Lors de la journée internationale des droits des femmes du 8 mars, le président de la République et la ministre des Droits des femmes, Laurence Rossignol, ont installé le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCEFH) dans sa nouvelle composition(1). L’occasion pour l’instance, qui entame sa deuxième mandature (2016-2019), de présenter son premier rapport d’activité et de formuler quelques recommandations. Certaines d’entre elles ont d’ailleurs retenu l’attention de François Hollande, qui en a aussi profité pour annoncer un certain nombre de mesures en faveur des familles en difficulté et des femmes victimes de violences, reprises et précisées le lendemain par Laurence Rossignol en conseil des ministres.
Parmi les recommandations du HCEFH, François Hollande en a retenu surtout une et entend la mettre en œuvre : pérenniser l’instance en l’inscrivant dans la loi. Et, du point de vue de sa présidente, Danielle Bousquet, « un rattachement fonctionnel exclusif auprès du Premier ministre aurait tout son sens eu égard à la transversalité [du] domaine d’expertise [du Haut Conseil] et faciliterait [son] fonctionnement quotidien ». Elle juge aussi « souhaitable qu’il y ait une juste adéquation entre les missions confiées à [l’instance] et les moyens humains et financiers dévolus pour y répondre ».
Plus largement, la présidente du Haut Conseil demande au gouvernement d’augmenter le budget alloué à la politique de l’égalité femmes-hommes. En effet, explique-t-elle, avec 26 millions d’euros, le budget du ministère chargé des droits des femmes « demeure toujours, et sans conteste, le plus petit budget de l’Etat ». Si l’on ajoute les contributions de divers ministères impliqués dans les politiques d’égalité, le gouvernement mobilise au total 180 millions d’euros par an, une enveloppe qui reste pour autant « largement insuffisante tant au regard des besoins des personnes concernées que de l’ampleur des inégalités entre les sexes et du travail sur les mentalités qu’elle implique », estime Danielle Bousquet.
Le chef de l’Etat en est par ailleurs convaincu : l’amélioration de l’égalité entre les femmes et les hommes passera aussi par le – très contesté – projet de loi réformant le droit du travail, qui vient de faire l’objet de « corrections » de la part du gouvernement (voir ce numéro, page 10) et qui doit être présenté en conseil des ministres le 24 mars.
Reprenant une proposition de François Hollande, Laurence Rossignol a indiqué, lors du conseil des ministres du 9 mars, qu’elle entendait développer les crèches à vocation d’insertion professionnelle, afin de soutenir les familles précaires. Une mesure récemment préconisée par le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale(2). La ministre a aussi rappelé qu’elle avait lancé des expérimentations de solutions de répit pour les familles monoparentales(3).
Toujours en soutien des familles précaires, la ministre a aussi annoncé qu’une réflexion allait être menée avec la chancellerie sur la simplification de la procédure de fixation et de recouvrement des pensions alimentaires. Sur ce dernier point, François Hollande avait indiqué, la veille, qu’« une agence de recouvrement des pensions alimentaires »allait être créée, afin de s’assurer que les fonds recouvrés soient effectivement utilisés en faveur des femmes privées de leurs droits.
Parce que la lutte contre les violences faites aux femmes est une « exigence », le président de la République a par ailleurs déclaré vouloir « faire en sorte que toutes les victimes puissent se déclarer comme telles et favoriser la judiciarisation »de ces actes. Dans le cadre particulier des violences conjugales, François Hollande entend « mieux prendre en compte l’antériorité des violences », faisant ainsi référence à l’affaire « Jacqueline Sauvage », cette femme condamnée par la cour d’assises à dix ans de prison pour le meurtre de son époux qui la battait depuis plusieurs décennies, et partiellement graciée par le chef de l’Etat. C’est dans cet objectif que la députée (LR) des Bouches-du-Rhône, Valérie Boyer, a, le 8 mars, déposé une proposition de loi visant à faciliter la reconnaissance de l’existence d’un « syndrome de la femme battue » ou d’un phénomène d’emprise du conjoint violent et, par là, permettre aux juridictions de prononcer l’irresponsabilité pénale de la victime ou une atténuation de celle-ci. Issu de l’opposition, ce texte a peu de chance d’aboutir mais des députés de la majorité pourraient s’en inspirer. Des amendements, en cours de préparation, pourraient ainsi être introduits dans le « projet de loi sur la Justice du xxie siècle », actuellement discuté au Parlement(4).
Du côté de la prise en charge des femmes victimes, le chef de l’Etat le reconnaît : ses services n’ont pas encore réussi à créer les 1 650 places d’hébergement d’urgence promis au début du quinquennat. « Nous y sommes presque, a-t-il assuré, mais pas encore dans les structures spécialisées. » Il a également rappelé son attachement à la médiation familiale pour les cas de séparation difficile et l’exercice du droit de visite dans des conditions apaisées.
(1) Ses membres ont en effet été renouvelés en janvier dernier pour un nouveau mandat de trois ans.
(3) Voir le « Questions à » paru dans les ASH n° 2944 du 22-01-16, p. 14.
(4) Le texte devrait être débattu à l’Assemblée nationale en mai prochain. Sur ses grandes lignes, voir ASH n° 2874 du 12-09-14, p. 11.