A l’issue de la présentation en conseil des ministres du projet de loi « égalité et citoyenneté »(1), le Premier ministre a réuni, le 13 avril à Vaulx-en-Velin (Rhône), le comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté (CIEC), le troisième du genre après ceux des 6 mars et 26 octobre 2015(2). Quelques semaines auparavant, le gouvernement avait lancé une consultation numérique auprès des citoyens, les invitant à formuler des propositions d’actions concrètes notamment sur l’école, l’engagement et l’émancipation des jeunes, l’emploi et l’entrepreneuriat, et l’égalité réelle(3). « Les contributions qui ont été les plus plébiscitées ont ensuite été débattues et enrichies par une centaine d’acteurs (citoyens, partenaires institutionnels, membres associatifs) réunis en ateliers de travail » lors du CIEC, « avant d’être présentées directement aux ministres » qui s’en sont inspirés pour construire 20 nouveaux engagements, ont expliqué les services de Manuel Valls. Ces nouvelles mesures – dont la plupart étaient déjà connues – s’ajoutent aux 65 prises lors des deux premiers comités, dont 33 « ont rempli leur objectif », 29 sont en cours de déploiement et 3 viennent d’être lancées, a indiqué Matignon.
S’agissant de l’école, le gouvernement entend notamment « renforcer le lien » avec les parents d’élèves et « favoriser l’engagement actif » de ces derniers. Pour cela, il prévoit notamment de déployer 5 000 jeunes en service civique au sein du réseau de l’Education nationale pour faciliter les relations entre l’école et les parents d’élèves dans le premier degré. Et une nouvelle mallette des parents dédiée à la classe de 3e et au cycle 4 – qui correspond aux trois dernières années du collège – sera créée, ont annoncé les services du Premier ministre. En outre, « les caisses d’allocations familiales seront systématiquement associées au développement du volet parentalité des programmes de réussite éducative ». Par ailleurs, « pour donner aux élèves des quartiers les meilleures chances de réussite », au-delà du développement du plan numérique à l’école, des moyens supplémentaires seront mobilisés pour le programme « parcours d’excellence »(4), à hauteur de 12,5 millions d’euros, assure le gouvernement.
« L’insertion professionnelle, et notamment celle des jeunes diplômés résidant dans les quartiers prioritaires, doit être liée au mérite et au talent, et ne saurait être compromise par l’éloignement, le manque de relations, ou l’isolement », affirme Matignon. Les 8 400 jeunes diplômés de ces quartiers en recherche d’emploi vont donc être reçus d’ici à juin par Pôle emploi, a décidé le CIEC. Ils bénéficieront d’un accompagnement personnalisé « intensif » assuré par Pôle emploi et l’Association pour l’emploi des cadres et seront mis en relation avec des clubs de parrains issus du monde économique (réseaux de ressources humaines, chefs d’entreprise, hauts fonctionnaires…)(5).
L’Agence France entrepreneur(6), lancée opérationnellement le 13 avril, « accompagnera tous ceux qui désirent créer et développer leur entreprise, notamment dans les territoires fragiles où l’offre d’accompagnement et de financement est aujourd’hui insuffisante », ont également indiqué les services de Manuel Valls.
Le chef du gouvernement a aussi rappelé que, conformément à une décision prise lors du précédent comité interministériel, une campagne de « testing » à l’embauche – consistant à simuler des situations réelles pour identifier de possibles pratiques discriminatoires – venait d’être lancée auprès d’une quarantaine d’entreprises de plus de 1 000 salariés. « Les résultats seront publiés en septembre », a-t-il précisé.
Par ailleurs, pour soutenir l’économie sociale et solidaire en outre-mer, le CIEC a acté le lancement d’un « grand appel à projets, doté de 25 millions d’euros, visant à financer, jusqu’à 100 000 €, des projets innovants, en phase avec les enjeux propres de promotion de l’égalité et de la citoyenneté ».
Pour promouvoir l’engagement des jeunes de l’école à l’université, « un livret citoyen sera remis, à l’occasion d’une cérémonie républicaine de fin de scolarité commune ». Son contenu constituera le socle initial du compte engagement citoyen ouvert dès 16 ans, que le projet de loi « travail » prévoit d’intégrer au compte personnel d’activité(7). De plus, au sein des formations supérieures, « les compétences, connaissances et aptitudes acquises par les étudiants à l’occasion d’un engagement bénévole ou d’un engagement en service civique seront obligatoirement validés ».
Pour mieux coordonner et évaluer les politiques en faveur de la jeunesse, « un Conseil national d’orientation des politiques de jeunesse sera prochainement créé auprès du Premier ministre », a par ailleurs décidé le CIEC. Et la prise en compte de la « priorité jeunesse » dans les politiques publiques sera renforcée à travers l’instauration systématique d’une « clause d’impact jeunesse » accompagnant les nouveaux textes législatifs et réglementaires.
Parce que, selon le Premier ministre, « six millions de nos compatriotes ne sont pas à l’aise avec notre langue », le gouvernement a décidé de créer « une Agence de la langue française pour la cohésion sociale » qui aura pour mission de traiter les questions liées à l’illettrisme et à l’amélioration de la maîtrise de la langue. Une mission de préfiguration a été chargée d’étudier notamment les modalités administratives, juridiques et financières de fonctionnement de la future structure et doit rendre son rapport au plus tard le 15 septembre prochain. « Dans les cinq ans qui viennent, toutes celles et ceux qui éprouvent des difficultés dans le maniement de notre langue pourront ainsi trouver la formation ou le projet qui leur permettra de les dépasser », a expliqué Manuel Valls.
Enfin, en matière d’accès à la culture, le gouvernement veut multiplier les jumelages entre les équipements culturels et les quartiers prioritaires, « déjà très actifs ». Dans ce cadre, « 11 fédérations d’éducation populaire, qui regroupent des centaines d’associations locales, signeront de nouvelles conventions d’objectifs et de moyens avec le ministère de la Culture, afin de pérenniser leur action sur trois ans ».
(4) Ce programme a pour objectif de conduire des jeunes de milieux modestes vers une poursuite d’études ou une insertion professionnelle, en leur proposant une offre de coaching collectif et de visites culturelles dès la classe de 3e, puis un suivi individualisé tout au long de leur scolarité au lycée, quelle que soit la filière choisie.
(5) Sur les consignes récentes en faveur du développement du parrainage, voir ASH n° 2955 du 8-04-16, p. 44.