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Une loi jugée insatisfaisante

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Bon nombre de voix demandent aujourd’hui que soit modifiée la loi afin de faciliter l’accès aux origines des enfants nés sous le secret. Mais le gouvernement reste très prudent.

Après des années de pratique, l’accouchement « sous X » (ou accouchement sous le secret) est entré dans le code civil avec la loi du 8 janvier 1993. Selon l’article 341, « lors de l’accouchement, la mère peut demander que le secret de son admission et de son identité soit préservé ». La loi du 5 juillet 1996 relative à l’adoption a ouvert une première brèche dans la culture du secret : elle rend celui-ci réversible en donnant la possibilité au père et/ou à la mère de laisser leur identité auprès des services sociaux et elle organise la communication par les parents d’éléments non identifiants. Toutefois, faute de décrets d’application, ces dispositions sont restées lettre morte jusqu’à la loi du 22 janvier 2002. Sous la pression des personnes « nées sous X », celle-ci s’efforce de mieux concilier les intérêts divergents de la femme et de l’enfant : elle facilite à la fois l’accès à leurs origines des personnes concernées tout en maintenant la possibilité pour une femme d’accoucher dans l’anonymat dans le cadre d’une pratique encadrée.

Cependant, pour les associations de personnes recherchant leurs origines, qui militent pour la levée de l’anonymat, ce texte ne va pas assez loin. « Les personnes nées sous le secret sont condamnées à une double peine : non seulement elles sont abandonnées à la naissance, mais elles resteront toute leur vie sans réponses. Pour se construire, c’est terrible et cela condamne aussi la génération d’après », estime Graciane, présidente des « X en colère ». « Le secret est un “tueur éducatif” », affirme également Roland Willocq, représentant de la Fédération nationale des associations départementales d’entraide des personnes accueillies en protection de l’enfance (Fnadepape), membre du Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP)(1). La présidente de l’association « Les mères de l’ombre »(2), Fanny Hammouche, a même déclaré, lors de son audition par le CNAOP en 2014, qu’elle souhaitait que « les mères de naissance soient obligées de laisser leur identité dans le dossier de l’enfant ».

En 2011, après avoir été chargée par le Premier ministre d’un rapport sur la question, la députée (LR) Brigitte Barèges dépose une proposition de loi visant « la levée de l’anonymat » et « l’organisation de l’accouchement secret », afin de sortir de « la confusion entre anonymat et confidentialité »(3). La mère déclinerait son nom au moment de l’accouchement, mais pourrait toujours demander que son identité soit tenue secrète jusqu’aux 18 ans de l’enfant. Comportant un article unique, cette proposition de loi n’a jamais été examinée.

Tenir compte du temps

En 2014, le rapport du groupe de travail « Filiation, origines et parentalité »(4), présidé par Irène Théry, propose aussi d’aller plus loin dans l’équilibre entre les droits et besoins de l’enfant et les droits de la mère. Il recommande de garantir le secret de l’accouchement et de l’identité de la mère de naissance pendant 18 ans : son anonymat de même que sa vie privée seraient protégés, y compris si l’enfant venait à demander la communication de son identité. En revanche, à 18 ans, l’enfant pourrait, s’il le souhaite, connaître de droit l’identité de sa mère de naissance, obligatoirement recueillie à la naissance, tout comme des éléments non identifiants (qui pourraient, eux, être accessibles avant 18 ans). « Le temps de la naissance et de l’abandon et celui de la recherche des origines et parfois des retrouvailles sont par définition, au sein d’une vie, des temps profondément différents », argumente Irène Théry, qui souhaite inscrire l’accouchement « sous X » dans la temporalité.

Toutefois, pour Laurence Rossignol, ministre chargée de la famille, « la prudence est nécessaire ». Lors d’une séance plénière du CNAOP en octobre 2014(5), elle a ainsi déclaré qu’il n’était « pas nécessaire de légiférer maintenant », au motif que tous les effets de la loi de 2002 n’avaient pas encore pu être mesurés. Pour elle, il convient « d’abord de s’attacher à mieux connaître les pratiques et à les améliorer dans le sens d’un meilleur accompagnement des mères, ce dans leur intérêt et dans celui de l’enfant ».

Notes

(1) Si son objectif essentiel est de faciliter l’accès aux origines personnelles, le CNAOP est aussi une instance délibérative sur les questions relatives à la recherche des origines et compte pour cela 16 membres. Outre le président André Nutte, chef de l’inspection générale des affaires sociales honoraire, il réunit des magistrats, des représentants des ministères, de l’Assemblée des départements de France, une personnalité du monde professionnel et six représentants d’associations défendant les droits des personnes à la recherche de leur origine, des femmes, des familles d’adoption.

(2) L’AMO a été créée en juin 1998 afin d’aider les mères de naissance désireuses de lever le secret sur leur identité et d’établir des contacts avec leur enfant et sa famille adoptive.

(3) Voir ASH n° 2737 du 16-12-11, p. 25.

(4) Avril 2014 – Disponible sur www.ladocumentationfrancaise.fr.

(5) Rapport d’activité 2014 du CNAOP – Disponible sur www.cnaop.gouv.fr.

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