Tout a commencé lors d’une « conférence de territoire », organisée par l’agence régionale de santé (ARS) en 2013, réunissant le conseil départemental, des associations gestionnaires du secteur médico-social et le Centre interrégional d’études, d’actions et d’informations en faveur des personnes en situation de vulnérabilité.
Parmi les besoins émergents du terrain figurait la question du vieillissement des personnes en situation de handicap, et en particulier des travailleurs des établissements et services d’aide par le travail (ESAT). Dans la foulée de cette conférence, l’association régionale d’intégration (ARI) a été désignée comme chef de file d’un projet expérimental destiné à « accompagner la transition vers la cessation d’activité des travailleurs d’ESAT »(1). Financé par l’ARS, celui-ci réunit neuf ESAT gérés par sept associations différentes à Aubagne, La Ciotat et Marseille-Est. Sur les 1 000 travailleurs concernés, un tiers ont plus de 45 ans et 10 % plus de 55 ans.
Le groupe a commencé par établir un diagnostic de territoire pour recueillir les attentes des usagers, des professionnels, des directeurs d’établissement et des associations gestionnaires. Pour y parvenir, plusieurs « groupes action » mêlant les professionnels des neuf ESAT ont été établis. Ils comptaient des moniteurs d’atelier, des psychologues, des assistants de service social, des chefs de service, des directeurs et des usagers, chargés de s’interroger sur chacun des cinq grands domaines : démarches administratives et ressources, habitat et accompagnement social, vie sociale et mobilité, santé et enfin impact sur les pratiques professionnelles.
Leurs travaux, qui ont débuté en février 2014 et se sont achevés en août dernier, ont débouché sur la création de plusieurs outils. Un annuaire et une cartographie recensant les acteurs du handicap et de la gérontologie sur le territoire ont été mis en ligne sur un site réservé aux professionnels(2). Un guide reprenant les thématiques étudiées par les groupes-action a également été rédigé à destination des travailleurs d’ESAT. Un module de formation a aussi été mis en place pour les aider à mieux vivre cette transition. « C’est important de leur montrer qu’un jour, le travail s’arrête, mais que la vie continue, explique Rahma Beldjilali, chargée de mission pour ce projet. Cette formation permet de les aider à transposer dans leur nouvelle vie ce qui leur plaisait dans leur travail. Par exemple, si c’était l’utilité sociale, cela peut être faire du bénévolat, si c’était le lien social, effectuer une activité collective, etc. » Cette formation doit aussi permettre de bâtir sa vie future sur un plan pratique, comme effectuer des démarches pour trouver son logement, réfléchir à la manière d’occuper ses journées, anticiper où et avec qui prendre ses repas…
En matière de logement, le groupe s’est attaché à définir les conditions de réussite d’une entrée en EHPAD, en foyer logement ou en famille d’accueil. « Le mieux est que l’EHPAD dispose d’un vrai projet d’animation pour ce public spécifique, dont la moyenne d’âge est bien moins élevée que celle classique de ces établissements », note Rahma Beldjilali. Le lieu de vie futur ne devrait pas non plus se situer trop loin de l’ESAT, où les anciens travailleurs ont plaisir à retourner. « On est aux prémices d’une nouvelle discipline, à cheval entre les champs du handicap et de la gérontologie, constate-t-elle. Pour l’instant, on sait accompagner les personnes âgées d’un côté, et les personnes handicapées de l’autre. Réunir les deux est encore très nouveau. »
Maintenant que ces outils sont en place, l’heure est à leur diffusion au sein de chaque ESAT partenaire du projet. « Il faut maintenant que les équipes s’en emparent pour monter en compétence sur le sujet. »
(1) L’ARI gère 45 établissements du secteur médico-social. Contact :
(2) Le site