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Réforme des diplômes : et maintenant ?

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Après le plan d’action en faveur du travail social et le mandat qui vient d’être confié à la commission professionnelle consultative du travail social et de l’intervention sociale, une question demeure : jusqu’où simplifier les diplômes ?

Si le gouvernement a écarté l’idée de parvenir à un diplôme par niveau de qualification et confié une nouvelle mission à la commission professionnelle consultative du travail social et de l’intervention sociale (CPC), en vue notamment de définir le contenu du corpus commun de compétences, il n’a sûrement pas clos les débats autour de la simplification des diplômes(1). Entre des professions ultraspécialisées et un travailleur social unique, où placer le curseur ? Plusieurs participants à la journée organisée le 29 janvier dernier par le Conservatoire national des archives et de l’histoire de l’éducation spécialisée (Cnahes) se sont exprimés sur le sujet.

« Le mythe d’un travailleur social unique ne me convainc pas, relève ainsi Christine Garcette, formatrice en travail social. En revanche, si les différences entre professions n’évoluent pas en guerres de territoires corporatistes et permettent une complémentarité dans l’intérêt des publics, pourquoi pas ? A condition, toutefois, de continuer à progresser dans une meilleure connaissance et reconnaissance mutuelle et de veiller à une plus grande lisibilité des métiers. » Même prudence chez Jean-Louis Segara, éducateur spécialisé et psychologue clinicien : « Pourquoi pas aller vers des troncs communs qui peuvent permettre davantage de transversalité, mais conservons nos métiers : l’éducateur n’est ni un animateur ni un agent de développement ! »

Au contraire, pour Patrick Dubéchot, sociologue et démographe, l’heure n’est plus à la demi-mesure. S’appuyant sur deux enquêtes sur l’activité des professionnels du secteur social auxquelles il a participé entre 1999 et 2002(2), il montre que, déjà à cette époque, l’analyse du faisceau d’activités d’un éducateur spécialisé en milieu ouvert ressemble beaucoup à celui d’une assistante sociale mais est assez différent de celui d’un éducateur spécialisé en établissement. « Plutôt que le mythe du travailleur social unique, c’est le mythe de la spécificité des métiers qu’il faudrait interroger, estime-t-il un brin provocateur. Les frontières entre métiers du social étant extrêmement poreuses, une reconfiguration complète de l’architecture des diplômes dans le sens des propositions de la commission professionnelle consultative de décembre 2014 – un diplôme par niveau de qualification – aurait été bienvenue. Mais il a suffi qu’un noyau conservateur s’y oppose pour que le gouvernement fasse machine arrière avec le rapport “Bourguignon”. C’est dommageable car la question va revenir… »

À pas de fourmi

Lui aussi favorable à une simplification importante du système de formation, Manuel Pélissié, directeur général de l’institut régional du travail social (IRTS) Paris-Ile-de-France et vice-président de la CPC, dénonce le nombre de diplômes du travail social en France : « Treize pour le seul ministère des Affaires sociales[3], c’est incompréhensible ! On avance à pas de fourmi alors qu’il faudrait y mettre fin rapidement », déplore-t-il. Selon lui, néanmoins, « l’idée d’un travailleur social unique n’est pas voulue par les employeurs et, en ce sens, le rapport “Bourguignon” doit être lu comme un compromis destiné à apaiser les esprits. Quant au plan d’action en faveur du travail social et à la lettre de mission de la CPC, ils constituent un pas en avant en proposant une méthode générale pour parvenir à un schéma directeur global pour les formations sociales. Reste qu’il est trop tôt pour savoir si la réforme des diplômes ira assez loin. » Celle-ci s’annonce d’ailleurs particulièrement complexe, puisqu’elle doit concilier le respect du cahier des charges des grades universitaires et la préservation de la dimension professionnalisante des diplômes.

Peut-on s’inspirer du modèle suisse pour dégager des pistes d’évolution comme le propose Philippe Fabry, formateur à l’IRTS Paris-Parmentier ? Celui-ci fonctionne avec un tronc de formation commun aux éducateurs spécialisés, aux assistants de service social et aux animateurs sociaux : « En première année, les étudiants suivent des cours sur le travail social et réalisent un stage de découverte commun aux trois métiers ; en deuxième année, ils suivent un cursus partagé avec en complément une spécialisation par famille professionnelle ; en troisième année, les trois professions se retrouvent dans des modules d’approfondissement intersites (dans toute la Suisse romande) sur des thématiques de recherche associant terrains, hautes écoles et universités. »

Notes

(1) Comme le montrent notamment les réactions de la CGT et de FO, après la réunion de la CPC du 23 février – Voir ASH n° 2950 du 4-03-16, p. 13.

(2) Qui ont donné lieu à deux publications : Les mutations du travail social, dynamiques d’un champ professionnel – Sous la direction de Jean-Noël Chopart – Ed. Dunod, 2000 ; Contrat d’étude prospective sur la branche sociale et médico-sociale à but non lucratif – Rapport du Crédoc/Lerfas, pour le compte de la DGEFP, de la DGAS, de l’Unifed, de Promofaf et Uniformation – 2002.

(3) Et non plus 14, avec la fusion du DEAVS, du DEAMP et de la fonction d’accompagnant des élèves en situation de handicap au sein du diplôme d’Etat d’accompagnant éducatif et social (DEAS) – Voir ASH n° 2946 du 5-02-16, p. 43.

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