Près de trois ans après avoir été présenté en conseil des ministres en juillet 2013(1) et après avoir été délesté en juin 2015 de près de la moitié de ses articles par lettre rectificative pour pouvoir être débattu plus rapidement par le Parlement(2), le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a enfin été définitivement adopté le 7 avril. Sans revenir sur les principes fondateurs du statut général de la fonction publique, le texte complète la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Il consacre certaines valeurs qui fondent l’action des agents publics, comme l’obligation de neutralité, le respect du principe de laïcité et le fait pour le fonctionnaire d’exercer ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité. Les dispositifs applicables en matière de déontologie sont également renforcés, notamment avec la création de la fonction de « référent déontologue », dont la mission sera d’apporter aux agents tout conseil utile au respect des principes déontologiques. Les principaux points d’achoppement qui opposaient députés et sénateurs, tels que l’inscription dans la loi d’un devoir de réserve ou l’instauration de trois jours de carence en cas d’arrêt maladie, ont été retirés. Le point sur quelques-unes des mesures qui ont été retenues, sous réserve d’une saisine du Conseil constitutionnel.
Depuis la loi « Sauvadet » du 12 mars 2012(3), les agents contractuels peuvent, sous certaines conditions, bénéficier de la transformation de leur contrat à durée déterminée (CDD) en contrat à durée indéterminée (CDI). Ils doivent notamment avoir été employés en CDD pendant au moins six ans au sein de la même administration. En matière de calcul de cette ancienneté, la loi « Sauvadet » n’a pas pris en compte la situation des agents recrutés par une succession de contrats à durée déterminée par des personnes morales de droit public distinctes, alors même que ces agents ont occupé pendant plusieurs années le même poste de travail. La loi « déontologie » complète donc la loi « Sauvadet » et prévoit que lorsque cette ancienneté a été accomplie auprès de différents employeurs, la transformation du CDD en CDI doit être proposée par la personne morale qui emploie l’agent à la date de publication de la loi. En outre, le bénéfice de cette ancienneté est également conservé aux agents des fonctions publiques territoriale et hospitalière qui, bien que rémunérés successivement par des personnes morales de droit public distinctes, continuent de pourvoir le poste de travail pour lequel ils ont été recrutés.
Par ailleurs, la loi sécurise juridiquement les cas où un agent refuse de signer un avenant visant à transformer son CDD en CDI. Désormais, l’agent n’est pas considéré comme démissionnaire de toute relation contractuelle avec l’administration, mais doit être regardé comme refusant de poursuivre la relation contractuelle aux nouvelles conditions. Et il est maintenu en fonction jusqu’au terme de son contrat à durée déterminée en cours.
En outre, le plan de titularisation de la loi « Sauvadet », qui vise à permettre l’accès au statut de fonctionnaire des agents contractuels des trois versants de la fonction publique, initialement d’ici à 2016, est prolongé jusqu’en 2018.
La loi consacre le recrutement sans concours des fonctionnaires de catégorie C. Ces derniers peuvent ainsi être recrutés sans concours lorsque le grade de début est doté de l’échelle de rémunération la moins élevée de la fonction publique et, le cas échéant, selon des conditions d’aptitude prévues par les statuts particuliers.
Par ailleurs, la loi prévoit que, dans les filières sociale, médico-sociale et médico-technique relevant de la fonction publique territoriale, les concours externes, les concours internes et le troisième concours(4) et les concours et examens professionnels de promotion interne et d’avancement de grade peuvent être organisés sur épreuves ou consister en une sélection opérée par le jury au vu soit des titres, soit des titres et travaux des candidats. Cette sélection est complétée par un entretien oral avec le jury et, le cas échéant, par des épreuves complémentaires.
La loi met fin à l’imprescriptibilité de l’action disciplinaire. Ainsi, à l’avenir, aucune procédure disciplinaire ne pourra être engagée au-delà d’un délai de trois ans à compter du jour où l’administration aura eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits passibles de sanction. En cas de poursuites pénales exercées à l’encontre du fonctionnaire, ce délai sera interrompu jusqu’à la décision définitive de classement sans suite, de non-lieu, d’acquittement, de relaxe ou de condamnation. Passé ce délai et hormis le cas où une autre procédure disciplinaire aura été engagée à l’encontre de l’agent avant l’expiration de ce délai, les faits en cause ne pourront plus être invoqués dans le cadre d’une procédure disciplinaire.
(4) Il s’agit des concours ouverts aux candidats justifiant de l’exercice, pendant une durée déterminée, d’une ou plusieurs activités professionnelles ou d’un ou de plusieurs mandats de membre d’une assemblée élue d’une collectivité territoriale ou d’une ou de plusieurs activités en qualité de responsable d’une association.