Recevoir la newsletter

Le contrat de génération est un échec, selon la Cour des comptes

Article réservé aux abonnés

L’abandon ou une révision en profondeur. Pour la Cour des comptes, voilà la seule alternative possible pour le contrat de génération. Un dispositif que François Hollande avait présenté comme une des principales armes de sa « boîte à outils » contre le chômage au début de son quinquennat… et dont les magistrats de la rue Cambon pointent l’échec dans leur dernier rapport annuel, rendu public le 10 février(1). Leur analyse est tranchée : dévoyé, victime de sa complexité, de ses contours flous et de son mauvais calibrage, le contrat de génération n’a pas trouvé son public et n’a eu qu’un effet négligeable sur le chômage. Explications.

Un dispositif trop peu attractif

Le contrat de génération a été lancé en mars 2013 sur la base d’une idée simple : celle de lier l’emploi d’un jeune au maintien en poste ou au recrutement d’un senior, avec la constitution d’un binôme de compétence entre les deux. Le tout, suivant la taille de l’entreprise, en contrepartie d’une aide financière et en étant soumis à l’obligation de conclure un accord d’entreprise sur le sujet, sous peine de pénalité(2). Mais à la fin juillet 2015, seulement 40 300 contrats assortis d’une aide avaient été signé s, alors que plus de 220 000 étaient espérés à cette date pour parvenir à l’objectif de 500 000 contrats, fixé par François Hollande à l’échéance 2017.

La principale raison avancée par les magistrats pour expliquer l’« insuccès » du dispositif est qu’il est « peu lisible et complexe à mettre en œuvre ». « Le contrat de génération n’a pas su convaincre les entreprises de son intérêt », souligne la Haute Juridiction. Le choix qui a été fait de le construire non comme un instrument simple à la disposition directe des entreprises mais, « pour celles qui comptent plus de 50 salariés, comme un dispositif dépendant d’une négociation préalable et obligatoire sous peine de pénalité » a été perçu par de nombreuses entreprises « comme une contrainte et non comme une opportunité ».

La menace représentée par la pénalité « s’est révélée inefficace pour inciter les entreprises de taille moyenne à mener à bien les négociations » et a, de toute façon, été « quasiment inappliquée par l’administration en dépit du constat de carences manifestes ». « De façon paradoxale, explique le rapport, les efforts des pouvoirs publics pour construire un dispositif porté par les partenaires sociaux et adapté à l’entreprise ont été compris comme une charge supplémentaire pesant sur les employeurs et inadaptée à leurs besoins. » Des modifications ont bien été apportées en 2014 pour accroître l’attractivité du contrat de génération(3) mais « elles n’ont pas remédié à ses défauts de conception et le rythme de signature de nouveaux contrats n’a pas sensiblement progressé ».

L’autre grande raison qui explique l’échec du contrat de génération tient dans l’inadaptation des critères d’éligibilité à l’aide financière, explique encore le rapport. Tout particulièrement du fait de l’exclusion des entreprises appartenant à un groupe de plus de 300 salariés, au motif que des appariements factices entre jeunes et seniors pourraient être organisés au sein de ces groupes. Une règle qui a exclu, par exemple, de nombreuses entreprises relevant du commerce et de la distribution au motif qu’elles sont filiales d’un groupe de plus de 300 salariés alors que, dans les faits, elles ont en réalité une gestion autonome.

Autre constat dressé par la Cour des comptes : en dépit des précautions prises pour éviter les « effets d’aubaine », le contrat de génération bénéficie aujourd’hui prioritairement à des jeunes relativement qualifiés et déjà présents dans les entreprises. Il n’est donc pas l’instrument de développement de l’emploi attendu et « son effet sur le chômage apparaît quasiment négligeable ».

L’abandon ou la révision

Au final, la Cour des comptes juge indispensable de s’interroger sur l’avenir du contrat de génération. Dans l’hypothèse où les pouvoirs publics entendraient le maintenir au-delà de la durée de vie des accords collectifs déjà signés et des aides accordées, les magistrats estiment qu’il devrait être « profondément revu en simplifiant considérablement, voire en abandonnant les obligations liées à une négociation préalable, et en assouplissant les critères d’éligibilité à l’aide financière ».

« A défaut d’une telle révision, écrit la Haute Juridiction financière, il serait vain d’attendre une plus forte mobilisation des entreprises en faveur de ce dispositif et il conviendrait d’envisager son extinction au profit de dispositifs plus efficaces. »

Dans une réponse publiée en annexe du rapport, dans laquelle elle défend le dispositif face aux critiques portées par les magistrats financiers, la ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social estime que le contrat de génération est encore « en cours d’appropriation par les entreprises » et qu’il est donc « prématuré de tirer le constat de son échec, et de le revoir profondément ».

Notes

(1) Rapport disp. sur www.ccomptes.fr.

(2) Voir ASH n° 2823 du 6-09-13, p. 47.

(3) Avec la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale – Voir ASH n° 2864 du 13-06-14, p. 47.

Côté cour

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur