Supprimer le chômage de longue durée par des offres d’emplois « utiles ». Tel est l’objectif de la proposition de loi d’expérimentation territoriale visant à faire disparaître le chômage de longue durée, votée à l’unanimité à l’Assemblée nationale le 9 décembre en première lecture(1). Défendu par le député socialiste Laurent Grandguillaume, et inspiré par l’association ATD quart monde(2), ce texte vise à tester pendant cinq ans, dans dix territoires volontaires, l’embauche de demandeurs d’emploi de longue durée en contrat à durée indéterminée (CDI) en développant des activités locales (travaux de maraîchage ou forestiers, aide à domicile, travaux dans les campings…), via la réaffectation des dépenses liées au chômage. L’argent jusqu’alors alloué par l’Etat, les régions et les départements pour accompagner ces demandeurs d’emploi au travers du revenu de solidarité active, de contrats aidés ou de formations, devrait ainsi servir à financer les salaires de ces personnes. Cette expérimentation doit entrer en vigueur à une date qui sera fixée par décret et au plus tard le 1er juillet 2016. A terme, elle a vocation à être généralisée. La proposition de loi doit maintenant être examinée par le Sénat le 16 janvier prochain.
L’expérimentation devrait permettre aux personnes inscrites sur la liste des demandeurs d’emploi depuis plus de un an d’être recrutées en CDI et payées au moins au niveau du SMIC par des entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) pour exercer des activités non concurrentes avec des activités économiques exercées sur le territoire. Ces chômeurs devront être domiciliés depuis au moins six mois dans un des territoires participant à l’expérimentation.
Selon le texte, ils ne pourront être embauchés que par des entreprises du secteur de l’ESS qui remplissent les conditions fixées par la loi du 31 juillet 2014 relative à l’ESS(3), à savoir les acteurs historiques de l’économie sociale (associations, mutuelles, coopératives et fondations), ainsi que les sociétés commerciales qui poursuivent un objectif d’utilité sociale. Ces entreprises devront en outre avoir été conventionnées par le fonds spécifique que la proposition de loi met en place.
Le texte institue en effet un fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée, chargé de financer une fraction de la rémunération des demandeurs d’emploi concernés ainsi qu’une fraction de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement. Ce fonds devrait être alimenté par l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les organismes publics et privés volontaires. Il devrait également élaborer un cahier des charges, approuvé par arrêté ministériel, fixant les critères que devront respecter les dix territoires candidats dont la liste sera dressée par arrêté.
La gestion de ce fonds devrait être confiée à une association, administrée par un conseil d’administration composé :
→ de deux représentants de l’Etat ;
→ d’un représentant de chaque organisation syndicale de salariés représentative sur les plans national et interprofessionnel ;
→ d’un représentant de chaque organisation professionnelle d’employeurs représentative sur les plans national et interprofessionnel ;
→ d’un représentant de chaque organisation professionnelle d’employeurs représentative sur le plan national multiprofessionnel ;
→ d’un représentant du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale ;
→ d’un représentant du Conseil national de l’insertion par l’activité économique ;
→ d’un représentant de Pôle emploi ;
→ de deux parlementaires ;
→ d’un représentant du Conseil supérieur de l’ESS ;
→ d’un représentant de chaque comité local chargé du pilotage de l’expérimentation, comité qui devrait être mis en place par chaque territoire participant à l’expérimentation ;
→ de trois personnalités qualifiées désignées par arrêté ;
→ d’un représentant de l’Association des régions de France ;
→ d’un représentant de l’Assemblée des départements de France ;
→ d’un représentant de l’Assemblée des communautés de France ;
→ d’un représentant de l’Association des maires de France ;
→ d’un représentant des missions locales.
Les membres du conseil d’administration siégeront à titre bénévole, précise le texte.
Un commissaire du gouvernement, désigné par le ministre du Travail, devrait assister aux séances de toutes les instances de délibération et d’administration de l’association. S’il estime qu’une délibération du conseil d’administration ou qu’une décision prise par une autre instance de l’association gestionnaire du fonds est contraire aux dispositions régissant les missions et la gestion du fonds, il pourra s’opposer, par décision motivée, à sa mise en œuvre.
Par ailleurs, au plus tard 18 mois avant le terme de l’expérimentation, le fonds devra adresser au Parlement et au ministre du Travail un rapport public dressant le bilan de celle-ci et en évaluant l’impact direct et indirect.
(1) Disponible sur