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Le budget 2016 définitivement adopté et soumis au Conseil constitutionnel

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Après deux mois de marathon budgétaire dans les deux chambres, c’est par un ultime vote de l’Assemblée nationale que le Parlement a adopté, le 17 décembre, le projet de loi de finances pour 2016. Un texte composite dont plusieurs dispositions doivent encore passer l’épreuve du Conseil constitutionnel, que l’opposition a saisi.

Composé de 172 articles, le budget 2016 est riche de dispositions d’ordre social et fiscal. A titre d’exemple, il poursuit et amplifie l’allégement de l’imposition des ménages aux revenus modestes et moyens engagé par le gouvernement en 2014, via l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu (les différentes limites des tranches ainsi que différents plafonds sont revalorisés de 0,1 %), d’une part, et, d’autre part, la mise en œuvre d’une nouvelle réforme du mécanisme de la décote. La loi de finances prépare également la mise en place du dispositif de prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.

Elle complète par ailleurs les mesures prévues dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 afin de regrouper les dates de revalorisation des prestations sociales soit au 1er avril (pour la quasi-totalité des prestations), soit au 1er octobre de chaque année. Elle poursuit aussi la réforme de l’aide juridictionnelle, contient de nouvelles mesures en faveur des anciens combattants et de leurs conjoints survivants ou bien encore met en œuvre une partie des mesures prévues par le protocole relatif à l’avenir de la fonction publique et à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations, présenté en juillet 2015(1).

Nous reviendrons en détail sur l’ensemble du texte, une fois la décision des Sages rendue. En attendant, coup de projecteur sur quatre dispositions, apparues ou aménagées en cours de lecture parlementaire.

Recyclage de la future prime d’activité en baisse de la CSG

Issue d’un amendement déposé par l’ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault, la mesure fait partie des dispositions contestées par l’opposition… et ne soulève pas non plus l’enthousiasme du gouvernement : la loi prévoit de verser une partie de la future prime d’activité(2) sous forme de baisse de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les salaires inférieurs à 1,3 SMIC à partir du 1er janvier 2017. Dans leur saisine, les parlementaires de l’opposition estiment cette ristourne de CSG contraire au principe d’égalité devant l’impôt entre contribuables et au principe d’intelligibilité de la loi. Ils pointent les « problèmes d’imputation pour les couples », dans la mesure où la réduction de CSG, calculée sur une base individuelle, ne prendrait pas en compte l’ensemble des revenus de la personne, ni sa situation familiale. Enfin, la mesure introduirait « des disparités manifestes entre contribuables, notamment entre salariés et non-salariés », ces derniers étant exclus du bénéfice de la réduction de CSG, alors qu’ils sont éligibles à la prime d’activité.

Au cours des débats, le gouvernement lui-même a exprimé des réserves sur la disposition, par la voix du ministre des Finances Michel Sapin, qui a notamment fait remarquer que « jusqu’à présent, le Conseil constitutionnel a toujours refusé la modulation du niveau de la CSG ».

Impôts locaux des retraités aux revenus modestes

C’était une promesse du Premier ministre(3). La loi de finances pour 2016 tente de régler, de manière pérenne, les effets pervers d’une décision prise en 2008 : la suppression progressive d’un avantage fiscal appelé « demi-part fiscale des veuves ». Cette demi-part de quotient familial profitait auparavant aux veufs et veuves ayant eu un enfant. La majorité précédente avait voté sa fin progressive avec une disparition totale en 2014. Une fois au pouvoir, la gauche n’est pas revenue sur cette suppression, sauf pour ceux qui ont élevé seuls leurs enfants pendant au moins cinq ans. Les effets de cette suppression sur l’assiette fiscale des contribuables concernés auraient dû se faire sentir aujourd’hui en rendant ces derniers – pour la plupart des personnes âgées – redevables de la taxe d’habitation et, pour ceux qui sont propriétaires, de la taxe foncière.

