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« Peuple » incompris

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Pauline Aubry, la trentaine, se souvient de son adolescence. Abonnée aux services des urgences en raison de nombreuses « crises d’angoisse » d’origine non identifiée, elle a gardé de cette période un certain attachement pour l’hôpital. Est-ce le hasard qui, vingt ans plus tard, amène celle qui est devenue auteure de bandes dessinées à animer un atelier BD dans le service de pédopsychiatrie d’un hôpital de l’AP-HP ? Les mutants est le roman graphique qu’elle a tiré de cette expérience auprès de « dix ados dont les pathologies sont compatibles avec un travail en groupe » – Annabelle, Adrien, Pierre, Jérémy, Coralie et les autres, âgés de 11 à 14 ans, patients de l’unité Charcot, encadrés par Barbara, l’éducatrice spécialisée. Pauline Aubry nous fait découvrir le fonctionnement de ce service de pédopsychiatrie – le plus grand d’Europe –, où elle se rend une fois par semaine pendant plusieurs mois. Les enfants qui s’y font soigner sont de tous niveaux sociaux. Certains sont très lucides sur leur situation (troubles obsessionnels compulsifs, anorexie, dépression, addictions…), d’autres ne savent pas pourquoi ils sont hospitalisés. Dans les planches qu’ils réalisent, les enfants racontent indirectement leur histoire – d’ailleurs, à la fin de son ouvrage, Pauline Aubry reproduit des dessins originaux d’Alice et de Pierre. Les Mutants sont aussi une plongée dans les années collège de l’auteure, quand elle se prenait pour Tomasi, l’insolent personnage du film Le péril jeune, ou quand elle « abusait de mytho », faisant croire à ses amies qu’elle avait un jumeau mort ou un petit ami atteint du virus du sida pour se rendre « intéressante ». Selon elle, les adolescents sont « un peuple incompris », qui vivent dans « un monde ralenti, où l’on se déplace lentement, les bras ballants, le regard dans le vague ». Elle pousuit : « Chez les mutants, on ne s’assoit pas : on s’avachit, on se vautre. Chez les mutants, on a un langage propre, que les étrangers sont incapables de comprendre. Chez les mutants, on a mal, on souffre, à plusieurs. Chez les mutants, on aime les questions sans réponses. Chez les mutants, on écoute de la musique triste en regardant la pluie tomber par la fenêtre. Et on dort, beaucoup, parce que l’on est très fatigué, et qu’on a mal au corps. Alors entre, visiteur, n’aie pas peur, toi aussi, il y a longtemps, tu as été un mutant. »

Une version courte de ce roman graphique a été publiée dans la revue XXI (avril 2015) sous le titre L’hôpital des ados, après que Pauline Aubry a remporté pour ce même travail le concours Jeunes talents d’Angoulême en 2014.

Les mutants. Un peuple d’incompris

Pauline Aubry – Ed. Les Arènes/BD XXI – 20 €

Culture

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