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Financement des allocations de solidarité : le bras de fer se durcit

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La pression, qui était déjà montée d’un cran le 16 octobre, lors du congrès de l’Assemblée des départements de France (ADF), s’est transformée en offensive. « L’ensemble des propositions de l’ADF, validées à l’unanimité de ses membres, ont toutes été rejetées » et les propositions du gouvernement « ont toutes été considérées comme inacceptables et refusées par l’ADF ». Tel est le constat d’échec formulé par Jean-René Lecerf, président du conseil départemental du Nord et président de la commission des finances de l’ADF, après la séance de discussions, le 19 janvier à Matignon, sur le financement des allocations de solidarité. « Il reviendra au Premier ministre de procéder à l’arbitrage », ajoute Jean-René Lecerf, prévenant d’« initiatives qui viseront à faire entendre à la voix des départements ». Depuis sa motion adoptée lors de son congrès de Troyes(1) et la création d’un fonds d’urgence de 50 millions d’euros pour les dix départements les plus en difficulté(2) – « même pas un mois de RSA pour le département du Nord », relève-t-on à l’ADF –, l’association d’élus a entamé avec l’Etat des discussions sur la recentralisation du financement du RSA, réclamée par les élus de droite comme de gauche. Dans un communiqué du 13 janvier, le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel (PS) a d’ailleurs fait de cette demande une « question de survie de notre modèle social et d’égalité entre les territoires » et a annoncé, face à l’explosion continue des dépenses sociales obligatoires et à la baisse des dotations de l’Etat, « sa volonté de ne pas inscrire pour 2016 d’augmentation des crédits affectés au RSA ». Un gel qui pourrait concerner la plupart des départements qui vont boucler leur budget d’ici à la fin mars, selon le président de l’ADF, Dominique Bussereau (LR, Charente-Maritime) dans une interview publiée par La Tribune le 20 janvier, cette décision figurant dans la motion prise par l’association. Alors que les présidents LR de quatre départements de la grande couronne – Essonne, Seine-et-Marne, Val-d’Oise et Yvelines – dénonçaient le 18 janvier l’« asphyxie » budgétaire des collectivités, le président de l’ADF rendait public un courrier dans lequel il alertait le Premier ministre du « danger qu’entraînerait pour la cohésion nationale la situation de départements qui seraient laissés dans l’impasse budgétaire ». L’association d’élus, qui espérait voir aboutir les négociations à la mi-mars, avait posé des exigences visant à prendre en compte la réalité du reste à charge des départements et à éviter qu’une reprise en main de l’Etat n’ait des incidences sur leur fiscalité. Faute d’être entendus, « nous allons entrer dans une guerre totale avec l’Etat », a déclaré Dominique Bussereau dans un entretien publié le 19 janvier par Le Parisien.

Avec l’Etat, mais pas seulement. En pleine trêve des confiseurs, la majorité des établissements sociaux et médico-sociaux accueillant des personnes âgées ou handicapées en Essonne, de même que des structures de la protection de l’enfance – ainsi que d’autres, situés ailleurs en France mais accueillant des usagers originaires du département –, ont ainsi reçu une lettre du président du conseil départemental, François Durovray (LR), leur proposant un étalement sur six ans du règlement des factures d’hébergement en attente. Alertée par plusieurs de ses adhérents, l’Uriopss (Union régionale interfédérale des organismes privés sanitaires et sociaux) Ile-de-France est montée au créneau. Dans un courrier adressé au président du conseil départemental, ainsi qu’au directeur de l’agence régionale de santé Ile-de-France et au préfet de l’Essonne, cosigné par l’Uniopss, la FEHAP (Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne), la FEHAP Ile-de-France et l’UNA (Union nationale de l’aide, des soins et des services aux domiciles) Ile-de-France, elle dénonce des « atteintes graves et supplémentaires portées aux publics fragiles comme aux enfants en danger du département, mais aussi aux associations gestionnaires d’établissements ». Le protocole visant à étaler le paiement des sommes dues sur six années revient à demander à ces derniers « de supporter le poids de la dette du département », une option qui « serait lourdement préjudiciable pour les associations qui ne disposent pas de la trésorerie nécessaire pour couvrir un tel délai, mais aussi pour les personnes vulnérables relevant de l’aide sociale et pour les enfants placés », écrivent les signataires. « On ne peut pas faire de l’aide sociale légale une contrainte d’ajustement. En termes de projet de société et d’éthique, cela pose problème… », fulmine Guillaume Quercy, directeur de l’Uriopss Ile-de-France.

Cet événement symptomatique et inédit a pris des allures de règlement de comptes entre le nouvel exécutif du département et l’ancien, François Durovray accusant son prédécesseur d’avoir laissé s’accumuler une dette qui s’élève « aujourd’hui à 108 millions d’euros » et qui « n’est pas inscrite au budget prévisionnel 2015 ». Jérôme Guedj (PS), contestant toute « cavalerie budgétaire » et invoquant « de classiques décalages de trésorerie en fin d’année », dénonce le fait que le secteur social fasse les frais des mesures de restriction. « La polémique politique peut avoir sa légitimité mais on ne veut pas que cela mette en jeu le quotidien et la qualité de vie des personnes fragiles », déplore quant à lui Guillaume Quercy. L’annonce par François Durovray d’« ajouter 35 millions d’euros pour faire face aux dépenses qui n’avaient pas été engagées et payées par [ses] prédécesseurs » ne résout en rien, souligne-t-il encore, la question des factures dues aux associations, que le conseil départemental n’a aucune raison légale de ne pas régler.

Notes

(1) Voir ASH n° 2927 du 2-10-15, p. 18.

(2) Voir ASH n° 2939 du 25-12-15, p. 13 et 32.

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