Désengagement financier de l’Etat ou erreurs de gestion : les raisons à l’origine de la situation financière difficile dans laquelle se trouve l’association Sida info service (SIS) et qui l’a conduit, le 23 février, à déposer une déclaration de cessation de paiement et une demande de mise en redressement judiciaire auprès du tribunal de grande instance (TGI) de Paris, ne sont pas du même ordre selon que l’on se place du côté de la direction ou des élus du comité d’entreprise. Dans un communiqué diffusé le 26 février, la première explique en effet être « confrontée à une réduction drastique des subventions publiques, qui représentent la quasi-totalité de ses ressources et sont passées de 7,5 millions d’euros en 2006 à 5 millions d’euros en 2015 ». Des difficultés qui auraient été aggravées en ce début d’année en raison du retard du premier versement de la subvention attribuée par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) dans le cadre d’une convention renouvelée chaque année.
Réagissant à la déclaration de cessation de paiement, François Bourdillon, le directeur général de l’INPES, a indiqué le 27 février – également par voie de communiqué – que, lors de son conseil d’administration du 9 décembre dernier, l’INPES avait « voté le renouvellement à l’identique de la subvention pour 2016, d’un montant de 5 millions d’euros [et que] 30 % de cette subvention, soit 1,5 million d’euros, ont été versés à l’association, cette semaine ». L’annonce de ce versement – qui est arrivé dans les caisses de l’association le 1er mars et a permis de régler les salaires de février, jusqu’alors en attente – ne remet cependant pas en cause la démarche engagée auprès du TGI, comme l’explique Patrice Gaudineau, directeur général de Sida info service : « Il s’agit de soutenir un plan de continuation pour l’association, à bâtir avec le soutien de l’Etat. Avec le président [de SIS] Gérard Desborde, nous demandons depuis huit ans la mise en place d’une convention pluriannuelle pour garantir une visibilité aux salariés, qui sont dans une situation de stress ». Une dernière affirmation que les élus du CE ne contrediront pas. Pour autant, leur analyse des difficultés financières de leur employeur est tout autre. « Cela fait deux ans que la subvention de l’INPES est de 5 millions d’euros et lorsqu’une baisse est prévue elle est annoncée un an avant, témoigne la secrétaire du CE. Et contrairement à ce qui a été dit [par la direction], l’Etat nous a toujours soutenus. Depuis 2013 déjà, nous pointons les difficultés et faisons part de nos inquiétudes. » Le CE a d’ailleurs diligenté un rapport d’expertise externe dont les conclusions, transmises en novembre à la direction et aux administrateurs, ont mis en évidence des « erreurs de gestion », selon la représentante du personnel, précisant avoir également alerté le ministère de la Santé et l’inspection générale des affaires sociales (IGAS). « Dès qu’il a eu connaissance [de ce rapport], le ministère a confié à [l’IGAS] une mission d’audit, répondant ainsi à une demande de l’association »(1), indique pour sa part François Bourdillon dans son communiqué, signalant que cette mission, « actuellement en cours », rendra ses conclusions prochainement. François Bourdillon ajoute, par ailleurs, que « la procédure judiciaire engagée ne conduit pas à la fermeture de l’association SIS [mais] vise au contraire à proposer des solutions de redressement ». Avant d’insister sur « la nécessité d’assurer la continuité du service essentiel rendu par l’association SIS ». Pour cela, « les solutions et les pistes seront examinées avec l’administrateur, à la lumière du rapport de l’IGAS, quand il sera finalisé ».
Le TGI de Paris a pour sa part mis sa décision en délibéré jusqu’au 10 mars. Un plan social est-il à craindre ? Oui, selon la représentante du CE qui a indiqué aux ASH que la présidente du TGI, lors de la lecture de la demande de cessation de paiement au cours de l’audience qui s’est tenue le 25 février, a fait mention d’un plan social qui pourrait concerner 37 des 83 salariés du siège. Une affirmation réfutée par Patrice Gaudineau, brandissant l’obligation de confidentialité de l’audience. « Aujourd’hui, ce que l’on demande c’est que l’on arrête de tirer sur l’ambulance : le budget alloué est bien utilisé », se défend-il, en saluant le travail réalisé par les écoutants de l’association.
(1) Le président de l’association a demandé un audit de l’IGAS le 12 décembre 2015.