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Les lenteurs de la « relocalisation » sèment la confusion sur les capacités d’accueil

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« Une mise en œuvre laborieuse. » C’est ainsi que Forum réfugiés-Cosi qualifie, dans sa lettre d’informations publiée le 29 décembre, le déploiement du programme européen de relocalisation des réfugiés. Selon les décisions du Conseil de l’Union européenne prises en septembre, 160 000 personnes devraient être relocalisées en deux ans depuis l’Italie et la Grèce vers les autres Etats membres, dont plus de 30 000 en France.

Or, détaille Forum réfugiés-Cosi, seules 208 personnes ont été relocalisées à la mi-décembre 2015. Un chiffre dérisoire au regard des enjeux, qui s’explique en partie par les difficultés de mise en œuvre des « hotspots » chargés d’identifier les demandeurs d’asile et au refus par certains ressortissants des pays concernés – la Syrie, l’Irak et l’Erythrée – de la proposition qui leur a été faite, le pays de « relocalisation » étant imposé. A la fin décembre, sur France Info, Pierre Henry, directeur général de France terre d’asile, a également déploré que seuls 19 réfugiés aient rejoint la France depuis septembre dans ce cadre.

A ce chiffre doivent être ajoutés les quelque 600 personnes accueillies en septembre pour « soulager » l’Allemagne et ceux qui sont arrivés par leurs propres moyens, qui ont pu bénéficier d’une mise à l’abri, notamment lorsqu’ils vivaient dans des campements parisiens. Mais pour la relocalisation proprement dite, « 20 000 places d’hébergement ou de logement avaient été trouvées en septembre, indique Florent Gueguen, directeur général de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (FNARS). Au moment où une personne sur deux n’obtient pas de solution d’hébergement en appelant le 115, ne pas utiliser ce potentiel pour les sans-abri “de droit commun” est inacceptable ! » La FNARS dénonce « un système qui crée des filières parallèles », et a, au final, « généré des possibilités non utilisées ».

Un avis non partagé par le délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL), Sylvain Mathieu, selon qui, une fois effectué le « tri » dans les propositions initiales faites par les communes en septembre, restent plusieurs centaines de places en logements situés dans des zones « détendues », c’est-à-dire où les résidents ne risquent pas de court-circuiter les files d’attente. Quant aux places d’accueil d’urgence proposées, comme dans les bases de loisirs, « elles ont été mobilisées pour les réfugiés venus d’Allemagne, rendues pour leur fonctionnement d’origine ou intégrées dans les possibilités de créer des places en centre d’accueil pour demandeurs d’asile ». Résultat, « il n’y a pas de stock non utilisé », l’Etat étant toujours à la recherche de places à mobiliser, précise le DIHAL, ajoutant cependant que le dispositif d’accueil pour les demandeurs d’asile est à distinguer du dispositif général d’hébergement des sans-abri. La FNARS, estimant que la mobilisation de l’automne a, à tout le moins, montré qu’il existe des possibilités dont pourraient bénéficier les publics à la rue – qu’ils soient migrants ou non –, devait demander, lors d’une rencontre avec le DIHAL et le directeur général de la cohésion sociale le 7 janvier, que ce gisement soit mis à disposition des 115 et des services intégrés de l’accueil et de l’orientation (SIAO) dans le cadre de l’hébergement de droit commun, notamment pour trouver des solutions de sortie du plan hivernal au printemps. « D’autant que le rôle de régulation des SIAO, réaffirmé par la loi ALUR, a été confirmé par circulaire », souligne Florent Gueguen. « Nous savons aussi qu’une partie des places repérées ont été utilisées pour la mise à l’abri des migrants de Calais », dans le cadre des ouvertures qui leur sont destinées dans les départements, ajoute le directeur général de la FNARS, regrettant, là également, un manque de coordination.

Djamel Cheridi, directeur de l’hébergement et du logement accompagné chez Coallia, témoigne que, dans le cadre du dispositif de relocalisation, l’association « est toujours mobilisée par les services de l’Etat » sur la signature de conventions pour la gestion et l’accompagnement dans le cadre de logements (intermédiation, bail glissant…) ou de dispositifs plus temporaires. Si certains départements ont tablé sur une capacité « cible » d’une centaine de personnes, lavisibilité « manque sur le volume de ménages concernés, à quel rythme, et avec quelle intensité ils vont arriver », souligne-t-il. « On nous indique que le dispositif de relocalisation va réellement démarrer à compter de février-mars, en lien avec l’installation des hotspots. » Face à un programme qui tarde à se concrétiser, « on ne peut qu’être dérangé par le fait que des solutions ne sont pas utilisées pendant plusieurs mois alors que les besoins sont évidents pour les personnes et les familles à la rue ou dans des dispositifs d’hébergement inadaptés », reconnaît Djamel Cheridi. Même si, indique-t-il, il demeure un certain décalage entre les capacités signalées à la plateforme nationale pilotée par la DIHAL et celles qui sont immédiatement disponibles. Dans ce contexte, une volonté de mutualisation « est portée par le bon sens et la nécessité », estime-t-il, espérant que la dynamique enclenchée par le programme de relocalisation pourra permettre de traiter « de façon globale et indifférenciée la question de l’accès à l’hébergement et au logement ». Contre-exemple : « Nous avions l’opportunité d’orienter deux familles de réfugiés d’origine d’Afrique centrale vers des logements vacants réservés pour la relocalisation, en accord avec la plateforme. L’affaire a capoté car les services de l’Etat ont considéré que c’était un dévoiement du dispositif. » Pourtant, la circulaire du 9 novembre sur la mise en œuvre du programme de relocalisation en France(1) précise bien qu’elle doit « conforter » l’effort général poursuivi par la réforme du droit d’asile, qui vise l’amélioration de l’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés.

Notes

(1) Voir ASH n° 2936 du 4-12-15, p. 46.

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