Pilotée par l’Institut national des études démographiques (INED) et par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), l’enquête « Trajectoires et origines », lancée à la fin 2004 pour faire la lumière sur « la situation des populations liées à l’immigration », a été menée par voie de questionnaire, en 2008-2009, auprès de quelque 22 000 personnes (8 300 immigrés, 8 200 descendants d’immigrés nés en France, 700 natifs de DOM, 700 descendants de natifs de DOM et 3 900 personnes nées en métropole de parents français à la naissance formant la « population majoritaire »). Elle a donné lieu à la publication de plusieurs études intermédiaires exploitant les données ainsi collectées – sur la ségrégation spatiale(1) ou les mariages forcés(2), par exemple –, avant d’aboutir à la parution, le 13 janvier, de Trajectoires et origines – Enquête sur la diversité des populations en France(3).
Réalisé sous la direction de Cris Beauchemin, Christelle Hamel et Patrick Simon, cet ouvrage livre un panorama de l’intégration des immigrés en France, en explorant, pour la première fois, « l’expérience du racisme subi », soulignent ses auteurs. A cet égard, il « apporte un éclairage important sur ce que le débat public dénomme de façon rapide “racisme anti-Blancs” », en montrant « que le racisme déclaré par les majoritaires est un phénomène minoritaire » et « sans comparaison avec le racisme qui vise les populations issues de l’immigration extra-européenne, envers qui il s’exprime de façon massive, répétée et préjudiciable ».
Malgré un sentiment d’appartenance à la nation française qui « progresse régulièrement au fil des générations », cette analyse met en évidence la persistance de discriminations multiples envers les immigrés et une évolution qui n’est pas forcément favorable à leurs descendants. « Sur le plan socio-économique, la comparaison des première et deuxième générations conduit à un constat nuancé qui ne peut faire l’économie d’une distinction entre hommes et femmes », précisent les auteurs, en avançant que « les fils de migrants occupent des situations inférieures à celles des migrants eux-mêmes, tandis que les filles de migrants ont des situations supérieures à celles des femmes migrantes, car ces dernières étaient et restent nettement plus en retrait et plus défavorisées que les hommes immigrés sur le marché du travail ». Cependant, « les descendantes d’immigrés non européens restent en situation de surchômage et aussi de surinactivité en comparaison des femmes de la population majoritaire », un écart qui est encore plus marqué chez les hommes.
(3) Disponible sur