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Prise en charge des migrants à Calais : la condamnation de l’Etat et de la ville confirmée en appel

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Dans une décision du 23 novembre saluée par les associations (voir ce numéro page 23), le juge des référés du Conseil d’Etat confirme l’ordonnance du tribunal administratif de Lille du 2 novembre qui a enjoint à l’Etat de mettre en œuvre plusieurs mesures sanitaires d’urgence pour améliorer les conditions de vie des migrants présents à Calais (Pas-de-Calais)(1). Le ministère de l’Intérieur et la mairie de Calais avaient fait appel de cette ordonnance, amenant Médecins du monde, le Secours catholique et les autres requérants à reprendre devant la Haute Juridiction administrative leurs conclusions qui, pour l’essentiel, n’avaient pas été satisfaites en première instance.

Le Conseil d’Etat considère, en premier lieu, « qu’il n’est pas sérieusement contesté que, malgré les actions importantes mises en œuvre par les autorités publiques, les conditions actuelles d’hébergement, d’alimentation, d’accès à l’eau, d’assainissement et de sécurité de la population vivant sur le site de la lande, qui comprend environ 6 000 personnes, dont 300 femmes et 50 enfants […], révèlent une situation d’urgence caractérisée ».

Certes, constate-t-il, 120 femmes et enfants sont accueillis au centre Jules-Ferry – où 100 places supplémentaires sont prévues d’ici à la fin de l’année –, 200 places sous tentes chauffées ont déjà été ouvertes, un millier de réfugiés vivant sur le site, « qu’ils aient ou non déposé une demande d’asile, ont été hébergés dans des centres d’accueil et d’orientation situés sur l’ensemble du territoire national » et un marché a été conclu par l’Etat « en vue de créer 1 500 places d’hébergement supplémentaires sur le site avant la fin du mois de décembre ». En revanche, « il ne résulte pas de l’instruction que les mineurs isolés sont identifiés et pris en charge par le département du Pas-de-Calais », poursuit le Conseil d’Etat. En outre, le centre Jules-Ferry n’organise qu’une seule distribution de 2 500 repas par jour, alors que la population présente sur la lande s’élève à 6 000 personnes. Quant à l’accès à l’eau potable et aux toilettes, il « est […] manifestement insuffisant » et aucun ramassage des ordures n’est réalisé à l’intérieur du campement. « Les migrants vivant sur le site de la lande sont ainsi exposés à des risques élevés d’insalubrité », estiment les hauts magistrats, qui relèvent également que « les véhicules d’urgence, d’incendie et de secours ne peuvent pas circuler à l’intérieur du site en l’absence de l’aménagement de toute voirie, même sommaire, compte tenu de la prolifération anarchique des tentes et abris divers ».

Du fait de ces conditions de vie, « la prise en compte par les autorités publiques des besoins élémentaires des migrants vivant sur le site en ce qui concerne leur hygiène et leur alimentation en eau potable demeure manifestement insuffisante et révèle une carence de nature à exposer ces personnes, de manière caractérisée, à des traitements inhumains ou dégradants, portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale », juge le Conseil d’Etat.

Les sages du Palais-Royal donnent donc raison au juge des référés du tribunal administratif de Lille qui avait enjoint à l’Etat et à la ville de Calais « de créer sur le site de la lande dix points d’eau supplémentaires comportant chacun cinq robinets, cinquante latrines à fosse ou cuve étanche compte tenu de la nature sablonneuse du terrain d’assiette du camp, de mettre en place un dispositif de collecte des ordures avec l’installation de conteneurs-poubelles mobiles de grande capacité à l’intérieur du site et/ou de bennes supplémentaires, de procéder à un nettoyage du site et, enfin, de créer un ou plusieurs accès à l’intérieur du camp pour permettre l’accès des services d’urgence et, le cas échéant, le déplacement des conteneurs-poubelles ». Ces mesures doivent, selon le Conseil d’Etat, « connaître un début de réalisation dans un délai de huit jours, sous astreinte pour chacune d’elles de 100 € par jour de retard ». Il a en revanche écarté les autres demandes des associations requérantes en jugeant qu’elles ne relevaient pas de l’urgence.

Notes

(1) Voir ASH n° 2932 du 6-11-15, p. 64.

[Conseil d’Etat, 23 novembre 2015, n° 394540 et 394568, disponible sur www.conseil-etat.fr]

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