Ils seraient d’incorrigibles nomades incapables de s’intégrer, d’inquiétants apatrides, des mendiants professionnels, des voleurs de poules par atavisme… « Ils », ce sont ces Roms installés sur le Vieux Continent « bien avant que ne soient fondés la plupart des Etats européens modernes », et que l’on ne cesse pourtant d’accabler de tous les maux. Des clichés qui ont la vie dure et auxquels Jean-Pierre Dacheux, grand spécialiste de la question rom en Europe, entreprend de s’attaquer dans un ouvrage clair et argumenté. Dépasser la dangereuse ignorance de l’autre, de sa culture et de son histoire, c’est ce que nous propose ce précieux petit guide de lutte contre les préjugés. L’auteur montre ainsi à quel point l’esprit de résistance d’un « peuple sans terre, maltraité, méconnu » et la « volonté de maintenir une identité collective » sont des éléments essentiels à prendre en compte « si l’on veut appréhender le présent sans préjugé ». Changer de regard ou faire un simple pas de côté permet, par exemple, de comprendre ce rapport tout à fait singulier des Roms à la terre, une « relation […] de simple usufruit » difficilement conciliable avec la notion de propriété privée mentionnée dans la Déclaration des droits de l’Homme. Pour certains Roms, « la maison est le tombeau des vivants », nous dit Jean-Pierre Dacheux. Peuple de « promeneurs »et d’habitants de la terre plutôt que de « migrants », d’autochtones à contre-courant de la mondialisation, hommes et femmes dont l’insoumission et le besoin de liberté devraient être sources de réflexion et non de stigmatisation, citoyens de seconde zone et non apatrides… Ce qu’on dit des Rromsdémonte une à une les constructions fausses accumulées au fil du temps et qui resurgissent avec force dans les périodes de crise. « Les Rroms sont des marqueurs de l’espace européens », explique Jean-Pierre Dacheux et « il n’y aura pas d’Europe possible sans la reconnaissance effective de leur spécificité en tant que peuple »…
Ce qu’on dit des Rroms (et ce qu’il faut savoir)
Jean-Pierre Dacheux – Ed. Le Passager clandestin – 7 €