Le ministère du Logement et l’Assemblée des départements de France (ADF) ont rendu publique une étude qu’ils ont lancée ensemble à la fin 2013 pour répondre au souhait d’un ensemble de partenaires (collectivités, Etat, associations, bailleurs…) de disposer d’un bilan approfondi des fonds de solidarité pour le logement (FSL), de leurs interventions, de leur financement et de leur gouvernance(1). Une étape jugée indispensable pour une réflexion collective sur les évolutions souhaitables. Les conclusions de cet état des lieux – réalisé par le cabinet d’études Ville et Habitat – mettent notamment l’accent sur la pression et les attentes importantes sur un dispositif « victime de son succès ».
Créés par la loi du 31 mars 1990 relative à la mise en œuvre du droit au logement, les FSL ont connu de multiples évolutions sous l’effet de leur décentralisation en 2005, de la refondation du secteur de l’accueil, de l’hébergement et de l’insertion ou bien encore de la massification des situations de pauvreté et d’exclusion sociale. Destinés à l’origine à accorder des aides financières ou à proposer un accompagnement spécifique aux personnes et aux familles éprouvant des difficultés pour accéder à un logement ou pour s’y maintenir, ils financent aujourd’hui, également, des aides pour le paiement des « fluides » (énergie, eau, téléphone) ou bien encore des mesures d’accompagnement social des ménages – centrées sur le logement – et de gestion locative adaptée. Avec environ 340 millions d’euros engagés par an au niveau national, ils jouent un rôle majeur à l’égard des publics concernés et font l’objet d’une reconnaissance forte par les différents partenaires. Ils sont d’un poids relativement modeste au regard des aides personnelles au logement, mais significatif pour un dispositif social complémentaire. « Les FSL sont devenus tellement incontournables qu’on ne peut plus faire sans eux. »
Problème : là où ils devraient avoir un effet levier pour résoudre une bonne fois pour toutes des difficultés de logement, « ils sont pour une grande part devenus un dernier rempart qui permet de maintenir à bout de bras des situations de précarité sociale », sans que la cause de la difficulté de logement ne soit traitée ou même parfois identifiée. « On attend de plus en plus d’eux qu’ils rattrapent les écarts relatifs à l’augmentation des loyers et au coût de l’énergie tandis que les aides personnelles au logement stagnent et la pauvreté s’accentue », explique l’étude. D’une certaine manière, les filets de sécurité que sont les minima sociaux, les aides personnelles au logement ou les tarifs sociaux de l’énergie ne jouent plus leur rôle protecteur et « on observe des effets de report sur les FSL » (dont les bénéficiaires sont, en majorité, bénéficiaires également des minima sociaux). Ces constats « interrogent sur l’efficacité et le calibrage des minima sociaux et de perte d’efficience des aides redistributives de droit commun ». Pour les auteurs du rapport, il convient de réaffirmer la fonction de dernier recours des FSL et cela implique une réflexion plus globale sur les dépenses de logement et la solvabilisation des ménages pauvres. Il s’agit notamment de « s’interroger à la fois sur le calibrage des FSL, mais aussi par exemple sur l’efficacité des premières tranches du barème [des aides au logement], la non-prise en compte de l’augmentation des coûts de l’énergie dans le forfait charge, l’évolution des tarifs sociaux de l’énergie, etc. ».
Il existe également, pour les auteurs de l’étude, un enjeu d’ouverture des critères d’octroi à un public plus large que les bénéficiaires des minima sociaux, sans exclure ceux-ci. Comment répondre aux besoins des publics fragiles « à la limite des plafonds » – exclus du bénéfice des aides du FSL – alors même que l’efficacité pourrait être plus forte pour eux au regard de la possibilité de construire une solution pérenne de logement ?
Dans une lettre commune adressée aux préfets, le ministère du Logement et l’ADF indiquent que ce rapport d’analyse est la « première étape d’un objectif plus large et ambitieux » : celui de conduire, avec les représentants de l’Etat, une réflexion collective sur le devenir des FSL, « dans un contexte évolutif marqué par les contraintes pesant sur les finances départementales, les conséquences de l’adoption de la loi NOTRe et l’émergence de l’échelon métropolitain ».
(1) Rapport disponible sur