Le « plan d’action en faveur du travail social et du développement social », présenté le 21 octobre en conseil des ministres(1), constitue « une étape importante dans la reconnaissance de la recherche en travail social, ainsi que du travail social comme discipline universitaire », se félicite l’Association française pour le développement de la recherche en travail social (Affuts), alors que le sujet peine à être visible. Malgré les travaux de la conférence de consensus sur le travail social et la recherche en novembre 2012(2), aucun groupe de travail des « états généraux du travail social » n’a été consacré à cette question, et le rapport de la députée Brigitte Bourguignon ne l’a que rapidement évoquée, rappelle d’ailleurs l’association.
Parmi les avancées du plan : la prise en compte des parcours de recherche dans les possibilités de passerelles entre les formations sociales et les formations universitaires, la promotion du développement de la recherche en travail social, dont le futur Conseil interministériel du travail social – actuel CSTS – devra régulièrement faire état. Autre point positif, en matière de gouvernance territoriale, les régions et les départements sont invités à créer des instances « préfigurant des observatoires du travail social ». Plus globalement, le plan reconnaît l’intervention sociale comme un champ de recherche. Un acquis important, se réjouit l’Affuts, selon laquelle les termes « travail social » et « intervention sociale », utilisés indifféremment dans le plan d’action, devront néanmoins être clarifiés : « Cela demande de se pencher sur le périmètre même de la recherche », précise Marcel Jaeger, titulaire de la chaire de travail social et d’intervention sociale du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) et président de l’Affuts depuis le printemps dernier.
Plusieurs sujets restent donc ouverts à la discussion, selon l’association, parmi lesquels les objets de recherche. « On a jusqu’à présent surtout travaillé sur les pratiques, les identités professionnelles », indique Marcel Jaeger, selon qui il conviendrait, notamment, d’étendre davantage le champ de la recherche en travail social aux publics accompagnés, aux phénomènes nouveaux ou mal connus les concernant. La participation des personnes aidées à la production des connaissances, « en référence au croisement des savoirs promu par ATD quart monde, mérite d’être approfondie », défend l’association. Dans son rapport « Refonder le rapport aux personnes, merci de ne plus nous appeler usagers », le Conseil supérieur du travail social appelait au développement de la recherche collaborative(3).
L’Affuts s’inquiète en revanche du « silence fait dans le plan d’action sur les Prefas [pôles de recherche et d’étude pour la formation et l’action sociale] ainsi que sur leur financement par l’Etat et s’interroge sur les formules qui pourraient se substituer à ces pôles » (4), lancés en 2008 et inégalement soutenus selon les régions. Par ailleurs, l’Affuts entend défendre, au cours des discussions sur la mise en œuvre du plan, la création d’un statut de « formateur-chercheur », au même titre que celui d’« enseignant-chercheur » à l’université. « Il s’agit de valoriser le statut des formateurs en considérant le lien étroit entre la formation et la recherche », explique Marcel Jaeger. Ainsi, l’Affuts souhaite reprendre à son compte les propositions avancées dans le rapport du groupe de travail « formation initiale et formation continue » des « états généraux du travail social », soutenues par plusieurs de ses membres et présentées « malgré [leurs] implications budgétaires ».
Plus globalement, l’association annonce veiller à ce que le plan « se traduise par des mesures opérationnelles à interla hauteur des enjeux et marquant une avancée historique significative dans ce domaine ». Elle souhaite organiser un séminaire épistémologique, probablement au printemps 2016, dans le prolongement de la conférence de consensus de novembre 2012.
(2) Lancée dès octobre 2011 par la chaire du travail social et de l’intervention sociale du CNAM et l’Unaforis, avec plusieurs associations (Acofis, Affuts, Aifris, CERTS…) et soutenue par la DGCS – Voir ASH n° 2784 du 23-11-12, p. 24.