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Bidonvilles : « une recherche participative pour agir sur la transformation sociale »

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Une recherche-action menée par l’université de Harvard avec les Enfants du canal a été dévoilée le 13 janvier lors d’un colloque de l’association sur les jeunes Roms des bidonvilles. Explications de Myriam Zuber et Henry Shah, respectivement responsable pédagogique d’un programme international de stages et de formation pratique à Harvard(1) et étudiant chercheur.
En quoi ce projet consiste-t-il ?

Au sein du centre FXB de l’université de Harvard(2), qui mène des recherches sur les droits de l’Homme et la santé publique, le programme international de stages et de formation pratique consiste à faire travailler des étudiants chercheurs auprès de personnes marginalisées et vulnérables. Il a d’abord concerné les pays en voie de développement, puis les pays développés, dont la France. Quatre étudiants en bachelor et master ont ainsi rejoint les Enfants du canal, qui est au cœur du projet, Médecins du monde et le Secours catholique étant des partenaires. Accompagnés par des volontaires de Romcivic (voir ci-contre), ils ont mené 45 entretiens, entre le 1er juin et le 31 juillet derniers, dans huit bidonvilles d’Ile-de-France, qui ont été analysés à partir de l’approche participative de Romcivic, de la notion d’empowerment et d’observations ethnographiques issues de leur immersion dans les bidonvilles. Le contenu des questionnaires a été inspiré de ceux qui sont utilisés en Afrique et en Asie. Outre leurs responsables à Harvard, les étudiants sont accompagnés par Tommaso Vitale, professeur de sociologie à Science Po, et Olivier Peyroux, sociologue cofondateur de l’association Trajectoires.

Quels sont les premiers résultats ?

Les personnes interrogées, qui vivent le plus souvent dans des espaces très marginalisés et invisibles, ont répondu à des questions sur les conditions de vie de leur ménage et l’accès aux droits et aux services. Alors qu’elles parlent de leur volonté de rester sur le territoire et de sédentarisation, presque toutes les familles ont un parcours marqué par un cycle incessant d’expulsions du terrain où elles vivent, ce qui freine la scolarisation des enfants. En matière de santé, l’absence de couverture maladie entraîne une dépendance à l’urgence. L’accès au travail légal est bloqué par la barrière de la langue et certaines personnes nous ont dit que les conseillers de leur mission locale ou de Pôle emploi n’étaient pas informés de la levée des mesures transitoires. En revanche, les règles de déontologie fixées par le comité scientifique de l’université, régies par le besoin de protéger les populations enquêtées, ne nous ont pas permis d’aborder le sujet des activités illicites. La situation des populations pose la question des conditions de vie indignes, telles qu’elles peuvent exister dans les pays en voie de développement, pour des citoyens européens, question abordée en France sous l’angle du caractère illégal des campements, avec un discours porté par les préjugés sur les Roms. Or on s’aperçoit que la plupart des habitants des bidonvilles ne sont pas à l’origine itinérants, qu’ils sont de cultures, de religions différentes, et que beaucoup ne parlent pas la langue romani. D’ailleurs, ils remettent en question l’appellation « Rom ». Alors que l’empowerment est courant aux Etats-Unis et peu développé en France, Romcivic réduit l’écart entre une approche structurelle très éloignée du terrain et les actions d’urgence. En formant des travailleurs du social qui deviennent des intermédiaires, un réseau de connaissances et d’expériences dans les bidonvilles, le projet ouvre la voie à des réponses de long terme.

Quelle va être la suite ?

Cette étude a constitué la phase exploratoire du projet, qui va durer deux ou trois ans. Il va être élargi à d’autres régions, avec l’objectif d’impliquer les populations concernées, les associations, les institutions publiques, les riverains…, chacun devant être acteur et observateur. La finalité de cette recherche participative est d’agir sur la transformation sociale en ouvrant un dialogue, dans lequel les étudiants chercheurs jouent le rôle de facilitateurs. Elle pourrait déboucher sur des formations-actions et des forums de restitution avec les riverains, dans un esprit de démocratie participative.

Notes

(1) Contact : mzuber@hsph.harvard.edu.

(2) Dont la directrice de recherche, Jacqueline Bhabha, a mené des travaux auprès des jeunes Roms en Serbie et Roumanie. Le centre travaille avec l’ONG qui lui a donné son nom, FXB International (Fondation François-Xavier Bagnoud), qui mène des programmes impliquant les populations vulnérables dans leur projet de sortie de la pauvreté.

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