Après deux études sur le rôle des délégués mandataires à la protection des majeurs(1) et des animateurs en gérontologie auprès des malades d’Alzheimer(2), la Fondation Médéric-Alzheimer poursuit son exploration des métiers du champ social par une enquête auprès des assistants de service social (ASS) des établissements de santé(3). Objectif de cette étude, réalisée en 2015 et dont les résultats viennent d’être publiés dans le dernier numéro de La lettre de l’Observatoire des dispositifs de prise en charge et d’accompagnement de la maladie d’Alzheimer : « Mieux comprendre le rôle et les missions de ces professionnels qui occupent une position stratégique dans la prise en charge de la personne âgée hospitalisée », mais également « mettre en lumière les difficultés ou les questionnements particuliers posés par la maladie d’Alzheimer et, plus globalement, les troubles cognitifs dans l’exercice de leur mission ». Menée en partenariat avec la Fédération hospitalière de France (FHF), la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne (FEHAP), la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP-SSR) et l’Association professionnelle des services sociaux hospitaliers et de la santé (Aprosshes), elle a permis de recueillir les réponses de 616 ASS travaillant en établissement de santé.
Outre le profil de ces professionnels (âge moyen, ancienneté, formation spécifique…) et leur environnement de travail (plus de huit ASS sur dix ayant répondu à l’enquête travaillent dans le secteur public et près des trois quarts ont déclaré que l’établissement dans lequel ils exercent dispose d’un EHPAD), les résultats permettent de décrire la façon dont ils perçoivent leurs missions à l’égard des personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de troubles cognitifs, soit en moyenne 56 % des patients auprès desquels ils interviennent. « La grande majorité met au premier plan l’évaluation de la situation sociale de la personne et de son entourage (citée en premier par 75 % des répondants et dans les quatre premiers par 94 %) », détaille le compte rendu. La quasi-totalité (95 %) des ASS déclare d’ailleurs réaliser cette évaluation : près des trois quarts l’effectuent après quelques jours d’observation du comportement de la personne, 11 % la réalisent uniquement au moment de l’admission et 15 % « déclarent la faire lors de l’admission ou après une période d’observation, selon les cas ».
Au quotidien, les interventions des ASS auprès des personnes atteintes de troubles cognitifs « sont le plus souvent orientées vers l’accompagnement des personnes malades et de leur famille » (selon 97 % des répondants). « Ils s’investissent également largement dans la perspective de la sortie d’hospitalisation, dans la mise en œuvre ou l’adaptation des services d’aide et/ou de soins à domicile (95 %), et dans la préparation des entrées en établissement d’hébergement, EHPAD ou USLD (85 %) ». Pour 70 % d’entre eux, « la mise en place des aides financières nécessaires à la prise en charge de la personne constitue un motif fréquent d’intervention ». Ils sont, en revanche, moins souvent amenés à préparer les mesures de protection juridique, à s’occuper des conditions de vie et de logement, à orienter vers les structures d’aide aux aidants et à préparer une hospitalisation à domicile. L’étude rappelle en outre que, dans le cadre de leurs missions, les ASS peuvent rencontrer des « situations de négligence, voire de maltraitance » à l’encontre de personnes atteintes de troubles cognitifs, ce qui a été le cas pour près de sept professionnels sur dix durant l’année 2014. C’est la maltraitance financière qui est le plus fréquemment évoquée, devant la maltraitance psychologique et la maltraitance physique.
Les assistants de service social sont également amenés à participer à l’élaboration du projet personnalisé de soins (PPS). Lorsqu’ils le font, ce qui est le cas pour 78 % d’entre eux (32 % toujours, 46 % parfois), « ils y apportent un certain nombre d’éléments contributifs » : la situation sociale de la personne d’abord, la présence ou non d’aidants dans son entourage ou encore les conséquences de la maladie dans les actes de la vie quotidienne. « D’autres éléments comme le logement, la situation financière et la situation administrative des personnes sont moins systématiquement pris en compte dans l’élaboration du projet personnalisé de soins. » Autre étape de la prise en charge : le recueil du consentement de la personne, ce qui peut se révéler « difficile » en raison de ses troubles cognitifs. « Il faut se contenter, dans bien des cas, de rechercher son assentiment (c’est-à-dire un accord qui repose sur une compréhension seulement partielle de la situation) pour engager toute démarche à l’issue de l’hospitalisation de la personne. »
S’agissant des démarches entreprises lors de la sortie de l’établissement, 46 % des ASS déclarent solliciter toujours la personne elle-même « pour déterminer ses besoins dans la perspective d’un retour à domicile ou d’une structure d’aval ». Par ailleurs, 81 % prennent toujours l’avis de l’équipe hospitalière, 49 % celui du mandataire judiciaire lorsque la personne est sous mesure de protection juridique et 60 % demandent toujours l’avis de la famille ou des proches. Lorsque l’état de santé de la personne s’aggrave et que son environnement ne lui permet plus un retour à domicile, 57 % des ASS déclarent demander toujours l’avis de la personne, 75 % celui de la famille et 68 % celui du mandataire judiciaire. L’enquête met également en lumière le « rôle pivot des ASS », qui interviennent aussi bien auprès des personnes malades que de leurs familles, travaillent en lien avec les équipes de l’institution hospitalière, mais également avec l’environnement extrahospitalier (organisation du retour à domicile, admission dans un établissement d’hébergement…) et, enfin, peuvent être amenés à participer à des instances de coordination.
(3) En ligne sur