Edification d’une clôture anti-migrants entre la Hongrie et la Croatie, remise en cause de la libre-circulation au sein de l’Union européenne… La notion de « frontières » revient en force dans le débat politique. Depuis le 10 novembre, le Musée de l’histoire de l’immigration, à Paris, lui consacre une exposition, Frontières, qui mêle œuvres d’art et documents historiques. Celle-ci s’ouvre résolument par l’actualité. A l’entrée, un mur d’images vivantes attrape le regard du visiteur. Avec Harragas, Bruno Boudjelal assemble en une œuvre vidéo les selfies et autres petits films que réalisent les « brûleurs de route » dans les canots qui les emmènent par-delà la Méditerranée.
L’exposition multiplie ensuite les allers-retours entre présent et passé. A côté des photographies de ces frontières antiques que furent la Grande Muraille de Chine et le mur d’Hadrien, au sud de l’Ecosse, le visiteur se voit rappeler, dans la première partie de l’exposition, l’existence de murs actuels : ceux qui séparent le Mexique et les Etats-Unis, Israël et les territoires palestiniens, mais aussi les deux Corées ou encore le Bangladesh et l’Inde. Ainsi, en tentant de traverser ce dernier, 4 000 personnes auraient été abattues entre 2000 et 2010 par la police aux frontières, selon Human Rights Watch.
Intitulée Vers une Europe des frontières, la deuxième partie de l’exposition retrace l’histoire mouvementée des frontières du Vieux Continent. Jusqu’au début du XXe siècle, il était simple d’entrer dans un pays. Ce n’est qu’en 1917 que la France obligera tout allochtone à détenir une « carte d’identité d’étranger » – celle de Pablo Picasso est ici reproduite. L’exposition permet notamment de redécouvrir les mouvements de population qui ont accompagné les différents conflits sur le continent : après la Seconde Guerre mondiale, ce sont plusieurs millions d’Allemands qui ont ainsi été expulsés des pays d’Europe de l’Est.
Troisième et dernière partie de cette riche exposition, Traverser les frontières de la France se fonde sur les souvenirs d’étrangers venus s’installer dans notre pays depuis le XIXe siècle. Avec ses territoires d’outre-mer, la France ne compte pas moins de 35 pays frontaliers. Elle est à la fois une destination et un territoire de transit. C’est encore par l’actualité que se clôt l’exposition : deux migrants afghans ont consigné l’histoire de leur périple dans des cahiers – un matériau que Mathieu Pernot a transformé en œuvre d’art(1).
Frontières
Jusqu’au 29 mai 2016 au Musée de l’histoire de l’immigration – 293, avenue Daumesnil, Paris XIIe –