Pas si fou. Quand un village accueille le handicap psychique
Lætitia Delhon – Ed. Presses de l’EHESP – 15 €
Pour Alain-Paul Perrou, directeur de l’ESAT (établissement et service d’aide par le travail) de Mézin (Lot-et-Garonne), l’une des clés du management, c’est « simplement être juste et autoriser aux salariés ce que je m’autorise à moi. Je suis très exigeant avec eux parce que je le suis d’abord avec moi-même ». L’autre point important, selon lui, est la disponibilité : « La politique de la porte fermée, c’est le pire. » Dans un livre d’entretien réalisé par Lætitia Delhon, journaliste spécialisée dans le travail social, ce personnage – défini comme « un meneur de troupe, un tourbillon de vie, un bon vivant qui n’aime rien tant que le partage, l’esprit d’équipe, la fête et les bonnes bouffes » – précise qu’il utilise l’humour dans sa « gestion des ressources humaines », car « si on occulte les moments de rire et de partage, nous finirons par déshumaniser nos établissements ». Pas si fou raconte à la fois l’histoire de ce manager pas comme les autres, mais aussi la genèse de l’établissement de Mézin. En 1988, Alain-Paul Perrou – qui fut moniteur-éducateur, éducateur spécialisé puis directeur d’un ITEP (institut thérapeutique, éducatif et pédagogique) – est sollicité par l’édile du village qui l’a vu grandir pour gérer un établissement médico-social. Celui qui a « une idée à la seconde » a alors un projet « original, incongru », mais au final plein de bon sens : permettre aux personnes souffrant de troubles psychiques qui « végètent à l’hôpital » de réintégrer la société en revitalisant l’économie du bourg. Il faudra du temps pour que le projet aboutisse et devienne, à son ouverture en 1993, le centre d’aide par le travail (CAT) de Mézin, avec trois premiers usagers. Aujourd’hui, l’ESAT, géré par l’association L’Essor, accompagne 70 personnes « tout à la fois travailleurs, citoyens, habitants et clients du village », qui proposent des services allant de la tonte de pelouse à la blanchisserie, en passant par la gestion de la station-service reprise en 2015.