Concrètement, la loi de finances maintient, pour les personnes exonérées en 2014, le bénéfice de ces exonérations d’impôts locaux pour 2015 et 2016. Elle organise également ce maintien au-delà, en cas de revenus inchangés. De plus, il existera à partir de 2017 un mécanisme de « lissage dans le temps » – la rapporteure générale (PS) de la loi à l’Assemblée nationale, Valérie Rabault, parle d’une « sortie en sifflet » – pour éviter à certains contribuables toute entrée trop brutale dans la fiscalité locale. Selon la députée, le nombre de personnes concernées par le maintien des exonérations est estimé à 650 000 et 100 000 personnes seraient concernées par le mécanisme de la « sortie en sifflet ».

Taxe d’habitation des personnes handicapées

La loi de finances pour 2016 apporte de la souplesse au dispositif d’abattement de taxe d’habitation au profit des personnes handicapées en permettant aux communes d’étendre cet abattement jusqu’à 20 %.

Pour mémoire, la taxe d’habitation est calculée d’après la valeur locative cadastrale des habitations et de leurs dépendances, c’est-à-dire en fonction du montant de loyer annuel potentiel que le logement produirait s’il était loué. Jusqu’à présent, les conseils municipaux pouvaient, par délibération, instituer un abattement de 10 % de la valeur locative des habitations de la commune prise en compte dans le calcul de la taxe d’habitation, pour des personnes handicapées ou atteintes d’une infirmité ou d’une invalidité (ou des contribuables vivant sous le même toit). Nouveauté introduite par la loi de finances : dorénavant, les conseils municipaux peuvent, par délibération, instituer un abattement « en pourcentage de la valeur locative moyenne des habitations de la commune, exprimé en nombre entier entre 10 et 20 points ». Les communes peuvent ainsi choisir de conserver un abattement de 10 % ou le porter jusqu’à 20 %.

Aides personnelles au logement

La loi de finances pour 2016 modifie les modalités de calcul des aides personnelles au logement (aide personnalisée au logement, allocation de logement sociale, allocation de logement familiale) en prévoyant la prise en compte du patrimoine des ménages dans les ressources retenues pour le calcul de leurs aides. Une réforme censée, selon le gouvernement, assurer une plus grande équité entre les bénéficiaires de ces aides, par une meilleure prise en compte de leur situation financière réelle. Sous l’impulsion des parlementaires, un seuil minimal de 30 000 € a toutefois été fixé. C’est ainsi que la « valeur en capital du patrimoine du demandeur » d’une aide au logement est désormais prise en compte, aux côtés des ressources, lorsque cette valeur est supérieure à 30 000 €. La loi renvoie à un décret le soin de définir la détermination et les conditions de prise en compte des ressources de la valeur du patrimoine. Le dispositif entrera en vigueur le 1er octobre 2016 et s’appliquera aux prestations dues à compter de cette date.

Autre nouveauté : la définition d’un niveau de loyer considéré comme excessif au regard des ressources déclarées par le ménage allocataire (et donc révélateur de capacités de paiement vraisemblablement supérieures), à partir duquel les aides seront désormais dégressives. La règle entrera en vigueur le 1er juillet 2016 et s’appliquera aux prestations dues à compter de cette date.

Enfin, la loi de finances prévoit encore l’inéligibilité aux aides personnelles au logement, à compter du 1er octobre 2016, des particuliers rattachés au foyer fiscal de leurs parents lorsque ces derniers sont assujettis à l’impôt de solidarité sur la fortune.

Notes

(1) Voir ASH n° 2919-2920 du 17-07-15, p. 16.

(2) La prime d’activité doit entrer en vigueur le 1er janvier 2016 à la place du RSA « activité » et de la prime pour l’emploi – Voir ce numéro, p. 32.

(3) Voir ASH n° 2932 du 6-11-15, p. 8.

[Loi à paraître]

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