Dans l’excellente série d’ouvrages collectifs proposés par le Séminaire interuniversitaire international sur la clinique du handicap, celui-ci, coordonné par les psychologues Marcela Gargiulo et Sylvain Missonnier, pose une question qui tranche avec l’ordinaire des préoccupations des acteurs du secteur. Il s’agit, en effet, de savoir si l’équation selon laquelle le handicap serait consubstantiellement tragique ne souffre aucune exception. Roger Salbreux, pédopsychiatre, veut bien en convenir : « La survenue d’un handicap et surtout le “vivre avec” lui comportent […] un certain nombre de retombées heureuses », aussi bien pour la personne concernée que pour ses proches et les intervenants qui sont en contact avec la première et les seconds. Le handicap n’est donc pas seulement une tragédie – mais « c’[en] est quand même une… », conclut-il. Tout dépend des moments et de l’attitude des adultes, parents et professionnels, car c’est notamment dans leur regard que se lit la tragédie, développe Régine Scelles, professeure de psychopathologie. Centrant son propos sur les enfants en situation de handicap et leurs fratries, elle montre comment la capacité des enfants, atteints ou non, à faire de l’humour autour du handicap permet de « penser, vivre autrement l’intolérable pour toujours, ou seulement pour un moment ». Rester dans l’échange de personne à personne, et ne pas réduire l’intéressé à son handicap : voilà, pour les professionnels aussi, la seule façon de ne pas être, malgré eux, les « principaux acteurs de tragédies insupportables », analyse Véronique Cohier-Rahban, psychothérapeute et superviseure.
Et si le handicap n’était pas une tragédie ?
Sous la direction de Marcela Gargiulo et Sylvain Missonnier – Ed. érès – 23 €