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La CNAPE veut déjudiciariser la réponse à certains actes commis par les mineurs

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Elle avait déjà lancé l’idée dans sa « plateforme politique » adressée en 2012 aux candidats à l’élection présidentielle. Au terme de plus de deux ans de travaux pour faire aboutir sa réflexion, la Convention nationale des associations de protection de l’enfant (CNAPE) rend publiques ses propositions pour créer des réponses extrajudiciaires aux premiers actes de faible gravité commis par les mineurs(1).

Pour la fédération, « il est indispensable d’opposer une réponse immédiate et claire dès le premier acte posé », une réponse qui doit « être éducative et revêtir un fort contenu pédagogique ». Aujourd’hui, « aucune étude scientifique ne démontre que le durcissement du droit et la peur de la sanction permettent de lutter efficacement contre la délinquance et la récidive », constate la CNAPE, s’interrogeant sur la pertinence de la saisine de la justice pour certaines infractions commises par les mineurs et sur la « pertinence éducative et pédagogique » du rappel à la loi, figurant en bonne place parmi les mesures alternatives aux poursuites, part importante des réponses judiciaires apportées aux premiers actes de délinquance des mineurs. Outre le désengorgement des juridictions, estime la fédération, la déjudiciarisation de certains actes permettrait un gain de temps pour y répondre, au juge de se recentrer sur « son cœur de métier » et à la justice de retrouver « crédibilité et légitimité ». Autre enjeu : anticiper la fixation d’un âge de responsabilité pénale dans le cadre de la réforme toujours attendue de la justice pénale des mineurs. Reste que dans la dernière mouture du texte validée par l’ancienne garde des Sceaux, la détermination de ce seuil, recommandée par la Convention internationale des droits de l’enfant, n’a pas été retenue. Et depuis le remaniement ministériel, l’avenir de la réforme reste très incertain.

Le dispositif proposé par la CNAPE concernerait notamment les actes entrant dans la catégorie des « contraventions de cinquième classe », telles les insultes, injures, dégradations de biens… Il ne devrait pas remettre en cause la spécificité de la justice des mineurs, ni entraîner la disparition de certaines mesures alternatives aux poursuites, notamment la mesure de réparation pénale, insiste la fédération. Il serait en outre assorti de garanties : les actes pouvant faire l’objet d’une réponse extrajudiciaire seraient prévus par une loi et le procureur de la République serait le garant du dispositif (il vérifierait les conditions de son utilisation, serait informé de son déroulement et en serait la porte d’entrée en cas de plainte). Ce type de réponse impliquerait l’accord préalable de l’auteur et de la victime et favoriserait une approche globale des difficultés du mineur (santé, scolarité, relations familiales, insertion sociale…) ainsi que la participation de ses parents.

Pilotage par les maires

Si la question de l’autorité compétente pour le gérer a suscité de nombreux débats, la CNAPE, « bien que très réticente quant à l’esprit, à la finalité et aux dispositions de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance », a opté pour un pilotage par le maire – ou l’exécutif communal –, apparu, dans le cadre de ses compétences d’action sociale et de politique de la ville, comme l’acteur de proximité le plus à même « de mobiliser l’ensemble des acteurs dans un cadre transversal et pluridisciplinaire ». Mais ce pilotage ne pourra être exercé qu’« à condition que soit affirmée la dimension éducative et sociale des actions » et que le dispositif s’inscrive dans un « véritable accompagnement des jeunes et de leurs parents, et non dans un cadre répressif ».

Le système reposerait sur une commission pluridisciplinaire – émanation du conseil local ou intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance –, qui bénéficierait de l’appui d’une équipe de professionnels (du champ du travail social et de la santé notamment) chargée d’évaluer les situations et au sein de laquelle serait nommé un référent pour chaque mineur. Les actions décidées seraient mises en œuvre par des associations, des services publics communaux ou départementaux ou des bénévoles dûment formés. L’accompagnement proposé, que la CNAPE propose de limiter à une durée de six mois, renouvelable une fois, serait formalisé par un document d’engagements réciproques. Un rapport de fin de mesure serait adressé au procureur. Pour la fédération, cette réponse éducative, qui pourrait reposer sur des structures ou dispositifs existants (missions locales, soutien à la parentalité…), devrait « porter sur les questions de socialisation, d’éducation parentale, d’autorité, de repères, du passage à l’acte, de la vie en société et des relations aux autres, du respect des règles… » Elles pourraient prendre la forme de « mesures de réparation civile ou civique » s’inspirant de la réparation pénale pour mineurs, de mesures de « médiation volontaire », de stages d’éducation civique… Pour la CNAPE, ce dispositif, qui devrait être régulièrement évalué, pourrait être financé notamment par le Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance et des crédits de la politique de la ville.

Un ensemble de propositions qui implique « un changement de culture et de positionnement », admet la fédération, s’attendant à des critiques de la part d’une partie du monde judiciaire et associatif. Mais elle n’en espère pas moins, « a minima, ouvrir le débat sur ce sujet sensible ».

Notes

(1) Voir sur www.cnape.fr.

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