédicales, éducatives…) et d’un appui administratif mutualisé avec l’ESMS support pour la gestion des rendez-vous notamment. Les prestations qu’il sert sont délivrées par des professionnels extérieurs à l’ESMS support, salariés ou libéraux, liés au dispositif par convention ou contrat. Le cahier des charges insiste sur l’obligation de contractualisation : « plus que pour tout autre dispositif », le conventionnement est nécessaire avec, en particulier, les professionnels d’exercice libéral (tels les psychologues), le rectorat (pour une scolarisation en milieu ordinaire avec un soutien médico-social) et la psychiatrie de secteur.
Les PCPE « s’adressent à l’ensemble des situations de handicap qui, compte tenu de besoins spécifiques des personnes ou de leur complexité, nécessitent d’adjoindre aux réponses médico-sociales existantes, les compétences d’intervenants exerçant au sein de ces pôles, à titre salarié ou libéral », explique la DGCS. Sont plus précisément visés les enfants, les jeunes et les adultes en situation de handicap :
→ vivant à domicile, au domicile de tiers ou le cas échéant, pour les enfants et les jeunes, domiciliés au sein d’une structure ou d’une famille d’accueil relevant de l’aide sociale à l’enfance. Il peut s’agir de personnes :
– dont, quelles que soient les modalités de leur scolarisation, la situation et le projet amènent à proposer un accompagnement et des interventions en soutien du domicile,
– dont l’accompagnement à domicile doit être renforcé par des prestations spécifiques permettant un parcours en milieu de vie ordinaire, et ce, dans tous les aspects de la vie quotidienne,
– bénéficiant d’une orientation vers un établissement ou un service médico-social sans réponse d’accompagnement effective ou suffisante et nécessitant le recours à des prestations plus intensives afin de maintenir leur autonomie, leurs compétences, etc., et d’éviter l’aggravation des situations qui parfois se révèlent difficiles à rétablir,
– vivant des périodes de transition vers un établissement ou un service e t nécessitant un appui à la continuité des interventions du pôle déjà engagées au domicile ou dans le milieu de vie ordinaire. Les interventions sont alors réalisées sur des périodes courtes, font l’objet de protocoles et visent à faciliter l’intégration dans le nouveau lieu de vie de la personne par le transfert à l’équipe de l’établissement des éléments clés de son plan d’accompagnement individualisé ainsi que des savoir-faire et compétences permettant d’accompagner cette transition,
– le cas échéant, accueillis de façon non adaptée dans le secteur sanitaire, ou dans le secteur médico-social.
Le pôle a aussi une visée de soutien et de guidance pour les familles et les aidants en ce qu’il prévoit la coordination des prestations, renforce et valorise les savoir-faire des proches aidants de la personne handicapée et renforce les prestations permettant d’alléger l’accompagnement par les familles. « Ce faisant, il s’agit, par un accompagnement effectif, de prévenir et d’anticiper les situations critiques. »
Le cahier des charges prévoit deux modes d’accès aux PCPE :
→ par le biais d’une notification de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ;
→ directement par l’usager « afin de favoriser des interventions rapides, notamment précoces ». L’intéressé doit alors être invité à déposer dans le même temps un dossier auprès de la MDPH afin de pouvoir accéder aux droits qui lui sont ouverts. Une évaluation fonctionnelle de la personne handicapée devra alors être réalisée, le cas échéant par le pôle si elle n’a pas déjà été faite par la MDPH.
Le cahier des charges indique que les prestations servies par le PCPE sont mises en œuvre notamment dans le cadre du plan personnalisé de compensation du handicap, du plan personnalisé de scolarisation et, le cas échéant, du plan d’accompagnement global mis en place par la loi « santé » du 26 janvier dernier. Les intervenants qui les délivrent doivent être formés aux recommandations de bonnes pratiques professionnelles produites par l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux et la Haute Autorité de santé.
Selon les besoins identifiés et les dispositifs existants sur les territoires, le contenu des prestations peut être modulé, en quantité et en nature, étant entendu que les prestations directes auprès des usagers et des familles constituent le cœur du dispositif, « toutes les autres prestations possibles venant éventuellement compléter cette première mission obligatoire ». Sont visées, notamment :
→ les prestations de psychologues ou d’autres professionnels médicaux et paramédicaux « hors nomenclature des actes de l’assurance maladie » ;
→ les interventions d’éducateurs spécialisés, d’éducateurs de jeunes enfants et de moniteurs-éducateurs, à domicile ou sur les lieux de vie incluant l’école (sous réserve de l’accord préalable et d’une convention passée avec les services départementaux de l’Education nationale).
Ces professionnels doivent conclure une convention avec l’ESMS auquel est adossé le pôle(3). Comme les prestations servies par ce dernier peuvent venir en complément d’autres modes d’accompagnement, médico-sociaux ou autres, les personnes et les familles qui disposent déjà d’un accompagnement en libéral non solvabilisé qu’elles souhaitent conserver pourront le faire, sous condition de contractualisation entre les professionnels intervenant en libéral et le PCPE.
Les interventions ainsi mises en œuvre par le pôle viennent en plus des aides financées par la prestation de compensation du handicap et par l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et ses compléments.
Au-delà, le pôle peut aussi :
→ mettre en œuvre des prestations de soutien et d’accompagnement auprès des familles et des aidants ;
→ proposer la formalisation du projet personnalisé d’accompagnement de la personne fondé sur une évaluation fonctionnelle réalisée, le cas échéant par le pôle, avec la désignation d’un coordonnateur de parcours si celui-ci n’a pas déjà été désigné par la MDPH ;
→ développer différents types de coordination des interventions (entre les personnels du service, avec les parents ou les proches, avec des intervenants extérieurs qui participent au plan d’accompagnement global de la personne…).
Le financement des pôles de compétences et de prestations externalisées peut provenir :
→ d’une partie des 15 millions d’euros alloués au titre de la prévention des départs en Belgique(4) ;
→ des reliquats non pérennes non affectés aux groupes d’entraide mutuelle et aux MAIA (méthodes pour l’intégration des services d’aide et de soins dans le champ de l’autonomie), ou d’autres marges dégagées sur le fonds d’intervention régional en 2016 ;
→ du redéploiement de crédits permettant à un même gestionnaire la création d’un PCPE rattaché à l’un des établissements, notamment dans le cadre d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens.
(2) Voir respectivement ASH n° 2866 du 27-06-14, p. 11 et n° 2934 du 20-11-15, p. 8 et 13.
(3) Une convention-type en cours d’élaboration sera diffusée prochainement aux porteurs de projet, indique la DGCS.