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Minima sociaux : le rapport « Sirugue » préconise la création d’une allocation unique

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Composée d’un montant socle et de deux compléments différents selon que l’allocataire est ou non en capacité de travailler, cette allocation serait accessible dès 18 ans. Ce dispositif va faire l’objet d’un travail approfondi, pour une mise en œuvre en 2018, a indiqué le Premier ministre.

« Clarifier l’architecture des minima sociaux, c’est […] renforcer son acceptabilité et fonder le consentement de tous à l’effort de solidarité », a répondu Christophe Sirugue aux « critiques aveugles de l’assistanat » dans son rapport sur les minima sociaux que lui avait commandé le Premier ministre à la fin 2015(1) et qu’il lui a remis le 18 avril(2). Le député socialiste de Saône-et-Loire y formule une série de recommandations de nature à simplifier, à court terme, le fonctionnement des minima sociaux. Il pose également les bases d’une réforme en profondeur de ces prestations autour d’une couverture socle commune à tous les bénéficiaires, quel que soit leur âge. Il recommande aussi de renforcer les politiques d’insertion conduites par les départements. Des propositions bien accueillies par les associations (voir ce numéro page 13).

Création d’une couverture socle commune

Parmi trois scénarios possibles, Christophe Sirugue privilégie celui d’une refonte en profondeur de l’architecture globale du système des minima sociaux. Un tel scénario permettrait de traiter tous les usagers selon les mêmes règles quand leurs ressources viennent à manquer, tout en les faisant bénéficier d’un dispositif complémentaire correspondant à leurs propres spécificités. Pour ce faire, l’élu préconise d’unifier les minima sociaux en mettant en place une couverture socle commune qui remplacerait les dix minima sociaux dont bénéficient aujourd’hui quatre millions d’allocataires(3). Cette prestation socle commune serait versée à tout individu sous condition de ressources du ménage, dès l’âge de 18 ans, sans tenir compte de la composition du foyer. Son montant pourrait être de 400 € par mois. Ce socle serait complété par deux « compléments de parcours » pour tenir compte de la capacité ou non de l’allocataire de travailler :

→ un complément d’insertion qui permettrait à tout actif de plus de 18 ans de s’inscrire dans une démarche d’insertion. Son montant, déterminé à partir de la même base ressource que pour la couverture socle commune, atteindre 100 € par mois ;

→ un complément de soutien qui permettrait d’assurer un niveau de vie minimal aux personnes en situation de handicap ou aux personnes âgées. Il pourrait s’élever à un peu plus de 407 € par mois. Ce qui, ajouté au montant socle, permettrait d’atteindre le montant maximal actuel de l’allocation aux adultes handicapés (AAH).

Il s’agit d’un scénario « particulièrement ambitieux, qui mettra du temps à se réaliser », concède le député. Manuel Valls a demandé à ses ministres d’en définir « le contenu précis durant les six prochains mois, pour une mise en œuvre en 2018 », a-t-il indiqué dans une tribune publiée sur Facebook.

Des simplifications à court terme

Un autre scénario propose la mise en œuvre, dès le 1er janvier 2017, de 12 mesures de simplification des minima sociaux pour faciliter l’accès des usagers à leurs droits, comme l’échange de données entre opérateurs afin de réduire « drastiquement », voire de supprimer le nombre de pièces justificatives demandées, ou encore pour rendre plus prévisibles les montants versés aux allocataires du revenu de solidarité active (RSA). Sur ce dernier point, Christophe Sirugue entend mettre en place un « effet figé » pour le calcul du RSA. Cette mesure permettrait d’apporter aux allocataires la garantie de percevoir le même montant de RSA pendant une durée de trois mois. Les modalités de calcul retenues seraient celles qui sont actuellement utilisées pour la prime d’activité, augmentées d’un mécanisme correctif en cas de cessation d’activité sans revenu de remplacement. La mise en place de cet « effet figé » permettrait également de diminuer les indus et les rappels, selon le député.

Le rapport recommande par ailleurs de mettre fin à la possibilité de cumul de l’allocation aux adultes handicapés et de l’allocation de solidarité spécifique (ASS). « Fin 2011, un peu plus de 25 000 bénéficiaires (5 % des bénéficiaires de l’ASS environ) cumulaient ainsi les deux minima. Une personne dans cette situation est susceptible de percevoir près de 1 300 € par mois », indique Christophe Sirugue. D’après lui, « cette possibilité de cumul ne correspond à aucun objectif en particulier, notamment en termes de retour à l’emploi » et son maintien ne lui semble pas souhaitable. Et de rajouter qu’« un tel cumul constitue même un frein au retour à l’emploi puisque la reprise d’un emploi peut faire perdre à l’allocataire un montant considérable ». Les économies budgétaires engendrées seraient relativement réduites et sont estimées, en année pleine, à 20 millions d’euros par an. La mesure pourrait être prise par décret, après consultation du Conseil national consultatif des personnes handicapées, précise le rapport.

Le Premier ministre a indiqué, dans un communiqué, que l’ensemble de ces propositions visant à simplifier et à harmoniser les prestations « devraient être mises en œuvre très rapidement. Car la complexité crée de l’inégalité. »

Réduction du nombre de prestations

Autre scénario : réduire par deux le nombre de dispositifs existants en fonction de leur objet et des bénéficiaires visés, et passer ainsi de dix minima sociaux à cinq à l’horizon 2020. Aux côtés d’un RSA de droit commun et d’une allocation de solidarité spécifique recentrée sur les allocataires les plus proches du marché du travail, l’allocation supplémentaire d’invalidité et l’AAH seraient regroupées. L’allocation de solidarité aux personnes âgées serait maintenue en l’état, tout comme l’allocation pour demandeur d’asile – en vigueur depuis le 1er novembre 2015(4).

Au revenu de solidarité active, le rapport propose d’intégrer l’allocation veuvage, l’allocation temporaire d’attente et le revenu de solidarité outre-mer, confortant ainsi le RSA « dans sa fonction de recours universel ». Il préconise en parallèle d’adapter l’allocation de solidarité spécifique en limitant sa durée à deux ans, au lieu de la supprimer comme le préconisait la Cour des comptes en novembre dernier(5).

Ouverture du RSA aux jeunes de moins de 25 ans

Quel que soit le scénario retenu, le député pose la question de l’accès des jeunes aux minima sociaux, et notamment des 18-25 ans au RSA. « Priver la très grande majorité des jeunes de l’accès à notre dispositif universel de lutte contre la pauvreté ne [lui] paraît en effet plus acceptable ». Et de rajouter que « cette condition d’âge […] empêche de lutter efficacement contre la pauvreté des plus jeunes, dont la hausse depuis 2008 est malheureusement frappante ». La piste privilégiée est donc d’ouvrir le RSA aux jeunes de moins de 25 ans. Ce droit ne concernerait que les jeunes en activité et non les étudiants, précise le rapporteur. Toutefois, reconnaît l’élu, les considérations budgétaires et de fiscalité, notamment, rendent cette généralisation au 1er janvier 2017 « difficile ».

Obligation pour les départements de financer les politiques d’insertion

Dans le cadre des négociations en cours sur la recentralisation du RSA entre l’Etat et l’Assemblée des départements de France, Christophe Sirugue préconise de nerecentraliser que partiellement le financement du RSA, afin de « conserver l’incitation financière des départements à une sortie des allocataires du RSA » et d’éviter qu’ils ne les laissent « sans aucun accompagnement ». Cela « reviendrait à fixer une sorte de ticket modérateur entre les départements et l’Etat. La part prise en charge par l’Etat pourrait par exemple atteindre jusqu’à 80 % du montant total de l’allocation. »

Le député suggère également de restaurer pour les départements l’obligation de consacrer une part minimale de leurs dépenses aux politiques d’insertion. Cette part pourrait, selon lui, représenter 17 % du total des dépenses d’allocation, soit un surcoût estimé entre 437 et 690 millions d’euros. « Un tel effort est considérable, reconnaît le parlementaire, et pourrait être mis en œuvre progressivement ».

En outre, en complément du « devoir d’insertion », Christophe Sirugue recommande de créer un véritable droit effectif à l’accompagnement pour les bénéficiaires du RSA, en mettant en place de nouvelles voies de recours pour leur permettre de faire valoir leurs droits.

Notes

(1) Voir ASH n° 2932 du 6-11-15, p. 7.

(2) Rapport disponible sur www.gouvernement.fr.

(3) Les dix minima sociaux visés : le revenu de solidarité active, l’allocation de solidarité aux personnes âgées, l’allocation aux adultes handicapés, l’allocation supplémentaire d’invalidité, l’allocation de solidarité spécifique, l’allocation veuvage, le revenu de solidarité outre-mer, la prime transitoire de solidarité, l’allocation temporaire d’attente et l’allocation pour demandeur d’asile.

(4) Voir ASH n° 2931 du 30-10-15, p. 38.

(5) Voir ASH n° 2936 du 4-12-15, p. 5.

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